Les âmes éternelles

La porteuse de lumière -4-

Dans notre petit village, il n'y a pas grand-chose qui se passe. Je veux dire, il y a de très grandes villes où les événements sont plus souvent mouvementés, mais chez nous, c'est calme. L'été les locaux mangent dans leur jardin et discutent de tout et de rien et nous les jeunes nous nous retrouvons sur la place à chahuter. Mais ce que nous aimons le plus c'est nous assoir sur les rochers qui bordent la plage, bien souvent quelqu'un prend une guitare et nous chantons. Mais l'hiver tout est calme, rien ne bouge, le village se fige et la vie passe paisiblement.

Dans la pâle lumière du matin, la plage est déserte étant donné que tout le monde se réveille à peine. En période estivale et plus tard dans la journée, on verrait des groupes de jeunes gens venir s'installer et passer un bon moment ensemble. Certains jours je fais partie de ces groupes. Anna, Stan et moi occupons un rocher. Aujourd'hui c'est différent, je suis plongée dans un tumulte de sentiments étranges, je me sens confuse, je me suis réfugiée dans cet endroit calme pour réfléchir à ce qu'il s'est passé hier.

Anna me harcèle de messages, je lui ai dit de ne pas venir me chercher, je ne me sentais pas d'aller à l'école. Je flâne le long de la digue avec le froid qui me mord les joues et je pense à toutes ces choses inquiétantes qui me tombent dessus.

Je ne comprends plus rien, maman n'a rien voulu me dire, elle a été présente, m'a rassurée, m'a calmée mais elle a agi curieusement. Elle a fait comme si tout ceci n'était pas arrivé, mais bon sang, je ne touchais plus le sol, c'est normal ça ?

Et mes sentiments, ce qui s'est décuplé en moi, cette impression de tristesse jusqu'à l'overdose, c'était quoi ? Qu'est-ce que je suis, qu'est-ce qu'il m'arrive ?

Il faut que je trouve ! Si maman ne veut pas parler, je trouverai seule. Il me faut quelqu'un pour me renseigner quelqu'un en qui je pourrais avoir confiance, et je...

- Hey, Gabrielle c'est ça ?

Je me retourne, Mattys est là, il me surplombe de toute sa grandeur, il est beau et semble décontracté. Ce mec vient et se comporte de façon amicale alors qu'on ne se connait pas, et moi je reste muette comme une idiote.

- heu oui c'est ça, mais appelle-moi Gabe. Tu n'es pas à l'école ?

- Je pourrais te retourner la même question !

Il dit ça, et j'aime déjà sa façon d'arquer un seul sourcil, mais ses yeux sont rieurs.

- Touché !

Il s'approche de moi, et s'installe sur le rocher opposé au mien, son comportement semble normal, mais je sens une barrière entre nous, il reste froid et distant. Nous nous retrouvons là, devant l'immensité de la mer Méditerranée avec ses vagues qui nous jettent leur liberté au visage. C'est magnifique.

- Alors dis-moi, Gabe, que fais-tu toute seule ici ?

- Bien des choses, je pense et je ressasse, rien de bien concret.

- ha je vois, la routine adolescente sur le chemin à prendre dans la vie ?

- ouah, quel discernement, mais non ou si, mais de toute façon je ne veux pas en parler !

Oui, là, pour l'instant, je ne voulais plus y penser, je voulais apprendre à connaître ce garçon, qui pour une raison ou une autre a déclenché toutes ces émotions. Le savait-il? Avait-il remarqué mon trouble?

- D'accord. Que dirais-tu si je t'emmenais voir quelques petites choses, histoire de te changer les idées? Tu sais je suis natif d'ici, Alliste est charmant avec ses chapelles et ses petites bicoques villageoises mais j'ai un endroit plus prestigieux que j'aimerais que tu voies. Et disons qu'aujourd'hui est une journée non raisonnable.