Je trouvais cette image très représentative du passé d'Eliaz.
PDV ELIAZ :
Les yeux d'Alba s'écarquillèrent de stupeur.
Exactement la même chose ? Pareil ?
- Oui.
Comment c'est possible ?
- Je ne sais pas trop en réalité...Mais j'éprouve parfois les mêmes sensations que toi dès que je te touche. Pas tout le temps, mais quand ça arrive, c'est puissant.
Elle hocha de la tête, indiquant qu'elle me comprenait amplement. Son museau était toujours aussi proche, bien qu'elle venait littéralement de s'asseoir sur la table basse.
Nous restâmes plusieurs secondes sans rien dire, les yeux baissés, des questions plein la tête. Les effets ressentis étaient presque surnaturels, à tel point qu'ils empêchaient Alba de maintenir son camouflage en place. Je devrais éviter de la toucher à l'avenir, histoire de ne pas la déstabiliser. Sa présence devait absolument rester cachée de nos probables ennemis.
Alba releva doucement les yeux et les planta dans les miens. Je fus subjugué par ce vert pétillant regorgeant de puissance et de confiance. J'avais l'impression qu'ils luisaient.
Eliaz...commença-t-elle doucement.
- Qu'est-ce qu'il y a ? Demandais-je de la même manière.
Il y a quelque chose qui m'intrigue dans tout ça.
Je fronçais les sourcils. Il y avait tellement de choses qui m'intriguaient aussi. Je penchais légèrement la tête sur le côté, l'incitant à continuer. Un long laps de temps s'écoula sans qu'elle ne dise quoique ce soit, je ne sais pas pourquoi mais j'avais une certaine appréhension.
Qui es-tu...
J'avais raison. Mon corps se statufia de nouveau, ça m'arrivais de plus en plus souvent avec elle. Je ne voulais pas lui dire tous mes secrets, tout sur moi, ma vie, mes blessures, mon père, mon rôle, ma place, ma fuite, mon sauvetage. Je ne pouvais pas, j'avais un blocage.
On a beaucoup parlé de moi...Mais je ne sais rien de toi excepté que tu t'appelles Eliaz, et que tu caches ton statut d'Alpha Suprême...
Elle avait raison. Alba m'avait dévoilé beaucoup de choses sur elle, même les plus traumatisantes. Dont la mort de ses parents. Et il en fallait du courage pour ça. J'étais pris dans un étau de contradictions entre mes pensées et ses paroles.
Alba n'avait pas l'air de s'en soucier.
Elle se leva de la table basse, sauta agilement sur la banquette et s'écroula sur mes jambes. Elle s'allongea littéralement sur moi, elle pesait son poids en muscle. Alba roula sur elle-même pour se mettre sur le dos et voir mon visage, puis replia ses pattes tel un bébé chat. Ses yeux étaient illuminés comme un enfant voulant le dernier jouet à la mode.
Des frissons, de la chaleur, des picotements.
Un léger sourire s'étira sur mon visage. Tentait-elle la méthode de l'attendrissement ? Pour connaître des choses sur moi ? C'était bien recherché, mignon, voire attendrissant, mais c'était trop tôt. Bien que j'éprouve étrangement une confiance absolue chez une personne que je ne connais que depuis quelques heures, je trouvais cela trop tôt, trop précipité. Ajouter à cela que je n'étais pas prêt. C'était trop long, dur et empli de souffrance. Je ne voulais pas qu'Alba ait conscience de mon passé plus que sombre. Je ne voulais pas qu'elle touche à mes blessures, pas pour moi, mais pour elle. Pour la protéger peut-être, elle avait déjà assez de traumatismes pesant sur elle. Pas la peine d'en rajouter. Mon sourire avait bien évidemment disparu.
A mon regard résigné, elle comprit que je ne dirais rien, ou du moins, pas maintenant. Elle me fit des yeux de louve battue. C'était étrangement, adorable, mais je n'allais pas revenir sur mes décisions.
- Le rôle de manipulatrice ne te sied pas, dis-je en posant ma main doucement sur son pelage, sans véritablement m'en rendre compte.
