23 -

3.4K 414 161
                                    


Son souffle était court, éreinté, ses membres épuisés. Son torse se soulevait rapidement au rythme effréné des battements de son cœur. Les traits habituellement délicats de son visage étaient tirés et abîmés par une âme sombre et étrangère. Un cri de rage passa la barrière de ses lèvres écorchées alors qu’il donnait un violent coup de son poing égratigné contre le métal glacé de la cage d’ascenseur. Toute sa rancœur, sa haine, sa tristesse, son désespoir, tout. Il faisait tout sortir à travers ses coups désordonnés et douloureux. Ses mains s’ouvraient de plus en plus, laissant des traces fines d’un sang pourpre sur le gris effroyable du métal. Il avait si mal et était ébranlé d’une colère sans nom, d’une rage et un torrent secouait son âme à lui en faire perdre la raison.

Jungkook retint un énième coup maladroit lorsqu’il sentit la cage de métal se remettre en mouvement après ce qui avait semblé être une éternité d’immobilité. Son visage n’affichait qu’une haine, une dangerosité méconnue chez cet homme de délicatesse et de pureté. Ses poings fermement serrés en attendant l’ouverture des portes, il sentait son cœur cogner brutalement contre sa cage thoracique, c’était si brutal que ça en devenait douloureux, mais ce n’était rien. Rien d’assez puissant pour le détourner de sa douleur mentale qui faisait trembler tout son corps soudainement plus imposant.

Sursautant presque lorsque les portes de métal s’ouvrirent devant ses yeux, il pressa le pas pour en sortir, ignorant l’impact qu’il avait précédemment fait dans l’ascenseur. Oh non, il s’en moquait bien, quelqu’un avait fait un plus gros impact encore dans son cœur ; et Jungkook se maudissait encore et encore d’avoir été si faible et si crédule. Il n’avait que ce qu’il méritait, mais il avait pourtant si mal. Ses pas désordonnés et pressés le menèrent jusqu’à la porte de son appartement qu’il manqua d’enfoncer sans sa précipitation était grande. Il savait que son excessivité était due à son esprit malade qui ne connaissait que la démesure, pourtant il ne pouvait se contrôler, il ne pouvait s’empêcher de vouloir détruire la moindre chose qui croisait son chemin. Sa colère était telle qu’il se sentait capable de briser sa propre âme en morceau.

Il claqua sa porte derrière lui en lâchant un nouveau cri de rage, se moquant bien de l’heure plus que matinale, de ses voisins ou de quiconque pouvant être gêné par ses éclats d’âme. Il s’en moquait car ce soir Jungkook avait décidé d’être égoïste. Il avait décidé d’assumer son égoïsme maladif, il avait décidé d’assumer sa véritable nature. Il avait décidé d’accepter le fait qu’il n’était qu’une simple lune égoïste incapable d’éclairer les nuits de quiconque. Et ses larmes sèches qui tachaient le fond de son âme libérait une torture et un torrent de désespoir alors que le brun libérait cette douleur et l’exprimait violemment, renversant la moindre des choses sur sa table, table basse. Il cassait le tout, mais plus que des objets physiques, il cassait son âme, les morceaux de celle-ci, les réduisait en poussière. Il tuait tout, sa dignité, son honneur, ces choses qu’il avait bafouées et vendues au diable, il mourrait en les faisant mourir en lui.

Il se déchaînait tellement qu’il en oubliait la source de ses malheurs, il se perdait dans un blizzard de détails, de futilités qui constituaient tous ces événements qu’il voulait enfouir au fond de son corps pour le détruire. Ces événements qui constituaient sa maladie, ses échecs, ses douleurs, ses peurs et insécurités, sa vie misérable. Il ne savait même plus contre qui il était en colère. Lui-même pour sa faiblesse et ce qu’il était. Sa maladie qui constituait sa personne. Ses parents qui ne l’avaient jamais supporté. Taehyung qui l’aimait mais n’était pas là. Son frère qui en faisait tant mais jamais assez. Jimin, qui avait ébranlé son âme comme jamais et qui avait réveillé tous ses démons les plus horribles.

Brutalement, il s’arrêta dans sa destruction folle, essoufflé et les mains tremblantes sous la douleur et l’adrénaline. Ses orbes d’anthracite glissèrent sur le massacre qu’il avait fait de son appartement, observant les pots cassés, toutes les feuilles déchirées et répandues au sol, les pétales et feuilles vertes détruites et le terreau à ses pieds. Une chaise aux pieds cassés barrait l’accès à la partie nuit qui avait également empathie. Malgré sa destruction massive de lui, de son environnement et même de son corps, cette horrible sensation qui lui donnait envie d’arracher ses tripes était toujours présente au fond de lui, elle démangeait son âme, rognait sa raison, dévorait son humanité.

ROSE COTONNEUX T.1Où les histoires vivent. Découvrez maintenant