Chapitre 11

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Assis sur les rails de train et les yeux rivés sur la Ville, Morgane et Axel étaient parfaitement silencieux.

Le grillage évitant n'importe qui de monter sur les rails de la gare avait été défoncé. Le reste d'un train attendait là, attendait son départ reporté à la fin du monde, à la droite des deux Destroyas, près d'un quai.

Elle n'osait pas le regarder. La Destroya était aussi rouge que les pétales d'une rose qu'on offrirait à celui qu'on aimait le plus au monde. Morgane paniquait... encore et toujours.

Un silence s'installa entre eux. Personne en vue. De quoi voulait-il lui parler ? L'adolescente voulait le savoir, à tout prix ! Mais, en même temps... elle repensa à ses sentiments enfouis au fond d'elle, prêts à exploser. Personne en vue. Pas de Clara à l'horizon. Personne pour les interrompre.

Morgane repensa à l'autre adolescente... ce même sentiment d'amertume l'étrangla. ''Bonne chance'', avait-elle dit à Axel avant de déguerpir. Et pourquoi, ''bonne chance'' ? Celle au corbeau l'ignorait.

Après une longue inspiration, l'adolescente fit :

- Sinon... pourquoi tu voulais me parler ?

- Ah, en fait, balbutia le Destroya, c'est juste que... euh...

Axel marqua une pause. Morgane le regarda furtivement avant de se concentrer sa vue sur les immeubles de la Ville.

- Hier, articula-t-il juste.

La Destroya se raidit et le regarda de nouveau, avec des yeux écarquillés. Il faisait, sans aucun doute, écho à la scène où Morgane allait tout lui dire... avant que Clara vienne tout ruiner.

- Oui, bah ? lança-t-elle, après un léger rire nerveux.

- Tu voulais me dire quoi, en fait ?

- Avant que Clara vienne s'incruster ?

- Avant que tu partes et que tu m'abandonnes, ouais, lança le Destroya.

L'adolescente baissa les yeux, elle se sentait étrangement coupable, tout à coup. Kim croassa, c'était bien la seule présence qui ne dérangeait pas Morgane, quand elle était qu'avec lui.

- Bon, lança-t-elle. Tu veux savoir ce que je voulais te dire, hier ?

- Ouais... enfin, je veux te dire quelque chose avant, quand même.

Ils se regardèrent dans les yeux. Morgane essayait de garder son calme, mais c'était impossible : son cœur était à deux doigts de lâcher, ses mains tremblaient de plus en plus, et étrangement, une bourrasque de chaleur l'embrasa de la tête aux pieds.

- Je t'écoute, déclara la Destroya en souriant niaisement, trahissant sa sérénité.

- Voilà, ça fait longtemps que j'y pense, que ça me... euh... bon.

Axel détourna le regard avant d'articuler :

- Morgane, voilà, je...

Un rire le stoppa. Ils tournèrent leur regard vers la gare, qui était derrière eux... puis virent Baptiste, assis sur le quai.

Le chef leur fit un petit signe de la main. Les deux Destroyas restèrent bouche bée d'étonnement, et peut-être aussi d'honte, en voyant le jeune homme qui était clairement en train de les observer.

- Mais qu'est-ce que tu fous là, toi ?! s'énerva Morgane.

Son corbeau hurla, en déployant et en levant les ailes. Baptiste rigola avant de s'approcher vers eux, lentement.

- Rien, rien, lança-t-il d'un ton pensif. Je voulais juste voir comment ça allait commencer.

- Mais de quoi tu parles ? rétorqua l'adolescente. Après Clara, c'est toi, c'est ça ?

- Vouvoie-moi. Je dois te le rappeler à chaque fois ?

- Si j'te dis ''allez-vous-en'', auras-tu la amabilité de nous laisser tranq...

Les deux Destroyas eurent seulement le temps de cligner des yeux que Baptiste disparut, sans laisser la moindre trace. Ils se regardèrent, abasourdis et en sachant pas quoi dire devant cela.

- C'est moi où il vient de disparaître devant nous ? articula Morgane.

- Oh, et puis on s'en fout !

Axel l'attrapa par les épaules, Kim s'envola avant de se prendre la main de l'adolescent contre son corps de volatile, pour qu'elle le regarde droit dans les yeux. Morgane se répétait intérieurement de ne pas paniquer comme une idiote. Le corbeau les regardait, agrippé à un des longs rails.

- Morgane, je... je... merde, je sais pas comment te le dire.

- C'est... embêtant. Tu veux que... je t'aide ?

- À quoi ?

- Bah, je peux essayer de t'aider à... euh... me dire ce que tu veux me dire, en quelque sorte ?

- Non, cracha-t-il en fronçant légèrement les sourcils, j'ai pas besoin de ton aide.

Morgane expira, en essayant d'expulser tout son stress qui grouillait au fond d'elle, puis déclara :

- Ça me soûle de tourner en rond comme ça, Axel.

Il haussa un sourcil mais n'eut pas le temps de dire le moindre mot. Elle l'attrapa les mains de l'adolescent, encore posées sur ses épaules, puis ferma les yeux.

- Avant que Clara vienne m'interrompre, raconta Morgane calmement, je voulais te dire quelque chose de très important pour moi, peut-être pas pour toi... enfin, probablement pas important pour toi. Je sais que c'est risqué ce que je vais te dire, je le sais, mais j'en ai marre de... stagner dans tout ça.

Morgane tremblait. Ses yeux se mirent à la brûler, elle ravala ses larmes d'angoisse, mais aussi de soulagement d'enfin se confesser après des jours, pour ne dire des mois, de pur silence.

- Je t'aime.

Un silence, vite brisé par un rire nerveux de la part de Morgane. Elle baissa la tête et laissa tomber ses bras le long de son corps. Sa vue se troublait par des larmes, mélangeant cette peur irrationnelle des conséquences que cette révélation allait entraîner, mais aussi cet apaisement qu'elle recherchait depuis si longtemps.

La main du Destroya frôla sa joue, elle releva la tête. Axel la regardait, la bouche légèrement ouverte, mais aussi avec un sourire timide peint sur le visage.

Il rapprocha ses lèvres des siennes... la Destroya ne comprit pas directement qu'il venait de l'embrasser. Une mince larme coula sur sa joue... tout cela semblait si irréel.

C'est ainsi qu'ils scellèrent leur amour.

Sans remarquer la présence de leur chef, juste devant ce mur qui menait aux rails de la gare. Baptiste sourit légèrement... avant de disparaître comme une ombre chassée par la lumière.

DESTROYAS II : La Zone FantômeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant