L'Académie

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Malgré le temps encore doux de ce début d'automne, les jeunes résidentes de la propriété de la princesse étaient toujours cloisonnées au sein du chateau qui, bien qu'immense, se révélait être absolument étouffant pour Alexis.
Les invitations et les réjouissances au palais s'enchaînaient pourtant depuis quelques jours déjà, offrant aux invités parés de leurs plus beaux atours, quantité de plats, pâtisseries et confiseries des plus raffinés.
Alexis n'avait pas revu le prince depuis le thé donné dans les jardins de la reine pourtant cela ne l'empêchait pas d'être nerveuse à chaque nouvelle invitation.
Ce soir aurait lieu un récital et plusieurs chanteurs et musiciens célèbres du royaume avaient été conviés. Cela promettait d'être long, bruyant et profondément ennuyant. Alexis soupira en écoutant pour la énième fois Lydie lui décrire la coiffure qu'elle arborerait.
- Tu m'écoutes à peine, protesta Lydie.
- Tu sais que je n'entend rien à ce genre de choses.
- Allons Lydie, corrigea Eshal, tu n'as toujours pas compris que notre cher Alexis n'était pas portée sur tout ce qui peut concerner ta garde robe ?
- Peut être bien, protesta Lydie, mais tu m'avais  promis des cours d'escrime !
- Oui ça c'est vrai !, ajouta Eshal.
- Il vous faudrait une tenue adéquate et des épées de bois pour commencer, je ne vois pas ou nous pourrions trouver ça, répliqua Alexis.
- Nous pourrions porter des jupes larges et nous entrainer avec...avec.., réfléchissait Lydie.
- Ta brosse à cheveux peut être ?, s'esclaffa la jeune rousse.
Alexis devint tout à coup pensive, elle avait une idée mais elle s'avérerait risquée.
- L'académie militaire du dauphin, murmura-t-elle.
- Tu compte nous y inscrire ?, ironisa Eshal.
- Non, mais je pourrais m'y rendre et prendre ce dont nous avons besoin.
- Tu es complètement folle !, s'écria Lydie.
- Comment compterais-tu t'y rendre ?, avec la calèche de la princesse Lucillia peut être ?
- Non, j'ai un autre moyen mais il va falloir que vous m'aidiez.

Le soir les jeunes ladies se retrouvèrent dans le hall du château, prêtes une fois encore à assister à une  soirée au palais royal.
La baronne de chêneau et la princesse Lucillia attendaient patiemment l'arrivée des dernières jeunes filles, quant Lydie se précipita vers la baronne.
- madame de chêneau, Alexis.. Je veux dire Alexandra est souffrante elle ne pourra pas nous accompagner ce soir.
- Allons ! Qu'est-ce là ?, demanda la vieille femme, ce matin encore elle semblait en parfaite santé !
- Je ne sais pas, elle est fiévreuse et son estomac l'a fait souffrir.
- N'y avait-il pas des noix dans le gâteau que l'on nous as servis ce midi ?, remarqua Eshal qui se plaça près de Lydie.
- Il me semble en effet, acquiesça la baronne, mais quel est dont le rapport ?
- Alexandra est fortement allergique aux noix !
- Se pourrait-il qu'elle en ai mangé ?, s'inquiéta la princesse de Vicronelle qui avait entendu la conversation.
- Oui je l'ai vu en prendre un morceau, s'exclama Lydie d'un air effaré.
- Je monte voir, dit la la baronne en grimpant vivement les marches du grand escalier.

