Chapitre 18

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- Cassy… Cassy.

Je soupirais en me retournant, les yeux à demi clos.

Alicia, qui me secouait l’épaule depuis tout à l’heure afficha un large sourire.

- Kevin à appeler, déclara-t-elle visiblement soulagée. Il m’a dit qu’il allait bien et qu’il était chez un de ses amis.

Alors, il m’avait quand même écouté, remarquais-je assez fière.

- Il t’a dit lequel, demandais-je curieuse.

- Il a dit que je ne le connaissais pas… Mais je m’en fiche, du moment que mon fils rentre a la maison sain et sauf. Kevin m’a dit qu’il était passé par la maison. Tu…

- On s’est croisé, oui. Mais ca ne s’est pas bien passé, avouais-je.

- Oh… Cassy…

- C’est bon quoi, ca suffit ! C’est quoi son problème hein ? C’est ton fils alors tu dois savoir.

- Kevin a horreur du mensonge, je crois que tu le sais déjà.

J’acquiesçais et Alicia reprit :

- Quand mon ex-mari et moi nous nous sommes séparés, Kevin était encore très jeune et il ne le voyait que très rarement. Son père avait l’habitude d’annuler leur sorties pour des raisons soi-disant professionnelles : il est reporter photo et il voyage beaucoup. Mais un jour, Kevin l’a surpris avec sa… sa nouvelle compagne et son fils, alors qu’il était censé être au Gabon. Il s’est alors rendu compte que son père lui mentait depuis le début et qu’il préférait passer du temps avec son autre famille. Tu vois, ce n’est peut-être pas un traumatisme aussi important que le tien,  mais ca a été un vrai choc pour Kevin car il adorait vraiment son père. Depuis, il haï le mensonge et tout ce qui y a attrait.

     Je n’avais jamais eu vent de cette histoire… En même temps, Kevin ne me parlait pas vraiment de son enfance, comme si c’était tabou.

Pendant un instant, j’eus l’impression de me mettre à sa place. Mais le visage de Kevin me revint a l’esprit et imaginer Alicia, prenant dans ses bras son petit garçon tout triste et essayant de calmer sa peine me fit éprouver de la jalousie et une profond haine envers lui. Un père menteur ? On avait vu bien pire… J’AVAIS vu bien pire.

- Il hait le mensonge, lâchais-je sur un ton exécrable,  et puis quoi encore ? D’après toi, c’est une raison pour fuguer et nous faire la gueule pendant des jours ? Il déteste les menteurs, répétais-je plus bas. Il aurait voulu quoi, l’autre idiot ? Que je lui dise la vérité depuis le début ? « Salut, je m’appelle Kevin », «  Salut Kevin, moi c’est Cassy et mon père à pratiqué l’inceste avec mon pendant des années ».

- Calme t…

- C’est ca qu’il aurait voulu ? Hein ? C’est moi la victime ici, pas lui, moi ! Et je sui désolée si monsieur ne comprend pas que d’autres personnes on des problèmes plus importants que de jouer a "Tu me mens, je découche". On lui a mentis, d’accord. Mais qu’il oublie ca et on passe a autre chose.

   Ma tirade finie, je ressentis une grande fatigue. Je venais de dire tout ce qui me passait par la tête et j’avais l’impression d’avoir dépassé les bornes. Mais Alicia ne fit rien qui confirma mes soupçons et se contenta de secouer la tête lentement.

- Il n’y a pas de petits problèmes, Cassy. Tout dépend de la personne et de la façon dont elle voit les choses. Un problème peu te paraitre sans importance a toi, et couter la vie de quelqu’un d’autre.

       Alicia se leva et pris la direction de la porte de ma chambre.

- Je sais que tu es une fille intelligente, Cassy. C’est la frustration que te fais parler ainsi. Calme-toi, prend le temps de réfléchir et… Et après on verra si tu pense toujours de la même façon.

 Alicia me sourit et referma la porte derrière elle.  Je me rallongeais et enfouis la tête sous les draps. Pour l’instant, j’avais juste envie de dormir et d’oublier tout ce qui s’était passé aujourd’hui et bien avant.

    Lorsque j’entendis la porte d’entrée claquer et la voiture d’Alicia démarrer, je me décidais enfin a quitter mon lit. Après ce qui s’était passé hier,  et toutes les bêtises que j’avais sortie a Alicia, je ne me sentais pas prête à l’affronter maintenant.

Oui, finalement, ce moment était arrivé ou je m’étais rendu compte que j’avais dis des choses que je ne pensais pas vraiment et que, poussée par la colère, je m’étais faites passée pour une victime dans cette histoire… et ce moment était arrivé plus tôt que je ne le pensais : j’avais passé la nuit à me tourner et me retourner dans mon lit, regrettant les paroles que j’avais sorties un peu plus tôt. J’avais même voulu aller m’excuser au beau milieu de la nuit mais je m’étais dis que ce serait déplacer. Et voila que maintenant, je n’avais plus le courage de le faire. Comme quoi, la personne qui a dit « Ne jamais remettre a demain ce qu’on peut faire aujourd’hui » n’avait pas totalement tort.

        Je pris une douche rapide et alla me faire cuire un œuf a la cuisine, avant de m’affaler, morte d’ennuis sur le canapé du salon. Après quelques minutes à zapper les chaines de la télévision, je décidais d’aller faire un tour. L’idée de piquer une crise a la vue d’un homme faillis me faire changer d’avis, mais j’avais promis a Alicia que j’allais faire des efforts pour changer, alors je ne devais pas reculer.

Je pris alors mon portable, ma petite doudoune bleue marine accrochée sur le porte manteau dans le vestibule et sortit.

Un vent très frais m’accueillis alors que je faisais mes premiers pas dehors… toute seule. Je sortis de la concession et pris la route du lycée. C’était à peu près le seul chemin dont je me rappelais bien, même si c’était  le seul que je n’avais pas envie de prendre : ca me rappelait tellement de mauvaises choses… et quelques bonnes aussi, seulement avec Kevin.

- Je suis vraiment une idiote, me dis-je entre les dents.

J’avais vraiment été bête de penser que le monde tournait autour de moi et de mes problèmes. Kevin avait toujours été la pour moi, et pourtant, je ne m’étais même pas inquiétée de savoir si LUI, il n’en avait pas. Peut-être était-ce parce qu’il ne laissait rien paraitre. Alicia l’avait dit elle-même, tout le monde avait des problèmes. Kevin avait du souffrir moralement de l’absence de son père, comme moi j’avais souffert de sa présence trop imposante.  Je ne devais pas mépriser ses sentiments et prendre le temps de le comprendre.

C’était décidé, il fallait que je m’excuse auprès de Alicia, et que je règle cette affaire avec son fils une bonne fois pour toute.

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