Troisième Mouvement

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Bom, bom, bom.

Noir. Tout est noir. Une douleur aiguë me vrille le crâne et un éclair de lumière passe sous mes paupières closes.

J'ouvre les yeux d'un coup. Le blanc de la pièce m'éblouit. C'est horrible. Mon crâne me lance et j'ai la bouche sèche, j'ai l'impression d'avoir épuisé toutes mes réserves de salive.

Bom-bom, bom-bom.

Je sens mon cœur cogner au fond de ma gorge, comme s'il allait remonter jusqu'à ma bouche. J'ai rarement eu aussi mal à la tête.

Je mets quelques secondes à me rendre compte que je ne suis pas chez moi, dans ma chambre, mais dans une pièce blanche. Je dois être à l'hôpital.

Ou pas...

Le lit blanc sur lequel je suis allongée est moins dur que là-bas et la pièce ne pue pas le détergent aussi fort que dans un hôpital. Les murs, quoique blancs, me semblent un peu délavés. Je dois être...

— Ah, tu es réveillée.

Oh non.

Je suis à l'infirmerie. Je hais l'infirmerie. Cet endroit est atroce.

— Il serait temps. Ça fait deux heures que tu es endormie, m'annonce l'infirmière d'un ton acerbe.

Ses mots résonnent bizarrement dans ma tête, comme un écho. Elle possède une voix nasillarde et aigre. Je la hais celle-là. Toujours propre, droite, la blouse blanche bien repassée, et les cheveux bruns serrés en un chignon tendu à s'en faire mal. Je n'ai jamais compris comment elle pouvait tenir autant de temps avec une chose de ce genre sur la tête sans avoir mal au crâne. Sa coiffure me donne envie de me gratter le cuir chevelu.

Elle approche son visage du mien, et commence à me parler d'une voix dure, énervée.

— Tu as fait une syncope. Je ne comprends pas comment tu peux avoir le droit de venir au lycée dans ces conditions. C'est une chance que j'ai connaissance de tes... antécédents !

Elle marque un temps d'arrêt et pousse un soupir avant de reprendre plus doucement.

— C'est bien que ce soit arrivé ici, au lycée dans un endroit où il y a une infirmerie qui possède tout ce qu'il faut pour te soigner. On a donc pu éviter de te conduire aux urgences.

Quelle chance.

— Quand pourrais-je rentrer ? demandé-je dans un murmure.

L'infirmière m'ignore superbement et continue son monologue.

— Tu aurais pu te faire très mal en tombant, tu sais. D'ailleurs, tu as frôlé la commotion cérébrale ! Ta tête a tapé contre le mur vraiment très fort. Tu aurais pu en garder des séquelles !

Je vois. D'où le mal de tête. Je sens que les prochaines heures vont être réjouissantes...

— Je peux rentrer chez moi, s'il vous plait ?

Je commence à être lassée de ce discours monotone et plus que barbant. En plus, ma tête me lance atrocement. Je décide donc de ne pas répondre à ses remarques.

— Tu n'as pas ressenti de signes avant-coureurs ? Tu as dû avoir le vertige, la nausée...

Oui, mais je m'en fichais. Ce genre d'incidents s'est très peu produit, ici, au lycée. Je ne voulais pas y croire, c'est tout. Je ne voulais pas que quelque chose arrive ici, tout simplement.

Devant mon silence obstiné, l'infirmière pousse un énième soupire avant d'annoncer :

— Quelle chance qu'il ait été là. Il t'a sauvée, en quelque sorte.

CerbèreOù les histoires vivent. Découvrez maintenant