Je regarde la lettre posée là juste à côté de ma main. Habituellement la curiosité est une caractéristique qui me colle à la peau, mais je n'ai ni la force ni le courage de soulever ma main. Je sens Mystique remonter sur le lit et se coucher auprès de moi cachant à ma vue la lettre que maman vient de poser sur le lit. Dans un regard silencieux, il me fait comprendre que j'ai encore le temps. Et au fond je sais que quand mes doigts toucheront cette lettre tout aura déjà changé.
- Oui le chat tu as raison, c'est pour tout à l'heure !
C'est bercée dans les ronronnements de Mystique, que je replonge à nouveau dans des souvenirs d'une autre vie.
- tu n'as pas honte la vilaine.
- oui, sorcière, se faire engrosser par le diable.
- honte à toi sorcière.
Des cris lointains parvenaient à mes oreilles, mais je n'en avais cure. J'étais en larmes, je rentrais chez moi. La relation que Teo et moi entretenions était finie, il était promis à une autre et il avait fallu que le destin nous unisse et crée une version de lui et de moi.
Ce soir-là, alors que je longeais le chemin qui me ramenait à la maison, je pensais au jour où il me l'avait annoncé. C'était pile poil le jour où j'avais découvert ma grossesse. Je n'avais malheureusement pas pu lui dire. Soudain j'entends les cris se rapprocher de moi.
- Abats les sorcières.
- Tuez-la ! Elle va engendrer l'enfant du diable.
"Sûrement une autre pauvre femme accusée à tort de manigancer avec le malin", c'est ce que j'ai pensé sauf que devant la porte de la maison se tenait Teobaldo.
- ho mon Dieu Teo... qu'est-ce que tu fais ici... et pour...
Sans un mot il prit ma besace et nous somme passés par le jardin puis nous sommes sortis du village.
- Pourquoi fuyons-nous ?
- Tu ne les entends pas, Zéphyrine, ils sont là pour toi.
- Ho, c'est tout ce que j'ai pu dire et d'instinct j'ai posé la main sur mon ventre pour protéger mon trésor.
Alors je l'ai suivi, il savait de qui était cet enfant, il savait tout depuis le début de l'histoire, car il en était le premier protagoniste. Nous marchions avec les villageois à nos trousses, mais j'étais fatiguée, je me sentais lourde et vide.
On s'arrêta un moment, où sur un rondin je posais mes fesses. Mes jambes tiraient, Teobaldo faisait de son mieux, pour me soulager, mais rien n'y faisait quand soudain ils nous retrouvèrent.
- Elle est là, Sir Teobaldo est avec elle.
- Sir ? Que veulent-ils dire ?
- Ecoute Zéphyrine, cours ne te retourne pas cours le plus vite que tu peux surtout ne t'arrête pas.
- Non, non pas sans toi, viens avec moi...
- tu sais que je ne peux pas s'ils te découvrent tu es fichue, je ne peux pas vivre sans avoir essayé de te sauver.
-Teo, s'il te plait, sois réaliste que vas-tu faire contre une masse de villageois armée de fourches ? Viens avec moi.
- Zéphyrine s'il te plait, ils ne me toucheront pas. On se retrouvera je te le promets. Si tu ne le fais pas pour nous, fais le pour lui .Il désigna mon ventre du doigt. Je suis désolé de t'avoir entrainé dans cette sinistre histoire Zéphy, là où tu vas, pardonne-moi.
Je n'ai pas tout compris, mais je l'ai écouté, avec l'espoir qu'il ne renoncerait pas à moi, alors j'ai couru.
-ha ha je te tiens sale sorcière.
Trou noir, puis d'autres images se succèdent à celle-ci.
- Zéphyrine De Lagrange vous êtes accusée d'avoir procréé avec le diable contestez-vous vos actes ?
- Oui !
- Dans ce cas, où se trouve le père ?
Je regardais autour de moi, Teobaldo ne se trouvait pas dans la salle, ce jour-là, c'est avec amertume que j'appris que les promesses n'étaient que des mots.
- je ne sais pas.
- Zéphyrine Delagrange vous êtes condamnée au bûcher sur le champ.
Le bourreau me tira par les cordages d'un geste brusque. Plus loin sur la place, le bucher était prêt. J'y fus mise. Lorsque je relevais le regard, je vis la jeune fille qui était promise à Teobaldo. La jolie Annabella me regardait avec les larmes aux yeux et d'un signe négatif de sa part je compris que mon bien-aimé m'avait tourné le dos. Puis je vis son regard descendre et se poser sur mon ventre arrondi, une bille humide roula sur sa joue. Son regard criait pour elle. Tant de méprise, pour une histoire d'amour impossible et salie par le mensonge. Alors comme l'effrontée que j'étais je relevais la tête, haute, fière et forte. Je me détournais du ciel.
- " Un jour je reviendrai ! Un jour les larmes, la peine envahiront vos maisons, la paix et la douceur que j'apportais ne seront plus, au lieu de ça : pauvreté, guerre, famine s'étendront au-delà de nos frontières. Un seul être aurait pu rétablir la lumière et vous le tuez, donc préparez-vous gentils gens, les ténèbres arrivent à grands pas. Vos cœurs seront noircis par la haine, comme le mien l'a été par des injections de mensonges . Aujourd'hui je me détourne de la lumière, je ne parle plus en son nom mais en mon nom, et quand je reviendrai, plus aucune source d'amour ne viendra fleurir vos âmes. Je suis Zéphyrine Delagrange la sorcière que vous, vous seuls, avez créée. Méfiez-vous du jour où je reviendrais ici ou ailleurs. Ce jour sonnera la fin de vos vies.
Je souris au ciel et le feu s'alluma.
- Haaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaa
Je m'essuie le front, je viens d'affronter une mort d'une cruauté épouvantable. Le feu léchait mon corps de ses flammes rampantes et sournoises, la chaleur semble m'étouffer encore, alors que je suis assise dans mon lit. Dans un réflexe un peu idiot je me tâte le corps, jambes, bras, torse et je sens mon cœur battre à une vitesse folle. Ressaisie je me rends compte de ce que j'ai prédit à tous ces gens. Leur dire que je reviendrais pour leur faire du mal, je savais que j'étais elle, mais je n'aurais pas fait... non... je n'ai pas le fond méchant, enfin je ne crois pas. Quelque chose me chatouille la main je regarde ce que c'est.
Là, assis à la même place qu'un peu plus tôt, Mystique me regarde en faisant sa toilette, puis de façon dédaigneuse, il me fait comprendre, en dévoilant un morceau de papier, qu'il est temps pour moi d'ouvrir l'enveloppe et de lire ce qu'elle contient. Trop retournée pour m'allonger, trop peur pour laisser mes souvenirs refaire surface, je prends délicatement la lettre entre mes doigts et
J'ouvre ce pli, ce que jamais je n'aurais dû faire,
Je lis cette lettre, ce que jamais je n'aurais dû faire,
Et je comprends ce que cela implique.
Moi Gabrielle Zéphyrine Delagrange, à l'aube de mon 18e anniversaire, je comprends qu'à partir de ce jour, ma vie va considérablement changer. Et ça je n'aurais jamais dû le comprendre.
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Les âmes éternelles
RomanceLorsque Gabrielle croise Mathys pour la première fois, elle est troublée mais pas seulement. Elle à se sentiment étrange de déjà vu. Mathys entre dans sa vie et chamboule tout ses repères. Quand il lui avouera la sombre vérité Gabrielle devra choi...