Le secret d'Henri

Sept heures de réflexion

*Lyla, Chambre de l'Hôtel Broadview:

Le retour à l'hôtel s'est fait dans un silence relatif, mon cousin n'a pas cessé de parler de cette soirée de folie, et comme il a un peu forcé sur le champagne, Henri a proposé de le raccompagné chez lui. Il devra venir récupérer sa voiture demain avant d'aller bosser. Il n'a pas l'alcool méchant heureusement, mais c'est un vrai moulin à parole et pour le coup, cela m'arrange.

Je sais qu'Henri a entendu ma conversation avec la sœur de Keith et même si je ne sais pas depuis combien de temps il écoutait, il est clair qu'il a pris une gifle en m'entendant dire que Keith était une part non négligeable de ma nouvelle vie, un ami précieux et en qui j'ai confiance. Notre relation peut paraître ambiguë, mais c'est simplement une belle histoire d'amitié et de complicité. (A qui veux-tu sincèrement faire gober qu'il ne s'agit que de cela Lyla, sois honnête et reconnais que ton coeur bat plus vite quand Keith Heavenly est dans les parages! Et qu'il explose lorsque vous êtes tous les trois, parce que tu te sens complète, ainsi entourée d'amour et d'attention !)

Je regarde Henri, il tient ma main bien au chaud dans le creux de la sienne, mais son regard est perdu dans le paysage qui défile de l'autre côté de la vitre teintée. Je voudrais qu'il se libère des questions qui le hantent, qu'il ose affronter mon regard au moment d'entendre mes réponses, parce que je ne veux pas lui mentir, je l'aime lui, Henri, je tiens à énormément à Keith, mon meilleur ami "gay," et je fais ce que je peux pour gérer tout ce foutoir...

Après avoir déposé Cédric à la coloc', l'ambiance s'est faite encore plus pesante. Je me suis nichée aux creux des bras de Henri, qui m'a serrée fort contre lui, mais il n'a pas prononcé un mot, ni moi non plus. Est-ce que qu'on appelle le calme avant la tempête? Je sens mon coeur s'affoler sous mes côtes, je ne veux pas perdre Henri à cause de mon attachement à Keith, je dois faire tout ce que je peux pour éviter cela et je sais déjà comment. Il me faut simplement prendre un peu de recul, j'en ai besoin pour réfléchir. J'espère qu'Henri comprendra ma décision...

Il est presque trois heures du matin et je suis épuisée par les derniers événements. Ma tête bourdonne légèrement, les yeux me piquent et je baille derrière ma main. Henri me sourit, ses yeux bleus sont cernés d'ombres, lui aussi est fatigué, moralement et physiquement sans doute.

- "Bienvenue ma douce, cette chambre n'était qu'une pièce sans âme en ton absence, m'avoue Henri alors que je découvre la vue au-delà de la terrasse.

- Cette chambre est belle, la vue sur la ville, encore plus. On s'installe en terrasse pour discuter? La dernière phrase me brûle la gorge lorsque je la prononce, j'ai besoin que tu me dises certaines choses concernant cette garce, enfin, si ce n'est pas trop difficile pour toi de m'en parler.

*Henri, Chambre de l'hôtel Broadview:

- Si, ça l'est! Mais je ne te cacherais rien de cette histoire, dis-je en la regardant droit dans les yeux, je ne veux plus de secret entre nous, celui-ci a failli tout détruire et je refuse de te perdre mon amour" (Menteur! me hurle ma conscience, tu vas réellement lui dire que Keith est amoureux d'elle depuis la première minute? Qu'il est assez franc pour être venu te trouver dans ta loge et tout t'avouer? Qu'il n'a jamais été gay et que tu as peur de lui, de ses sentiments pour elle, de SES sentiments pour lui? Rhaaa! Ta gueule!)

Alors qu'elle allait me répondre, je fais un pas pour clore la distance entre nous et je l'embrasse pour la faire taire. Je sais qu'elle ne me mentira pas, je le lis dans son regard. Mais je ne suis plus certain de vouloir entendre ça de sa bouche, pas tout de suite. J'approfondis notre baiser en tirant doucement sur ses cheveux pour qu'elle me regarde dans les yeux. Elle y met fin en premier mais ses yeux vert pierre précieuse, sont ancrés dans les miens, puis j'y lis une douleur, fugace, mais bien réelle et tout à coup, j'ai peur.