Alexis glissée sous ses épaisses couvertures, Mel à ses côtés l'air inquiet, attendit l'arrivée de la baronne, qui frappa deux coups secs avant d'entrer.
- Mademoiselle de Liaire, on me dit que vous êtes souffrante que se passe-t-il ?
- Je me suis subitement sentie mal, gémit celle-ci les yeux clos les deux mains crispées sur son ventre.
- Elle est comme ça depuis ce midi madame, ajouta la jeune femme de chambre en se tordant les mains.
- Auriez-vous mangé un gâteau aux noix au dessert ?
- Au noix ? Je pensais que c'étaient des amandes, je suis allergique aux noix ! La dernière fois d'horribles boutons me sont poussés sur le visage, répondit celle-ci en portant cette fois ses mains sur ses joues.
- Olala vous feriez mieux de rester ici ce soir avec votre femme de chambre, conseilla la vieille femme le visage horrifiée, la reine nous attend nous ne pouvons pas annuler maintenant ni même arriver en retard, souhaitez-vous que l'on fasse appeler un médecin ?          
  - Non, cette allergie n'est pas dangereuse, répondit précipitamment Alexis, mais je risque de ne pas pouvoir me lever de mon lit avant demain.
-Bien alors c'est d'accord, nous irons au palais sans vous, Mel restera à vos côtés, si votre état s'aggrave faites appeler un médecin. 
- Bien madame, dit Alexis d'un air contrit.
- Allons allons, ne faites pas cette tête il y aura bien d'autres fêtes. Bonne soirée et reposez-vous, ajouta celle-ci en sortant rapidement soucieuse de ne pas arriver trop en retard.
Les pas de la baronne s'éloignèrent, on entendis encore quelques voix étouffées à l'entrée, les chevaux et les attelages devant la grande porte, puis ce fut le silence.
Mel jeta un regard à Alexis qui arborait un sourire victorieux.
- Elle m'a cru !
- Ce n'était pas très prudent mademoiselle, pouffa Mel, vous allez devoir faire attention à ne plus manger de noix en sa présence.
- Oh ne t'en fait pas j'y suis vraiment allergique, mais jamais je ne m'y risquerais à en manger, contrairement à ce que j'ai dis cette erreur pourrait m'être fatale et me tuer.
- Mais vous ne m'avez pas dis pourquoi vous teniez tant à ne pas aller à cette soirée, les fêtes au palais doivent être éblouissantes !
- Les récitals sont souvent très ennuyants, répondit celle-ci tentant de ne pas avouer sa peur de revoir le prince Dorian ni sa véritable intention.
- Vous êtes vraiment une jeune fille originale mademoiselle, à présent puisque vous vous portez comme un charme je vais vous laisser, je dois finir de préparer votre robe pour le bal d'automne.
- Merci de m'avoir aider Mel.
- Je vous en pris mademoiselle, répondit celle-ci en sortant.
Alexis se leva, verouilla la porte de sa chambre, il était inutile que trop de personnes soient au courant de sa nouvelle escapade. Elle retira une fois de plus de sous son lit le sac de toile qui contenait une paire de chausse et la cape en laine sombre qu'elle enfila rapidement ajoutant une chemise et une tunique noire ainsi que ses bottes et son petit couteau qu'elle suspendît à la ceinture qui maintenait ses chausses. Il était imprudent en temps de guerre de sortir désarmée.
Elle attacha ses cheveux et rabattit la cape sur son visage. Passant par le balcon de sa chambre, elle rejoignit rapidement le jardin, esquiva les gardes qui une fois de plus surveillaient les alentours du château, ne songeant pas à scruter l'objet de leur protection. Elle escalada le pan de mur légèrement plus bas sur lequel s'appuyait une vieille statue, et se retrouva à l'extérieur. Vérifiant qu'aucun garde ne l'avait vu elle s'engagea à travers les grandes rues puis enfin les ruelles, personne ne semblait remarquer qu'une jeune fille se cachait derrière cet accoutrement masculin. Elle arriva enfin devant l'immense batiment qu'elle apercevait depuis ses appartements. L'Académie du Dauphin. L'institut de l'armée le plus réputée du royaume qui accueillait tout les jeunes garçons de la noblesse à l'adolescence afin  d'enseigner toutes les disciplines nécessaires aux officiers qu'ils deviendront. Son père et son oncle y avaient passé leur jeunesse et son cousin Harry avait rejoint l'académie plus de deux ans auparavant. Elle savait qu'elle pourrait y trouver de fines épées en bois assez légères pour entrainer ses amies sans craindre qu'elles ne se blessent.
Le problème restait de trouver le moyen d'y entrer sans se faire remarquer. Seuls les plus jeunes recrus et ceux assignés à la protection de la ville devaient s'y trouver, son cousin et la plupart des jeunes officiers se trouvaient encore au front.  Quatre gardes se tenaient à l'entrée, un autre se tenait tous les quinze mètres environ du muret de protection qui entourait la cour extérieur remarqua Alexis faisant discrètement le tour du bâtiment, une autre entrée à l'arrière était réservée pour les chariots d'approvisionnement et les chevaux de la cavalerie. Seulement deux gardes y étaient assignés, visiblement la ville manquait d'effectif.
Alexis attendit presque une heure cachée à l'ombre d'un grand saule qui faisait face au bâtiment, cherchant désespérément un moyen d'entrer. Quatre gros charriots frappés du sceau de la guilde des paysans financés par le roi s'arrêtèrent soudain derrière l'académie, il s'agissait probablement de l'approvisionnement quotidien de céréales, de fruits et de légumes pour nourrir les jeunes soldats.
