Chapitre 17, Mia.

906 60 0
                                    

Jeudi 12 décembre dix-sept heures trente cinq.

- Il fait absolument ce qu'il veut, répliquai-je à Genna en posant mes livres et mes cahiers brutalement sur la table de la bibliothèque qui était vide à cette heure-ci. On est pas ensemble, on a pas signé de contrat donc il n'a aucun compte à me rendre.

- C'est pour ça que tu es jalouse ? Continuait mon amie en posant son sac à main à côté de mes livres.

- Pas du tout ! Je m'assis à la table et continuais : on a pas signé de contrat et il fait ce qu'il veut !

Genna venait de me raconter ce qu'elle avait appris en se rendant aux toilettes cet après-midi. J'étais en folie, j'avoue. Garrett et Amanda. Ensemble. Chez elle. Mardi soir. Et le lendemain après le cours de théâtre il m'avait proposé d'aller à la fête foraine avec lui et Anna. Et j'avais accepté. J'étais vraiment trop bête. Le démon sommeillait en moi. Mia contrôle toi, ne fait pas comme avant. Tu dois rester celle que tu es actuellement.

- T'as le rouge aux joues Mia et c'est pas celui de la honte, c'est celui de la haine.

- Mais bien sur que j'ai la haine ! Comment il a pu ? Comment j'ai pu croire ? M'étranglais-je de colère.

Genna me regardait et ne savait pas quoi dire pour me réconforter. Comment j'avais pu tomber dans le panneau ? Comment j'avais pu croire qu'un mec comme lui aurait pu s'intéresser à moi ? Et surtout pourquoi j'avais accepter cette stupide invitation à la fête foraine ?  Quelle idiote.

- Mia, tu ne vas quand même pas annuler votre rencard ? M'interrogea ma meilleure amie très posément.

- J'y compte bien, rétorquai-je. Elle me regarda, voulut dire quelque chose mais finalement se ravisa.

Je sortis mes affaires pour travailler en attendant cette stupide réunion parents-professeurs. Je ne savais absolument pas qu'elles étaient mes notes et j'avais peur que ma mère me punisse à nouveau surtout que lorsque j'étais punie ce n'était jamais dans la demi-mesure. Elle n'avait jamais fait dans la demi-mesure. Même après les vacances de Toussaint elle m'avait forcé à rester cloîtrée à la maison sans aucun contact alors que les cours avaient repris. Je priais intérieurement depuis la fin des examens pour que j'obtienne au moins trois A sur mes cinq tests. J'attendais le coup de fil de ma mère qui me signalerait qu'elle était au lycée. Mon téléphone vibra. 

Je jetais un coup d'œil et vit le nom de Garrett affiché. Genna m'observait pour voir ma réaction. Je ne bougeais pas. Il était hors de question que je réponde. Elle prit mon téléphone, le déverrouilla à la vitesse de la lumière puisqu'elle savait que je n'avais pas de code et lut à haute voix : « Salut Mia, c'est toujours bon pour samedi prochain ? J'espère que oui parce que Anna est impatiente si tu savais! ». Je n'avais pas eu le temps de bouger qu'elle avait déjà renvoyer un message et avait reposé mon téléphone.

- T'es vraiment une amie toi ! Dis-je contrariée

- Tu me remercieras un jour ! Rétorqua-t-elle en haussant les épaules.

Je me replongeai dans mon texte de Molière à analyser pour lundi prochain. Mon téléphone sonna à nouveau. Je poussai un juron et Genna me dévisagea parce que je l'avais dit en français malgré moi.  Ma mère était là. Le calvaire allait commencer. Genna et moi quittâmes la bibliothèque pour aller vers nos rendez-vous respectif. On se souhaita bonne chance et je retrouvai ma mère.

- Chérie, on a rendez-vous avec ton professeur de français, me dit ma mère en m'embrassant la joue. J'acquiesçais.

- Bonjour je suis la mère de Mia, déclara ma mère en serrant la main de Madame Shymon.

