Les Derniers Veilleurs, Tome 2 : Les Joyaux Mortels.

Chapitre 35

Je me réveille, ballottée de tous les côtés. Je mets quelques secondes à émerger, et à comprendre que je suis en équilibre sur l'épaule de quelqu'un. J'ouvre difficilement mes yeux et regarde autour de moi. Nous sommes entourés de deux ou trois personnes, mais tous semblent calmes et marchent lentement. J'en déduis que nous avons échappé aux waräans. Comment ? Je n'en ai aucune idée. Les visages autour de moi me sont inconnus. Personne ne me regarde. Je ne sais pas si Reyna va bien, ni comment va Caleb, ou Lydia... Petit à petit, une image terrible me revient à l'esprit. Chris, allongé sur le sol, sans vie. Je porte une main à mon visage. Il est encore humide. Je ferme les yeux avant de les ouvrir à nouveau. Rien a changé. Tout est réel. Malgré nos disputes, nos désaccords, nous avions fini par redevenir ami, par tout arranger. Notre année en tant que couple nous avait aussi rapproché et créé des liens uniques. Je partageais avec lui quelque chose de spécial. Il m'est arrivé de le détester, je le sais, mais il m'est aussi arrivé de l'aimer, et de l'aimer vraiment. Je me rends compte qu'une partie de moi aurait voulu rester là-bas avec lui, abandonner le combat et me rendre. Le rejoindre s'il le fallait, peu importe où il est maintenant. Je suis fatiguée de souffrir, de m'attacher à des personnes que je perds. Une larme roule sur ma joue. Malgré tout ce qui s'est passé, Chris est et restera le premier amour de ma vie. Perdre une personne si importante revient à se faire arracher un morceau de cœur à l'aide d'une pince en fer chauffée à blanc. Autrement dit, c'est on ne peut plus douloureux. Pourtant, il m'a demandé de tout arranger. Je le ferais pour lui, pour tous ceux que nous avons perdu et pour tous ceux qu'il reste à libérer de l'emprise du mal. Je me relèverais comme je le fais chaque fois, et je ferais face à tout ce qu'il me reste à affronter. Pour lui. Pour moi. Chris m'a aussi demandé de ne pas l'oublier. Ça n'arrivera jamais. Son image est gravée en moi, à tout jamais.

Plus je me réveille, plus les douleurs de la journée se manifestent. Les courbatures, le mal de dos, la fatigue harassante... La plaie dans ma jambe me brûle atrocement et lance comme jamais. Je me sens tout de même capable de marcher. De plus, je ne sais pas qui me porte, mais je ne préfère pas rester un fardeau. Je bouge un peu et tapote le dos de mon porteur. Celui-ci s'arrête et me pose sur le sol avec un petit sourire. Je grimace en posant le pied sur le sol.

-Salut, belle au bois dormant !

Après quelques secondes de réflexion, je reconnais le garçon de tout à l'heure.

-Claïmon ?

-Tu te souviens ! Je suis flatté. Comment tu te sens ?

-Terriblement mal. Où sont mes amis ?

-Devant. J'ai proposé de te porter car deux autres personnes de ton groupe se sont évanouis. La fille que tu portais en arrivant et le garçon qui s'est fait poignardé.

-Caleb ? Je dois le voir !

-Il va bien. Je crois. Son état est stable, pour le moment. Ils sont deux pour le porter. Tu t'es vite réveillée, d'ailleurs.

Je hoche la tête. Je commence à marcher, mais ma jambe est vraiment douloureuse. Claïmon me propose de s'appuyer sur lui, ce que j'accepte volontiers.

-Vous les avez semé ? Les waräans ?

-Non. Nous avons dû les tuer, dit-il avec un regard sombre. Comme tous ceux qui se sont mis sur notre chemin.

-Tu dois retenir ta haine. Tous les waräans ne sont pas nos ennemis.

-Tu en connais des gentils ? Parce qu'ils ont tous tué au moins deux personnes.

-J'en ai conscience. Certains n'ont juste pas eu le choix.

-Ce sont des meurtriers.