Je la caressais doucement, c'était encore plus doux. Je n'étais pas censé la toucher, mais j'en avais envie. Et puis, elle n'avait pas remis son camouflage en place. Elle ronronna, je sentais sa peau vibrer sous mes doigts. J'avais la même sensation d'apaisement. Ce simple geste me faisait oublier tous mes problèmes. Et puis ça n'avait apparemment pas l'air de lui disconvenir. Un vrai chat.
Peux-tu répondre au moins à une seule question ? Tenta-telle tout de même.
Elle-même n'avait pas l'air de trouver mon geste déplacé. Cela semblait presque naturel, que je la touche. En réalité, nous n'en avions pas vraiment conscience tous les deux. Ou plutôt, nous n'y prêtions pas attention.
Je stoppais ma main droite.
- Cela dépend, laquelle ?
Elle couina de frustration en sentant ma main s'arrêter. Je souris intérieurement et continua à la caresser doucement. J'avais l'impression de rejouer la scène de cet après-midi lorsqu'elle dormait. Sa réaction était aussi franche que ses pensées. On agissait comme si nous nous connaissions depuis des années. J'aimais cette ambiance d'entente, de compréhension et de sympathie qui s'était installée entre nous. En à peine quelques heures.
Fais-tu partis des six Alphas Suprêmes de France ?
Pourquoi lui cacher cela ?
- Oui.
Elle prit une grande respiration, soulevant légèrement ma main. C'est vrai que cette révélation signifiait beaucoup. Je n'étais pas comme elle, les Métamorphes étaient au courant de mon existence. Ils étaient censés m'obéir, me montrer respect et loyauté. Mais ce n'était pas le cas, étant donné que ça n'as jamais été ce que je voulais.
Elle hocha doucement la tête, celle-ci reposant sur mes cuisses. Alba devait sûrement assimiler la nouvelle. Mais je pense qu'elle s'en doutait.
Soudain une cloche sonna, me détachant complètement de ce moment serein dont, en réalité, j'avais bien besoin. La cloche du dîner commun. Il était vingt heures. Ce matin elle n'avait pas sonné pour le petit-déjeuner étant donné qu'elle avait été rangée.
Qu'est-ce ?
- La cloche pour manger.
Son ventre gargouilla à l'instant même. C'est vrai que cela faisait plusieurs heures que nous n'avions rien avalé.
Elle se leva prestement, se détachant de mes jambes, m'enlevant une douce chaleur. J'étais légèrement déçu, je ne sais pas trop pourquoi, mais de toute façon, j'avais faim moi aussi.
- Avant de sortir, remet ton camouflage. Il faut qu'il soit constamment activé.
Elle hocha la tête, se trouvant déjà près de la porte d'entrée. La présence de son énergie et de son odeur reflua d'un coup, laissant comme un vide dans mon camping-car. C'était presque dérangeant de ne plus sentir sa présence. Comme si elle avait disparue, alors qu'elle se trouvait juste en face de moi.
Une fois son camouflage exécuté, nous étions sortis du camping-car. Je l'avais fermé, rangeant la clé dans ma poche arrière et nous étions dirigés vers la cantine qui devait logiquement se trouver au milieu de l'installation de la meute Pacem. Quand plusieurs Meutes Nomades cohabitaient, le dernier arrivé mangeait toujours dans la cantine du premier, histoire de ne pas s'évertuer à installer une deuxième cantine. Les chefs collaboraient, mélangeant, se prêtant les ingrédients des deux meutes réunies. On agrandissait la place aux repas -déplaçant parfois les caravanes ou tentes- avec les bancs et tables de la dernière meute.
Mais avant même que nous atteignons la première tente, une chevelure blonde, presque blanche, couru vers nous. Oh non. Elle approchait.
- Voilà le monstre collant qui arrive, ne pus-je m'empêcher de dire.
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ALBA
ParanormalLa brise du vent, les rayons du soleil sur son pelage. L'odeur de la terre et des fougères. Les bruits des proies aux alentours. C'est le quotidien d'Alba, qui depuis dix hivers, vit dans une forêt sauvage des Pyrénées, sous sa forme de Métamorphe. ...