Dès le lendemain soir, Amédée m'annonce que Tomy est en taule :
– Raconte
– En détail ?
– Evidemment !
– Parce que c'était en latin !
– Et alors ?
– Alors faut que je traduise...
Lentement il se met à me rapporter ce que lui a dit Alban, en scandant les syllabes : longue, brève, longue, brève...
– A la première heure mien charretier appelai, afin mien char une nouvelle fois révisât, quoique la semaine antérieure eût déjà été vu, et quoiqu'immobile fût demeuré ; lui demandai est-ce que le dit Popol fût présent ; oui me répondit ; immédiatement m'y rendis, quoique vers la douzième heure ma visite eût été annoncée ; tout l'atelier à l'envers était ; étaient les garçons terrorisés, alignés, les bras levés ; hurlant le tien ami était, face au dit Popol, un jouvenceau d'au plus vingt ans, avec des anneaux, nez, oreilles, sourcils, nombril ayant été percés.
Aïe, aïe, aïe !!!
Je comprends maintenant pourquoi que j'ai toujours été nul en latin. Drôlement fatigant !.
Mais Amédée ne veut pas changer. Il a pris l'habitude, pour s'en souvenir, de transformer en latin ce qui entre en français. Pas l'inverse.
Il est fort en thème et délaisse la version. Et puis, les bières aidant, il ne mémorise plus que le latin...
Bref, j'ai mis un peu de temps pour comprendre qu'il me parlait d'un gamin, mécano dans le garage où Alban fait réviser sa voiture, genre punk, répondant comme moi au petit nom de Popol.
Phase 1 : Alban évoque ledit Popol sur son téléphone qui est sur écoutes.
Phase 2 : du coup, Tomy rapplique en vitesse.
Phase 3 : Alban se pointe en avance, et trouve le garage sens-dessus-dessous, avec Tomy qui fume des naseaux.
Phase 4 : ni une ni deux, il lui passe les bracelets, sur le mode « Garde à vue : vous m'expliquerez dans mon bureau comment cela se fait que vous saviez que j'allais passer dans ce fichu garage ? ».
Et le Tomy a bien été obligé d'avouer qu'il avait mis le juge sur écoutes, et la garde à vue s'est transformée en en détention provisoire.
Ça, c'est relativement simple et logique. Mais la suite ! Faut se concentrer...
Aussi sec, téléphonique colloque avec le général consul, clamant et menaçant, ce qui amena ledit juge à lui annoncer que ledit colloque sur un instrument computationnel était légalitairement conservé. Menace d'un juge dangereux procédé être, qui l'amènerait à être auditionné, l'audition ayant lieu le lendemain.
Parce qu'il ne voulait surtout pas le priver de sa visite médicale au Val de Grâce. Meilleure santé, il lui souhaitait, meilleure santé optimale, et meilleurs souvenirs aux médecins... Entretemps, le dossier, pschitt, chez le questeur...
Inutile donc de menacer... accident intempestif par exemple... ce qui pourrait seulement détériorer sa cause.
Illico, second téléphonique colloque, avec Villeneuve cette fois. Une absolution, il sollicitait, Monsieur de Villeneuve, avec ablation de la mémoire, il requerrait. Chose publique en danger, affirmait-il.
Mais la chose publique, précisément, qui en était juge ? Parce que, lui, Alban Barrère, juge il était, se permettait-il de lui admonester...
En ce qui concerne le Président, dans une sacrée confusion extrêmement tourbée il doit être. Quelle impression aurait-il, par exemple, lui, Villeneuve, s'il lui annonçait que ses téléphoniques colloques sur un instrument computationnel à son insu également étaient conservés ?
Pas réglementaire, certainement... Ordonnateur des ordres en plein désordre ! Sauf que, Villeneuve affirma, depuis un certain temps, il y en avait qui s'en moquaient au maximum de cette fichue régulation...
La fameuse armée cénomane, par exemple, elle s'en riait bien et ne régulait pas grand chose...
Ça alors ! Medhi, Beauchêne et Cie, armée cénomane étaient ? Ordre neutraliser armée cénomane du Président était venu ?
Citoyen Villeneuve confirmer rien ne pouvait... Vestiges d'impressions seulement lui restaient. Consensus, sans ordre écrit ayant été donné, la chose ayant été bien entendue.
Est âpre la politique, ardu et périlleux l'office de conseiller. Faut rendre intelligible.
Intelligible oui, mais intelligible quoi ?
Ben que l'opposition, depuis l'affaire des vidéos, en pleine érection de révolte était... Des têtes exigeant, avec ablation du périlleux matériel...
Ladite opposition taciturne demeurait si était de retour consulat Liévy... et tant pis si était décolletée de Beauchêne la tête...
Honneurs en république, reconnaissance en politique, il sait bien que dans le trou de l'âne on peut se le mettre...
Le juge Alban interloqué était : entre reconnaissance défectueuse et parfaite extermination, une longue distance s'étend. Villeneuve affirmatif était : nulle extermination n'avait été évoquée...
Une déambulation dans la nuit réfrigérée tout au plus. Avec un seul fusible néanmoins... Dumonchelle en l'occurrence... Tant pis pour lui !
Pour les autres, un peu de temps, une modeste persuasion, et normal tout redevenait : Beauchêne à se taper des requiem et le général Lievy au consulat...
Halte là, je prohibe, réplique Alban : en langage judiciaire tentative d'homicide sur les conjoints Dumonchelle cela s'appelle... par ailleurs toujours ambulatoires et vraisemblablement vindicatifs...
En plus, homicide formel sur la personne du docteur Feuille, dans l'explosion de son habitation infélicitement décédé...
Villeneuve véhémentement troublé était. Une proposition avance-t-il : et si le juge un autre militaire empoignait, Monsieur Tomy par exemple.
Malheureux pour lui, évidemment, en ce moment par les vigiles retenu. Monsieur Tomy au juge était laissé, mais pas le consul Liévy. Trop de pluralité relationnelle avec figures puissantes avait. Fallait parvenir à l'intelligence.
Lorsque le consul tout frais de son stage au Val de Grâce sera sorti occurrera un petit déjeuner commun au palais élyséens avec le Président présent.
Les croissants à se délecter sont. Pur beurre confirmé.
Bref, si je pigeais bien, le Villeneuve se mélangeait gravement les pinceaux. Il avouait qu'il avait laissé faire, après ne pas avoir été pour, sans avoir pour autant été contre, non que son Président ait dit oui, tout en n'ayant pas dit non, histoire de préserver son quant-à-soi tout en laissant faire quand même.
Résultat : Paul Dumonchelle, alias bibi, refroidi ! Nora aussi, au passage !
Epitaphe : « Traitres à la patrie », avec bénédiction du Président de la République en personne. Bienvenue aux cadavres anonymes. Retrouvailles fosse commune. Rideau.
Non mais !!!
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3. Opération Criquets
General FictionPaul et Nora, nos époux désormais épris, pensaient pouvoir enfin... Mais c'était sans compter... sans compter avec les « criquets », les « criquets » des Chinois alliés aux Calabrais. Autrement dit de pleins cargos tout bourrés d'immigrés, des cargo...