Chapitre huit

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« ... » - Harry

Je n'ai pas dormi de la nuit, j'en étais incapable tellement j'angoissais. J'angoisse toujours. Je sais que j'ai dit au médecin qu'il y aurait une amélioration, car j'ai confiance en Harry mais... je ne sais pas. J'ai passé ma nuit à tenter de m'en convaincre, mais en réalité ce n'est pas vrai, je n'ai pas confiance en lui, il a voulu mourir. Comment je pourrais avoir confiance en lui après ça ? Il a tenté de se suicider, pas pour de faux. Pour de vrai. Il a pris un scalpel et il s'est tranché les veines. Il l'a fait, il l'a réellement fait... alors comment je peux croire ou même ne serait-ce que penser qu'il y aura une amélioration. J'ai une boule qui me broie l'estomac tellement fort qu'elle me fait mal.

Je regarde ma montre. 9h45. Je devrais être avec lui depuis quinze minutes déjà, mais je suis toujours dans ma voiture, incapable de bouger tellement j'ai peur. J'ai peur de le voir, j'ai peur de l'état dans lequel je vais le trouver, j'ai peur qu'il ne veuille pas de ma visite, j'ai peur qu'il me rejette. J'ai peur de tout mais je ne peux pas ne pas y aller, c'est la seule chance que m'a donnée le médecin, je me suis battu pour l'avoir et je ne veux pas la gâcher. Je me répète les mots du coach dans ma tête pour me donner du courage : Harry mérite qu'on se batte pour lui. Je vérifie pour la trentième fois depuis que je suis parti de chez lui que j'ai bien le petit carnet noir que j'ai acheté hier dans la poche de ma veste. Il y est.

Il est presque 10h quand je me présente à l'accueil. Pour la première fois elle ne me dit pas non, après tout ce temps c'est comme une délivrance. Elle me donne un badge visiteur.

"Il est dans la chambre 317, au troisième étage."

317. Je connais enfin le numéro de sa chambre, ce n'est qu'un détail, mais avant aujourd'hui je ne le savais pas. Je passais toutes mes journées ici sans même savoir où il se trouvait exactement. Je me dirige vers les doubles-portes vitrées, de sa place elle les ouvre en actionnant le bouton qui est sous son bureau. Je m'apprête à m'y engouffrer, quand elle me dit dans un sourire d'encouragement : "Ça va bien se passer." Je la remercie d'un hochement de tête avant de disparaître de sa vue. J'aimerais en être aussi convaincu qu'elle. Contrairement à la veille, cette fois je prends l'ascenseur et j'ai le reflex stupide de me recoiffer dans le miroir pendant qu'il monte. Je veux être beau pour lui. Arrivé au troisième étage, je cherche sa chambre quand je la trouve je souffle longuement pour me donner du courage en murmurant pour moi-même : "Ça va bien se passer, tu as confiance en lui." Parce que malgré tout ce que j'ai pu dire ou penser, au fond de moi j'ai confiance en lui, je crois en lui.

Je frappe à la porte. Aucune réponse. J'attends, mais rien ne vient, je n'entends pas même un mouvement à l'intérieur. J'ouvre doucement, je rentre avant de refermer derrière moi. Il est allongé sur le lit, le visage tourné vers la fenêtre.

"Hey..."

Il ne bouge pas, il ne me répond pas. J'ai mal au ventre. Je regarde la chambre qui m'entoure, elle est grande, blanche, aseptisée. Je ne sais pas réellement à quoi je m'attendais, mais elle ressemble à une chambre d'hôpital classique, pas à une chambre d'un hôpital psychiatrique, à la différence près qu'il y a des barreaux aux fenêtres. Mais sinon il y a tout ce qu'il y a dans une chambre normale, un lit, un fauteuil, une chaise, une armoire, une table, une table roulante, une porte qui donne sûrement accès  à une salle de bain. Il y a même une télévision accrochée au mur, je remarque qu'elle est débranchée. Je reporte mon attention sur lui, je ne vois que son profil. Je regarde tous les fils auxquels il est branché, je remonte jusqu'au moniteur et à la perfusion qui s'écoule lentement, je me demande si c'est avec ça qu'ils le nourrissent... J'ai essayé d'ignorer les bandages qui entourent ses poignets mais c'est impossible. Ils sont là et ils sont douloureux à voir, ils remontent jusqu'à ses coudes. Je contourne le lit, je m'assois sur le bord au niveau de ses cuisses et je répète une nouvelle fois :

DEGRADATION Tome IIIOù les histoires vivent. Découvrez maintenant