Les âmes éternelles

La prophétie - 6-

Nous y étions, la veille de mes 18 ans. Et avec ça, toutes ces merdes ! Une porteuse de la lumière moi ! J'en étais encore sous le choc... Et puis c'était quoi une porteuse de lumière ? C'était quoi cette histoire avec les anges ? Et mes parents ceux que j'avais chéris et aimés depuis le début n'étaient pas mes parents, je n'étais pas leur fille. 

La tristesse avait envahi mon cœur, et le ciel en réponse se couvrait, encore une réaction à cette foutue prophétie, je regarde au travers de la fenêtre, le ciel fait peine à voir tellement il semble sombre.

- Une porteuse de lumière, mais qu'attendez-vous de moi, bon sang !

Les bras levés en signe de contestation, la réponse n'est pas venue de là où je l'espérais.

- Je ne crois pas qu'Ils aimeraient t'entendre jurer comme ça !

Maman, enfin Vivianne, était dans mon dos, elle m'a sans doute vue tourner en rond pendant que je ruminais.

- Ils ? Les Archanges ? Pourquoi ? Avec les larmes qui commencent à déborder de mes yeux, c'est tout ce que je pouvais dire. Mais elle a compris.

- Nous n'avions pas le choix, nous n'habitions pas ici avant, c'est là-bas qu'elle nous a retrouvés, en Belgique, à Charleroi. Nous savions que notre fils était un garçon choisi pour avoir un rôle dans la prophétie mais à l'époque nous ne savions pas lequel, sa bouche se tord dans moue attristée.

- Y a-t-il quelque chose que je dois savoir sur ce fils ?

- Non pas tout de suite, maintenant il est temps que tu comprennes ta mission, quand tu seras passée par la salle de bain descends, une partie des Envoyés du Ciel sont là.

Une partie des Envoyés du Ciel? Combien sont-ils? Qui sont-ils?

Autant de questions qui passent dans ma tête. Je fais ce que maman me dit de faire, mais plutôt par automatisme, je ne sais plus à quoi penser, ni par quoi commencer.

Je repense à ce que mon moi d'autrefois a créé et je la revois, Zéphyrine, sa chevelure rousse cascadant dans son dos, ses pieds et ses mains liés à la potence qui trône au milieu du bucher, je la revois crier à tous que bientôt l'injustice tombera sur leur tête ! J'étais elle et elle était moi, elle était ma vie passée et j'étais son tremplin pour sa vie présente. Je ne voulais pas de ça, je ne voulais pas prendre part au combat, réparer les erreurs d'une autre moi. Pour un amour perdu, pour l'injustice subie ou pour l'insolence qu'elle avait osé avoir. Je voulais ma vie bien paisible d'étudiante de terminale et basta, rien d'autre.

C'est les pieds lourd que je descends les marches qui mènent à la cuisine, tout le monde est là, Anna et Stan, d'ailleurs que faisaient-ils ici? Après tout, j'avais deviné qu'ils avaient un lien avec toute l'affaire. Vivianne m'avait prévenue que ce matin je rencontrerais une partie des personnes liées à cette prophétie.

A table se trouve donc Anna, Stan, bien entendu maman et papa et un homme, son visage m'est inconnu et à la façon dont il essuie son front perlant de sueur je comprends de suite qu'il n'est pas d'ici. Il fait à peine douze degrés ce n'est pas chaud. Son embonpoint doit lui faire du tort. Sa mine grise coordonnée avec ses cheveux poivre et sel finit par confirmer mes doutes. Les gens du coin, même à cette époque de l'année ont des visages rayonnants.

Papa ou Thomas, je ne sais plus, me fait signe de m'assoir, je redresse un sourcil, je ne suis pas calme, je ne vois pas l'intérêt de m'assoir si c'est pour me ronger les ongles autant faire les cent pas. Je lui fais un signe négatif de la tête.

- Bonjour Gabrielle, me dit l'homme, je suis Alexander Ripplebrouwn, je suis l'un des conseillés du Haut Siège, je suis là pour t'apprendre les grandes lignes, sur le rôle que tu as à jouer.

En voilà un qui met les pieds dans le plat, enfin !

-bonjour, ma voix est fine et basse, je m'interroge, le Haut Siège, ça ne me dit rien.

- Tu connais déjà Anna et Stan, ils sont eux aussi des Envoyés du ciel. 

Je les regarde, ils n'ont pas bougé, la dernière fois que je les ai vus Stan était anéanti par ce qu'il avait voulu me faire savoir, me faire découvrir des images du passé, de malheureux souvenirs qui nous appartenaient à tous les deux. C'est vrai que ça m'avait bien aidé et grâce à Mattys j'avais pu mettre tout en relation et comprendre qui j'étais et pourquoi j'avais ces rêves souvenirs. Quant à Anna, elle m'avait ignoré, sauf hier où elle était venue aux nouvelles, enfin venue, plutôt en avait prises, sans doute savait-elle ce qui était réellement arrivé.

- Ho, alors les distances... les devoirs à faire en binôme... c'était pour...

- Pour te préserver ma douce, Anna rétablit le contact.

- Oui, pour me préserver !

Evidemment on me cache à quoi je suis destinée pendant dix-huit ans mais ne rien me dire consiste à me préserver. Mais soyons réaliste, je vais tout apprendre aujourd'hui et comme me l'a dit ma mère biologique dans la lettre je dois leur faire confiance. Je ne veux pas qu'il y ait un malaise entre nous, je prends une chaise entre eux et dans un geste d'affection je leur attrape la main, ainsi je leur pardonne. L'absence d'Anna, les souvenirs redoutables de Stan, tout ça je ne veux plus y penser, aller de l'avant voilà une pensée bien plus positive.

Je leur fais un sourire rassurant, c'est à ce moment que je constate qu'Anna est vêtue d'une robe en laine d'un bleu pareil à un ciel d'été, je lève les yeux d'un air qui signifie "ça te ressemble pas", elle ne comprend pas tout de suite, je sais qu'elle va y parvenir, notre lien est inébranlable, je sais que nous avons toujours notre connexion. Des plis se forment sur son front, elle réfléchit et puis :

- Ca y est, elle les voit !