On Est Deux [Benjamin Pavard]

twenty

— C'est toi et ton copain qui vous amusiez à étaler de la mayonnaise partout ?

— Qu... Quoi ? J'ai autre chose à faire, monsieur. Et, je n'ai plus de copain depuis trois heures, c'est super cool de me le faire rappeler.

J'opte un ton brisé, presque sur le point de pleurer. Le marchand me regarde, l'air désolé, puis baisse la tête et encaisse l'argent que je viens de lui donner. Je prend ensuite mon sachet de chips et le pot de mayonnaise. J'hésite à lui en mettre dans l'œil.

Dans mon sac à main se cache la saison une de F.R.I.E.N.D.S que j'ai acheté tout à l'heure au grand supermarché. Puis, j'ai vite regretté de ne pas avoir pris mes chips au poulet rôti et ma mayonnaise. Du coup je suis repassée par là.

Une idée drôle me vient en tête. Je n'ai pas le numéro de téléphone de Benjamin, mais je peux faire comme si. Je m'arrête devant la porte coulissante, et fais genre que je répond à son appel.

— Allô, Benjamin ? Euh, désolée, je peux pas te parler. Ouais, j'suis dans le magasin où t'as tapissé le rayon de Mayo.

Puis j'me casse. J'ai rapidement vu le regard du vendeur se tourner vers moi, mais, il ne m'a pas coursée. Merde. Je retourne dans ma voiture, et, comme par magie, la radio s'est allumée. Un regard d'inquiétude s'est posé dessus. Putain, elle est hantée. Le dernier CD que j'avais inséré se remet à fonctionner.

Un énorme «BUT THE KID IS NOOT MYYY SOOOOOON» résonne. Je baisse vite, et, heureuse de l'avoir entendue, cette vieille radio, je retourne au centre d'entraînement. En passant, j'aperçois Raphaël qui court tout seul, la musique dans les oreilles. Il était plutôt proche, et quand il a vu que je me suis arrêtée, il s'est approché.

— Quoi ? demande Varane le souffle court.

— J'ai pas vu Lucas de la journée. Tu saurais où est-ce qu'il est ?

— Il était présent à l'entraînement, t'en fait pas. Il est sûrement parti se défouler dans la salle de muscu ou à la piscine.

— Oh... Bon, ben, cool, merci Raphaël !

Il me fait un signe militaire de la main, et remet ses écouteurs avant de courir à nouveau. J'espère qu'il a raison. Bref, je monte une partie de mes affaires dans la chambre de Lucas, et retourne chercher les chips. Dans un calme extravagant, Benjamin joue à Dancing Line.

Je m'installe sur le canapé, ouvre le paquet de patate sèches, et le pot.

— Alors ? je demande voyant qu'il reste silencieux.

Il verrouille son téléphone sans même finir ou perdre le circuit musical. En un geste désinvolte il le jette sur la table, en maîtrisant l'atterrissage. Enfin, il se jette lui-même au fond du canapé, se tassant jusqu'à devenir ridicule.

Benjamin aurait-il fait une connerie ?

— J'aurai pas dû demander, dis-je en prenant le pot de mayo, prête a dégager le terrain.

— Si, c'est bon, elle a dit qu'elle était super occupée en ce moment. Elle s'est excusée.

— Alors... Pourquoi tu réagis comme ça ? C'est génial !

— Ouais, c'est vrai. T'as raison. Et puis, on est deux, hein.

— Deux de quoi ? demandé-je en croquant la chips recouverte de sauce. Heureusement que vous n'êtes pas trois... Enfin, après c'est pas mon problème mais...