CHAPITRE 17

14.4K 1.5K 89
                                    







Il était trois heures trente du matin, et la petite maison était enveloppée par la douceur de la nuit. Les chiens ayant senti que leur maîtresse allait mal, étaient couchés le museau dirigé vers la porte attendant patiemment le moment où ils seraient invités dans la chambre.

Nathanaël quant à lui, venait comme à son habitude de s'endormir, quand un cri strident et aiguë déchira le voile de calme. Brusquement, il se redressa sur son séant. De ses yeux aveugle, il balaya sa chambre du regard sans rien voir si ce n'est le noir complet. Il resta là quelques secondes à scruter le vide, puis il voulut se recoucher, quand le cri se fit de nouveau entendre, ainsi que les gémissements des chiens. Instinctivement, il prit le pistolet qu'il gardait toujours près de lui, et quitta son lit puis sa chambre. Les bruits que faisaient les animaux l'indiquait la source du cri. Connaissant la maison comme sa poche, il atteignit facilement la porte d'Ada, mais quand il tourna la poignée, il trouva que celle-ci était verrouillée.

- Restez-là. Ordonna t'il aux animaux avant de défoncer sans grande difficulté la porte en bois, pour enfin pénétrer dans la chambre à l'odeur féminine. Il l'entendait crier et ne savait pas ce qui se passait. C'est dans ces moments qu'il détestait plus que tout son nouvel état. Être aveugle était la pire chose qui pouvait arriver à un homme comme lui. Il était tellement vulnérable. Arrêté sur le pas de la porte, il écouta afin de s'assurer qu'il n'y avait pas d'étrangers dans la pièce.

- Non, ne me touchez-pas ! Hurla Ada en gigotant vivement sur son lit.
Nathanaël comprit grâce à la réaction presque passive des animaux qu'il n'y avait pas de réel danger. Il s'agissait juste d'un simple cauchemar. En colère, il secoua la tête en grognant d'exaspération, puis quitta la pièce, énervé d'avoir été réveillé pour ça. Mais à peine qu'il eût mis pieds en dehors de la chambre, qu'il l'entendit, on aurait dit un ange qui murmurait par-dessus son épaule. L’appel de la sirène…

- Nathanaël... Nathanaël je t'en supplie...aide moi. Supplia Ada d'une voix douce, toujours en proie à son cauchemar.

Durant sa vie, Nathanaël avait entendu ce refrain un bon million de fois. Il reconnaissait ce ton que les faibles, et les lâches utilisaient pour quémander son pardon ou son aide. Et au grand jamais il n'avait été suffisamment touché pour lever le petit doigt, cependant, à cet instant précis, il n'arrivait pas à faire comme d'habitude. Il savait que c'était juste un vulgaire cauchemar, et qu'elle allait tôt ou tard se réveiller. Mais, en lui naissait un côté protecteur qu'il ne se connaissait pas. Les petits gémissements des canidés se mêlaient à ceux de leur maîtresse, et tous ces bruits l'agaçaient. Il trouva donc là, une raison de faire ce qu’il fit.

Contre sa réelle volonté, Nathanaël répondit à ce besoin de la protéger. Il fit demi-tour, et marcha guidé par le doux son de la voix d'Ada. Depuis sa nouvelle cécité, son ouïe s'était développé d'une manière qu'il n'aurait pas cru, et cette voix était pour lui plus visible que s’il avait eu ses yeux. Il s'énerva en jurant quand il faillit tomber en s'emmêlant les pieds dans les draps d'Ada qui gisaient sur le sol. Arrivé près d'elle, il posa un genou sur le lit, et à tâtons, il rechercha la jeune femme. Sa grande main se posa sur l'épaule dénudé d'Ada, et il la sentit frémir de peur avant de crier.

- Lâchez-moi. Je vous en supplie ne me faites pas de mal.

Sans aucune dose de douceur, il la secoua comme un pommier, en la faisant gémir de douleur, sans toutefois fois réussir à la réveiller, et Ada continua à se défendre. Elle lui asséna une gifle avant de le griffer à plusieurs reprises. Il fulmina d'énervement. Beaucoup étaient déjà morts pour avoir fait moins que ça. Et en dépit de cette farouche résistance, il ne pouvait se résoudre à la laisser dans sa prison psychologique.

À L'ombre D'un RegardOù les histoires vivent. Découvrez maintenant