- Bonsoir. Alors, comment allez-vous Mia ? Questionna ma professeur en se tournant vers moi.

- Bien, répondis-je en faisant un sourire plus que faux.

- Bon alors, Mia est une très bonne élève qui a la tête sur les épaules, je n'ai que d'excellents retours de mes collègues. En ce qui concerne ma matière elle a un excellent français. Elle ne fait presque aucune faute à l'écrit et n'a aucun accent américain lorsqu'elle parle. Avez-vous de la famille française ? Oui, mon père et ma mère.

- Non, répondis-je froidement.

- Mia vous a parlé du voyage ?

Ma mère se tourna vers moi et m'interrogea du regard. Je ne l'avais plus évoqué depuis le jour de la rentrée. De toute façon, je ne comptais plus retourner à Paris. Et puis c'était trop tard pour l'inscription de toute façon.

- Mia vous n'avez pas beaucoup d'amis dans la classe et le voyage peut vous permettre de vous ouvrir, vous ne croyez pas ?

- J'en ai en dehors des cours Madame et le voyage ne m'intéresse pas.

- Pourtant il y a de très beaux monuments et il dure plus d'une semaine expliqua-t-elle à ma mère. Sauf que tout ça elle et moi le savions. On connaissait Paris bien plus que tous les habitants de la ville.

- Écoutez, dit ma mère très posément, je pense que si Mia ne veut pas y aller on a pas à la forcer.

- Très bien. Bon et bien je crois que nous avons fait le tour. Encore félicitations Mia parce que vous avez obtenu que des A sur tous vos tests, conclut ma professeur en se levant et serrant à nouveau la main de ma mère. À lundi, ajouta-t-elle en me souriant chaleureusement. C'est ça.

Je sortis en première de la salle et vis Garrett qui avançait dans ma direction mais ne semblait pas m'avoir vu. Non non non. Ce n'est pas le moment. Le démon est prêt à sortir. Mia contrôle sur toi même.

- Maman, je dois voir Genna, tu me laisses cinq minutes ? Me tournai-je vers elle

- D'accord, je t'attends à la voiture.

Garrett arrivait dans ma direction. Il sembla m'avoir vu et accéléra le pas en s'approchant de moi et il me sourit en me voyant vraiment. Mes joues s'enflammèrent mais de colère. Je ne voulais pas le voir mais trop tard. Il était ici, à moins de cinquante centimètres de moi.

- Anna est ravie que tu nous accompagnes samedi prochain, dit-il le sourire au lèvre

- Je sais. Répliquai-je durement

- Ça ne va pas ?

- Si ça va très bien, rétorquai-je en évitant son regard.

- Ton message semblait pourtant enthousiaste... Fit-il avec une intonation qui me fit comprendre qu'il était vexé mais je m'en fichais car je l'étais beaucoup plus que lui.

- Ce n'est pas ça. Je suis contente d'aller à la fête foraine avec vous, mais pose-toi des questions et les bonnes. Et puis merde moi aussi j'ai le droit d'être énervée ou triste non ?

Mon moi ressortait. Mon ancien moi. Je sentais les larmes me monter. Trop de pensées néfastes, trop d'émotions rapides. Mon cerveau allait exploser. Il me prit le menton et je fus forcer de rencontrer son regard marron très clair. Je serrai les lèvres. Et une larme s'échappa. Elle parcourut ma joue mais avant de finir sa course dans mon cou son pouce l'avait déjà arrêtée.

- Ma mère m'attend. On se verra à la fête foraine, dis-je la voix étranglée en m'enfuyant aussi vite que possible.

« Tu es amoureuse, finit par lâcher Genna lorsque je lui racontais les détails durant notre conversation téléphonique.

Je restai muette.

- Tu es amoureuse, se répéta-t-elle »

Je n'avais aucune réponse adéquate à son affirmation si ce n'est qu'elle était vraie ou du moins j'avais des sentiments que je ne voulais pas admettre.


Nos différentes faces cachéesOù les histoires vivent. Découvrez maintenant