Until you came along.

Chapitre 6

Le mot « stressé » était un euphémisme comparé à l'état dans lequel était réellement Alec. On était vendredi. Le jour de son rendez-vous avec Magnus. En ce moment même, il se trouvait dans sa chambre, incapable de réfléchir correctement. Il était déjà 18h et il avait convenu avec Magnus qu'il viendrait chercher ce dernier à 20h.

Assis en tailleur sur son lit, les yeux dans le vague, Alec se posait mille questions : comment allait être habillé Magnus ce soir ? Comment devait-il lui-même s'habiller ? Et s'il se rendait ridicule ? Et s'il ne trouvait aucun sujet de conversation durant le rendez-vous ? Bref, la tension était à son comble.

La porte de sa chambre s'ouvrit et Isabelle entra, sans prendre la peine de frapper. Alec, exaspéré et interrompu dans ses pensées, leva la tête vers elle.

- On ne t'a jamais dit de frapper avant d'entrer ?

- Et toi on ne t'a jamais dit que c'était mal de me cacher des choses ? rétorqua-t-elle.

Alec la regarda sans comprendre.

- Qu'est-ce que tu veux dire ?

- Arrête Alec. Je sais que tu as un rendez-vous avec Magnus ce soir.

Alec bondit de son lit, éberlué.

- Mais ... comment tu le sais ?

Soudain, il comprit.

- Magnus ... murmura-t-il.

- Et oui, c'est Magnus qui me l'a dit. Je pensais que le jour où tu aurais enfin un rendez-vous avec quelqu'un tu me l'aurais dit tout de suite ! Pourquoi ne m'as-tu rien dit ? Je suis tellement heureuse pour toi pourtant !

-  Mais ... ça ne te dérange pas ?

- Voyons Alec, de quoi tu parles ?

Elle s'était radouci. Elle comprit que si Alec ne lui avait rien dit, ce n'est pas parce qu'il n'avait pas confiance en elle. C'était parce qu'il n'avait pas confiance en lui-même.

Alec mit quelques secondes à répondre, comme s'il choisissait ses mots avec soin. Mais tout ce qu'il réussit à articuler fut :

- Et bien pour ... enfin tu sais.

- Alec je le savais depuis longtemps ! Et tu n'as aucune honte à avoir. Ce n'est pas une maladie d'être gay, c'est la société qui est complètement tarée ! Je veux juste que tu sois heureux. Et si Magnus s'avère être la bonne personne, c'est tout ce qui compte. Et surtout, envoie balader le reste de la planète !

Alec ne savait juste pas quoi dire. C'était la première fois qu'on lui disait de telles choses. La première fois qu'il parlait clairement et ouvertement de son homosexualité avec quelqu'un. Il n'avait jamais osé en parler avec ses parents, ni personne d'autre. Mais Izzy, c'était différent. Elle le comprenait vraiment. Comment avait-il pu douter d'elle ?

Il se leva et prit sa sœur dans ses bras. Il ne savait pas quoi faire d'autre. Il relâcha son étreinte et Isabelle le regarda en souriant.

- Tu sais, dit-elle, j'ai bien remarqué comment vous vous étiez bien entendu à ma soirée, toi et Magnus. Et malgré tout, je sais très bien que ce n'était pas que pour me rendre service que tu voulais m'accompagner tous les jours à l'université, ajoute-t-elle avec un clin d'œil.

Alec rougit légèrement. Soudain, Isabelle grimaça.

- Que se passe-t-il ? s'alarma Alec.

- Ne me dis pas que tu vas aller à ton rendez-vous habillé comme ça ???

Alec éclata de rire. Le problème était tellement mince comparé à ce quoi il s'était attendu. C'était bien le genre d'Isabelle de considérer les problèmes d'habits comme de réels problèmes. Mais Alec fut quand même obligé de reconnaitre qu'il n'était pas très bien « habillé ». Il portait un vieux jogging à trous et un tee-shirt noir. Pas vraiment la tenue idéale pour un premier rendez-vous.

- Bon, reprit-Isabelle. Heureusement que je suis là n'est-ce pas !

Et sans laisser le temps de lui répondre, elle courut presque jusqu'à l'armoire d'Alec pour lui trouver une tenue plus décente selon elle.

- Tiens, tu peux mettre ça ! Et ça ! Ainsi que ça !

Elle lui tendit une belle chemise blanche, un pantalon noir et des mocassins. Alec avait complètement oublié qu'il possédait ce genre de vêtement. Il prit cependant les vêtements au fur et à mesure qu'Isabelle lui donnait. Puis, elle eut l'air de réfléchir.

- Attends-moi deux petites secondes.

Elle sortit précipitamment de la chambre d'Alec et revint quelques minutes plus tard avec une veste noire. Elle la donna à Alec, fièrement.

- Je l'ai prise dans les affaires de Papa. Elle ira parfaitement avec la chemise, j'en suis sûre. Bon aller je te laisse te préparer !

Elle ressort une deuxième fois de la chambre pour laisser le temps de s'habiller. Avec un soupir, Alec enleva son tee-shirt et enfila la chemise. Il retira ensuite son jogging pour mettre le pantalon., Pour finir, il mit les chaussures et enfin la veste. Il se regarda vite fait dans le miroir et il fut obligé de reconnaitre qu'il n'était plutôt pas mal dans cette tenue. Cela le changeait complètement de ses vêtements habituels.

Il sortit de sa chambre et descendit prestement les marches de l'escalier. Il était à présent 19h30, il devait y aller. Il avait l'intention de partir de chez lui discrètement, mais au moment où il allait atteindre la porte, il entendit une exclamation derrière lui.

-       Waouh Alec !!!

Et mince. Bravo pour la discrétion Alec, pensa-t-il dans sa tête. Alec se retourna et vit sa mère, son père et Isabelle qui le regardait. On aurait dit que c'était la première fois que sa famille le voyait. En même temps, voir Alec en costume, ce n'était pas une chose habituelle.

Il eut un sourire gêné. Sa mère s'avança vers lui pour l'examiner et remettre le col de sa chemise en place.

- Où vas-tu comme ça Alec ?

Il n'y avait aucune colère dans sa voix. Juste une mère curieuse de savoir où son fils se rendait en étant si bien habillé.

- Je ... euh ...

- Il a un rendez-vous avec quelqu'un !!! s'exclama d'un coup Isabelle.

Alec la fusilla du regard.

- Isabelle ! rétorqua-t-il. Tais-toi !

Maryse, leur mère, ignora cette petite altercation et un sourire s'élargit sur son visage.

- Ah oui ? Et qui-est ce ? Quand est-ce que tu nous présentes ?

- Écoute Maman, je dois vraiment y aller. J'ai rendez-vous dans moins d'une demi-heure. À plus tard !

Et il s'en alla rapidement, sans attendre de réponse.

Une fois dehors, il prit une grande inspiration. Qu'est-ce qu'il détestait ce genre d'interrogatoire ... Et Izzy incapable de tenir sa langue ... Il espérait qu'elle ne parlerait pas de Magnus à ses parents, il ne savait pas quel serait leur réaction. Il avait peur qu'ils ne soient pas aussi compréhensifs qu'Isabelle.

Ayant finalement réussi à retrouver son calme, il se dirigea vers Brooklyn, là où demeurait Magnus.