PDV ALBA :
Des souvenirs au goût acre me parvenaient. Ce n'était pas les miens, mais ceux d'Eliaz. Il y avait du flou, du vague, comme si son esprit avait voulu en effacer certains, en vain. Les scènes étaient pour certaines horribles, quand d'autres restaient à la limite du supportable.
J'avais en face de moi les visions d'une enfance et d'une adolescence désastreuse.
Des yeux bleus et glaçants me fixaient constamment, m'épiaient, m'effrayait. J'étais impuissante.
Non, IL était impuissant. Mais je l'étais tout autant, car j'étais lui.
Je ne voyais pas tout, n'analysais pas tout, certaines images partaient aussi vite qu'elles étaient venues, je ne connaissais toujours pas tout de lui. Seulement que des yeux bleus le faisait atrocement souffrir. Il avait dû commettre pas mal de choses qu'il regrettait amèrement.
Mais il n'était pas vraiment coupable, on l'avait obligé, par la souffrance, la punition, la sentence. Et parfois même, par l'empathie.
C'était affreux.
Les vagues translucides autour de son corps brillaient de mille-feux, s'éparpillant et créant un paysage cristallisé. Les vagues étaient violentes, il me regardait. J'étais en lui, et j'avais le sentiment qu'il était en moi.
Je n'arrivais pas à réfléchir, j'étais sous notre contrôle. Nous étions dirigés par nous-même, des entités mélangées qui n'en faisaient qu'à leurs tête. Mon esprit était flou, parsemé de mes souvenirs, de ses souvenirs, de nos émotions, sentiments. J'étais aveugle face à la réalité.
Nos rugissements dévastèrent le camp Pacem sans que je sache la raison de notre acte. Pourquoi faisions-nous ça ? Je ne sais pas, il me semblait qu'il le fallait. Je ne comprenais pas vraiment. Le chaos était aussi présent que nos pulsions. Un mélange des deux sûrement.
Puis le calme parvint jusqu'à nos oreilles jusque-là remplies d'un silence ponctué par le battement de nos cœurs.
Mon cerveau mis du temps à comprendre que le paysage lugubre qui se présentait devant moi, était ma création.
Ah. Qu'avais-je encore fait. J'étais perdue.
Je me sentais faible, terriblement faible. Le calme régnait, tout le monde tentait de reprendre ses esprits. Je restais là, stoïque, regardant en face de moi, sans expressions. Je savais pertinemment qu'Eliaz était comme moi. Nous étions un. Je ne comprends pas pourquoi.
Mes membres commencèrent à trembler, j'eu plusieurs crispations. Mon corps s'effondra dans un bruit sourd contre la terre molle. Je me sentais vide. Tellement vide. Etais-je encore consciente ? Ou n'étais-ce qu'une illusion ? Je ne sentais plus rien.
Mes yeux pouvaient voir Eliaz, toujours debout qui avait tourné la tête pour me voir. Je savais que mon regard était vitreux, le sien aussi. Il marcha difficilement jusqu'à moi, et dans un ultime effort, il tomba à mes côtés, pas vraiment silencieusement.
Ses longs poils noirs et soyeux me titillaient les narines. Bon, je semblais être toujours consciente même si je ne voyais pas plus loin que trois ou quatre mètres.
Son regard était plongé dans le mien, nous ne sentions rien, nous étions juste totalement étiolés, désarmé. Pourtant, je sentais que notre énergie était toujours là. C'était insensé.
Je lui transmettais mon incompréhension et ma fragilité, je ne sais pas trop comment. Nous arrivions à nous comprendre sans rien dire. Il était comme moi, perdu et désarmé. Je me contentais donc de respirer fortement en ne détachant pas mon regard du sien, j'avais peur de défaillir, lui de même. Nous étions chacun la corde à laquelle s'accrocher pour ne pas sombrer. Je sentais que nos corps voulaient dormir, partir loin, mais je m'y refusais, lui aussi. Je ne voulais pas dormir, je voulais comprendre, nous ne voulions pas défaillir face à la fatigue.
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ALBA
ParanormalLa brise du vent, les rayons du soleil sur son pelage. L'odeur de la terre et des fougères. Les bruits des proies aux alentours. C'est le quotidien d'Alba, qui depuis dix hivers, vit dans une forêt sauvage des Pyrénées, sous sa forme de Métamorphe. ...