Le rire c'est l'arme absolue. C'est l'arme de la fraternité.

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 Philippe Val



Je ne suis pas le gentil fils qu'il aurait espéré, je ne me tais pas et surtout, il n'est rien pour moi.
Non, lui, il est plus du style à me dire à quel point je le déçois, que mon comportement est indigne de notre famille, etc., etc. Je n'ai pas pu m'empêcher de lui répondre, une fois de plus et une fois de plus l'un de nous deux s'est retrouvé collé contre le mur. C'est ma mère qui nous a séparés, comme couvent d'ailleurs. Jamais elle ne nous a laissés aller jusqu'au bout ... Jamais ! Pourtant lui éclater la gueule me ferait le plus grand bien !! Il ne mérite que ça de toute façon ! Lui et ses putains d'idées militaires à la con !


Aujourd'hui, je n'ai pas cours, enfin les cours sont annulés parce que notre lycée reçoit deux équipes de foot pour l'ouverture du tournoi. Je n'y assiste pas, je m'en fous c'est pas nous qui jouons. On a juste la chance d'avoir le plus grand stade du coin. Bryan est affalé à côté de moi sur le canapé du salon, il s'est ramené quand le pater' s'est barré, sans un mot bien sûr. Grand con. On regarde une connerie à la télé, lui, il s'applique à vider un pot de pâte à tartiné à la cuillère et moi un pot de pâte de spéculos. Je n'aime pas le Nutella, s'il y en a dans le placard c'est juste pour lui quand il squatte à la maison. Chez lui il y a mon pot de spéculos.


À force de zapper de programme débile en programme débile, on finit par tomber sur une série de saintes pleureuses. On y voit des bonnes femmes en train de chialer en bouffant des litres de glaces.

Bryan et moi avons eu le même réflexe, on s'est regardé et en une seconde on s'est retrouvés sur nos pieds.


— J'vais commander une pizza !


— J'vais prendre des bières ! Je lui dis en rangeant les pots de sucre dans le placard au passage, j'allume la console et m'étale de nouveau et balance mes pieds sur la table basse.


— Dans vingt minutes, me dit le blond en prenant la même position que moi, il prend une bière et expulse tout le gaz qu'il avait dans le bide. Un son très mélodieux en somme.


— J'ai trouvé ça sur le pas de la porte les garçons, dit ma mère en secouant les cartons fumants. En plein exercice à ce que je vois, rajoute-t-elle un poil moqueuse.
J'avoue je suis rassuré. Un peu plus et j'allai dans les chiottes vérifier si j'avais encore ce qui fait de moi un mec.


— Vous allez faire quoi de votre journée ?


— On va au centre commercial après, dit le blond en engouffrant une part de pizza.
Ma mère range ses commissions dans le placard. Elle stoppe son geste en voyant nos deux pots de cochonneries pratiquement vides. Elle se retourne vers moi en haussant un sourcil avec son sourire de peau de vache.


— Juste au cas où les mouchoirs sont dans le tiroir du bas. Elle éclate d'un rire tonitruant alors que je me décompose. Bryan fait mine de ne pas avoir entendu et continue de manger. Du coup je fais la même en prenant soin de tourner le dos au démon qui me sert de mère.


Ma mère nous a déposés après le repas. On y retrouve la petite blonde, elle a toujours un truc qui la différencie. Aujourd'hui, ce sont ses chaussures. Des Dr. Martens de différentes couleurs : une rose et une noire à chaque pied par dessus son jean noir. À part sa botte, les seules notes de couleurs sont ses mèches rose flashy qu'elle porte depuis peu.

L'aprèm est passée assez vite, on a fait des tas de magasins, on a écumé les boutiques de jeux vidéo et de musique. Estelle a explosé le score d'achats compulsifs, comme toutes nanas qui se respectent. On se retrouve donc à porter ses sacs. D'un, parce que Bryan ne peut pas lui refuser quoi que ce soit.

Adam 2.0Où les histoires vivent. Découvrez maintenant