Croyant à peine à la chance qui s'offrait à elle, Alexis s'approcha et vit le conducteur du chariot principale, un homme à la bedaine imposante et au visage tanné par le soleil, discuter avec le garde à l'entrée.  Elle profita qu'ils soient occupés pour grimper silencieusement à l'arrière du dernier charriot rabattant les tentures en cuir qui protégeaient les sacs de farine sur lesquels elle s'assit.
- Ce n'est pas Lyrélien qui est de garde ce soir ?, demanda le paysan.
- Non, il est malade je le remplace, j'espère que les pommes que vous amenez ne sont pas infestées de vers comme ceux d'hier vieil homme.
- Allons ! comment oses-tu ?, ce sont les fruits du roi que tu critiques idiot, laisse moi passer maintenant.
- Allez-y, fit le garde en laissant passer les deux premiers charriots avant de lever la main subitement, Arrêtez !
Le coeur d'Alexis se serra.
Le garde s'approcha du troisième charriots.
- Regarde ce fruit paysan !, est-il digne des soldats du roi d'après toi ?
- Remet cette pomme à sa place et laisse les derniers charriots entrer, j'ai encore deux autres livraisons ce soir !, s'exclama l'homme imposant. 
Les charriots se remirent en marche au grand soulagement de la jeune fille accroupie sur les sacs de farine.
Alexis sentit les cahots de la roulottes quelques minutes encore avant que celle-ci ne s'arrête complètement. Elle entrouvrit la tenture en cuir et vit qu'elle se trouvait dans la cour extérieur de l'académie. Elle sortit discrètement sans se faire prendre et veilla à se cacher dans les coins sombres. Elle repéra finalement une entrée, et pénétra dans l'enceinte du bâtiment. Les halls et les couloirs se succédèrent, elle se trouvait dans la partie réservée aux domestiques et dû chercher un moment avant de trouver enfin celle réservée aux étudiants. Elle entra dans une salle de cours et découvrit une étagère remplie de livres en tout genres. La jeune fille ouvrit un lourd volume qui traitait de stratégie militaire et eut un pincement au coeur, elle avant tant rêvé être acceptée à l'académie en même temps que son cousin Harry, son père presque aussi dépité qu'elle, avait engagé un maitre d'armes, Nowfel. Le dur professeur, qui secondait son père en temps de guerre, ne l'avait pas ménagée, il avait passé de longues heures à lui enseigner le maniement de l'arc, de l'épée, de la lutte à mains nues et armée d'un couteau mais aussi la stratégie militaire.
Depuis la disparition de son père cet été, elle n'avait plus eu aucune nouvelle et craignait d'en entendre de funestes.
Elle reposa le livre, et entreprit de trouver la salle d'entrainement. Elle ne rencontra que très peu d'étudiants et pris soin tout au long de son inspection à longer les murs et se tapir dans les ombres, ce fût au bout du troisième couloir qu'elle trouva l'immense salle ronde bordée de petites portes en bois, elle l'a reconnu grâce aux cibles de flèches fixées  sur les murs. Alexis ouvrit les petites portes, qu'elle avait deviné être les réserves d'équipements d'entrainements. Elle trouva derrières l'une d'elles de fines épées en bois et aux manches cerclées de fer et de lanières de cuir pour assurer la prise. C'étaient de parfaites répliques de celles que lui avait apporté son père lorsqu'elle avait commencé l'entrainement. Légères, elles seraient parfaites pour ses jeunes amies peu habituées à cet exercice.
Elle en choisis cinq, et entreprit de retrouver son chemin, se demandant déjà par quel moyen elle pourrait sortir sans se faire remarquer. Elle pensa même à se faire passer pour un étudiant, mais comment expliquer les épées ? Elle aurait dû prendre un sac en toile pour les dissimuler et faciliter leur transport !
D'ailleurs se déplacer discrètement était devenu plus difficile, son chargement se faisait lourd et s'entrechoquait bruyamment à chaque pas.
Heureuse de retrouver la grande porte par laquelle elle était entrée elle se précipita, quant deux voix se firent entendre. Elle se figea et tenta une fois de plus de se tapir dans un coin d'ombre, mais les épées se balançaient dangereusement dans ses bras, menaçants de tomber et de trahir sa présence.
Les voix semblaient s'éloigner, une épée glissa et Alexis la rattrapa de justesse.
- Qui est là ?
La jeune fille se figea.
La silhouette d'un jeune soldat portant l'uniforme de l'académie apparut au bout du couloir sombre et l'avait repérée.
Sortant de sa stupeur, Alexis n'eut d'autres choix que de fuir, le garçon la poursuivit à travers les corridors, deux gardes avancèrent dans sa direction, elle n'eut d'autres choix que de ralentir se faisant rapidement rattraper par son poursuivant qui lui attrapa violemment le bras la forçant à se retourner. Les épées de bois tombèrent de ses mains, et elle se retrouva nez à nez avec le jeune soldat qui la dévisagea étonné.
- Attendez ! Je vous ai déjà vu quelque part !, souffla-t-il.
Le coeur d'Alexis manqua un battement en reconnaissant cette pairs de yeux verts et ces cheveux sombres indisciplinés.

      ***                         ***
Avec une fois de plus beaucoup de retard voilà la suite ! Je sais les temps d'attente sont long mais je vais vraiment essayer de faire mieux, c'est juste difficile de tout concilier et je veux publier des chapitres de qualités.
Bonne lecture et n'hésitez pas à laisser un petit avis qui motive beaucoup !

AlexisOù les histoires vivent. Découvrez maintenant