Je ne pensais pas qu'un jour on se disputerait pour quelque chose d'aussi ridicule que des pâtes. Des pâtes. On s'est gueulé dessus pour des pâtes. Des fichues pâtes à la bolognaise. Je crois que j'aurais pu en rire, tellement c'était stupide, seulement ça fait une heure maintenant qu'il ne me répond pas. J'ai passé tout le trajet en voiture à ruminer et à le traiter d'idiot dans ma tête, mais une fois rentré sur le campus, quand j'ai réellement réalisé le ridicule de la scène, ma colère s'est complètement envolée. J'ai immédiatement essayé de l'appeler parce que je n'avais pas envie qu'on reste fâchés pour une connerie comme ça, mais aucune réponse. Ni à mes appels, ni à mes SMS, pas même aux mails sur le site de discussion et là je commence vraiment à m'inquiéter.
"Allez réponds..."
Messagerie encore une fois. Je dois en être à mon quinzième appel et plus je tombe sur son répondeur plus j'angoisse. Je réessaie encore une fois. Toujours aucune réponse. Plus les secondes passent et plus j'ai le sentiment que quelque chose ne va pas, comme si je le sentais au fond de moi, j'en ai une boule dans l'estomac. Je rappelle encore.
"Allez Harry décroche..."
Je me ronge les ongles à chaque sonnerie.
"Réponds bébé... s'il te plaît.
- Vous êtes bien sur la messagerie du 07..."
Ok. Mon portable toujours à la main je me jette sur mes clefs de voiture et en moins de cinq minutes je suis déjà derrière mon volant. Je roule vite et cette fois je me fous des limitations de vitesse. Quelque chose ne va pas, je le sais, je le sens. Plus je me rapproche de chez lui, plus ce mauvais pressentiment augmente et plus j'ai mal au ventre.
Je ne prends même pas le temps de couper le contact ou fermer la portière quand je me gare à côté de son 4x4. Je cours dans le vieil escalier en pierre, j'ouvre la baie vitrée et je m'arrête à l'entrée de la chambre. Tout est anormal. Rien ne va. Ça pue l'alcool. J'entends les gémissements de Connard depuis le dressing, il ne l'enferme jamais dedans, pas sans raison. Mon cœur se met à battre à toute vitesse, j'avance le corps tremblant. Mon pied frappe dans une bouteille de vodka à moitié vide, je la regarde rouler jusque sous le bureau. J'avance encore et quand je tourne la tête, mon cœur cesse de battre, il est là. Son corps est là, il est étendu par terre. Il y a du sang partout, il coule de ses poignets, une énorme tache rouge se dessine sur le tapis. Je crois que je pousse un cri. Je ne sais pas. Je ne sais rien. Tout s'effondre en moi. Je ne réalise plus rien. Plus rien ne me semble réel. Je me jette sur lui.
"Harry !"
Je le secoue de toutes mes forces. Je hurle, je pleure. Il ne réagit pas. Je n'ai même pas conscience de sortir mon téléphone de ma poche et d'appeler les pompiers, j'entends ma voix comme un écho lointain quand je donne son adresse. Je le secoue à nouveau.
"Harry !"
Les larmes me brouillent la vue. Je pose sa tête sur mes genoux, je colle mon visage au sien, je tiens l'un de ses poignets comme si je pouvais empêcher le sang de couler. Je pleure, je le supplie de ne pas me quitter. Je le serre contre moi. Je suis dans un cauchemar. Je vous en supplie, ne me l'enlevez pas, ne me l'enlevez pas, ne me l'enlevez pas.
"Harry."
Ma voix se brise, elle n'est que détresse et désespoir. Ce n'est pas possible, tout ça ne peut pas être réel. Je recommence à le secouer.
"Réveille-toi ! Allez réveille-toi ! T'as pas le droit de me laisser ! T'as pas le droit, t'entends ?!"
Je crie, je lui hurle dessus. Je prie même le ciel, mais il ne m'entend pas. Il ne bouge pas.
"Éloignez-le !"
Je n'ai même pas entendu les pompiers arriver. Je sens qu'on me tire en arrière, mais je ne veux pas le lâcher, je me mets à me débattre et à hurler encore plus fort. "Non... Non. NON ! Lâchez-moi... Harry !" Je l'appelle avec détresse, mais il ne se relève pas, il ne vient pas me délivrer. On me maintient au sol contre le lit. "Calme-toi, tout va bien. On s'occupe de lui." Je ne vois presque rien tellement je pleure, mais je distingue plein d'hommes autour de lui et c'est en voulant repousser celui qui me tient, que je vois le sang sur mes mains et je commence à paniquer. "Du sang... j'ai du sang... sur moi, j'ai du sang sur moi." Ma voix tremble. Je m'agite, j'essuie mes mains sur mon pull mais mes vêtements sont pleins de sang eux aussi, j'en ai sur mon visage, dans mes cheveux. Partout. J'ai du sang partout sur moi. Son sang. J'ai son sang partout sur moi. Son sang, sur moi, son sang.
"Respire. Calme-toi. Respire.
- Son sang... j'ai... du sang, j'ai du sang partout !"
Je ne peux pas me calmer, j'ai du sang sur moi. Je ne respire plus, ça va pas. Je ne me sens pas bien. Ça va pas. J'essaie encore une fois de repousser l'homme qui me tient, mais je n'ai pas de force. Du sang... il y a trop de sang, je n'ai jamais supporté la vue du sang. Son sang. J'ai son sang sur moi. Je manque d'air. Ça va pas. J'ai la tête qui tourne. J'entends un autre homme crier qu'il faut un masque à oxygène, mais j'en veux pas, je veux pas...
"Harry !"
Du sang, il y en a trop. On me pose le masque sur le visage, on me force à rester assis. "Respire." Je respire et je me sens partir.
"Harry..."
Je vois l'homme devant moi qui tend une seringue à un autre homme, je crois qu'il m'a piqué avec. J'essaie de parler, mais je n'y arrive pas, je suis sur le point de m'évanouir. Je sens qu'on m'allonge, je m'en rends compte, car je vois le plafond. Je ne veux pas m'endormir, je ne veux pas partir, je ne veux pas laisser Harry. Je le cherche des yeux. Un des hommes autour de lui s'écarte et même si ma vision est de plus en plus floue, je crois que je le vois. Il a un masque à oxygène sur le visage lui aussi. Harry... Je lutte. J'essaie de tendre le bras pour le toucher. Tout se met à tourner autour de moi, j'entends des voix, mais tout se mélange. Les pompiers s'agitent autour de lui.
"Le pouls est faible. Le brancard, vite !"
Des pieds passent devant moi, je vois son corps être soulevé, puis plus rien. Le noir complet. Je m'évanouis.
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DEGRADATION Tome III
FanfictionAprès tout ce temps, voici enfin le dernier tome de l'histoire. J'espère que vous l'aimerez autant que j'ai aimé l'écrire. Bonne lecture. ♡ RÉSUMÉ Quand on vit différent, on meurt différent. Si on cherche sur Internet la définition de l'Amour, on...