Adam 2.0

Gond : limite du sang froid.

Tristan Bernard

Le brouhaha des parfaits moutons devant l'établissement se fait de plus en plus fort. À chaque pas, nos mains se resserrent, sans parler de mon estomac et encore moins de la désertion de mes trois neurones.

En moins d'une dizaine de pas, la plupart des regards sont sur nous, j'aime pas. Je me sens à poil, je crois que je tremble un peu aussi. J'ai peur, véritablement peur, mais, je ne le lâche pas pour autant, lui non plus. On échange un regard, ses yeux noirs me télescopent encore une fois et m'envoient dans notre univers.

Du coin de l'œil, je vois les deux sportifs se resserrer auprès de nous. Pour une fois, c'est moi qui détourne le regard en premier le cœur au bord des lèvres.

Un des potes aux jumeaux s'approche de nous.

Je l'ai déjà vu, je le sais, il m'a même peut-être dit son prénom, mais, franchement cette fois-là comme aujourd'hui, j'm'en branle. Les filles se sont décalées sur le côté, auprès des geeks, sage décision.

Je fixe instant la belle brune, ses yeux verts ne me renvoient que du courage et de la force. Elle y croit, bien plus que moi. Je prends le parti de lui faire confiance. Elle me dit qu'elle sait, donc...

— Comme t'as pas pu te taper le cul un des deux, où les deux, tu les as envoyés aut' pars en fait ! Dis bien trop calmement l'espèce d'abrutis toujours en s'avançant vers nous.

Forcément, les gens nous regardent un peu plus encore. J'entends même des chuchotements et je croise certains regards qui s'arrêtent sur nos mains liées.

Dégoût.
Pitié.
Haine.
Jalousie.
Dégoût.

Il n'y a que ça et comme un mauvais refrain, ça tourne en boucle encore et encore jusqu'à l'overdose.

— Casse-toi Justin. Lui dit Bryan en allant à sa rencontre, ce qui me reconnecte avec la réalité.

J'aime pas. Il a ce regard, le regard du gros dégueulasse, le même que celui des doubles. Le blond s'en est aperçu lui aussi, il se stoppe. Je le vois se tendre, la main de Louis se serre encore plus dans la mienne. Elle devient plus froide aussi.

C'est là que j'ai fait la plus grosse erreur de ma putain de vie, J'ai lâché la main de Louis après un regard complice.

Je l'ai fait pour rejoindre mon meilleur ami, je l'ai fait, car c'est à deux, toujours à deux, on se l'est promis. Il a toujours été là pour moi, encore aujourd'hui il va au front sans se poser de question. Juste parce que lui aussi y croit.

Voilà, pourquoi je l'ai rejoint.

Cinq pas plus tard, le cri d'Estelle et le juron de Jess me font me retourner.

Je vois juste la fin de la chute de mon copain, un filet d'eau glacée parcourt mon dos. J'allonge le pas vers lui pour ne pas que son visage rencontre le bitume.

En une seconde, j'ai déraillé, une simple putain de petite seconde, c'est tout ce qu'il m'a fallu pour le chopper par les épaules, le retourner, le poser sur le sol et retirer ma main de derrière sa tête et me rendre qu'elle est pleine de sang.

Estelle a été la plus réactive de tous, elle a dégainé son portable, c'est approché de nous tout en appelant les pompiers, elle a aussi demandé à Jess d'aller prévenir l'infirmière.

Un bruit de fer qui percute le sol me fait lever le nez, un grand black se tient devant moi, une barre en métal à ses pieds.

J'ai déraillé.