Mes yeux s'ouvrent brusquement. J'ai besoin d'air. De beaucoup d'air. Je me redresse brusquement, aspirant de grosses goulées d'oxygène. A mes côtés, une jeune femme brune ouvre des yeux ensommeillés. Elle ne porte qu'un simple T-shirt remonté en haut de son ventre et un shorty noir. Est-ce que... Non, je n'ai rien fais avec elle. Elle se redresse à son tour, s'assied en tailleur et écarte le rideau de cheveux noir corbeau tombant devant son visage.
— Kelan ? Qu'est-ce que...
— C'est rien, c'est rien.
Bon Dieu, c'était quoi, ça ? Une crise de panique ? Non, ça ne m'étais jamais arrivé avant, je ne vois pas pourquoi ça m'arriverait maintenant... J'ai rêvé d'Adino. De cette fois où il m'a... putain, ce séjour à l'hôpital me rend encore fou, même aujourd'hui. Pendant que je me rallonge sur le matelas, Hope entreprend de me caresser tendrement la tête. Non, il ne faut pas qu'elle... Mais c'est si agréable... À tel point que j'en oublie toutes les horreurs qui m'ont réveillées en sursaut, et me rendors comme une masse.Les yeux ouverts, je me tourne vers Hendo, dans la même situation que moi. Malgré moi, la voir allongée près de moi me procure une petite dose de satisfaction, et j'esquisse un sourire. J'y repense souvent, en ce moment. Quelle était la probabilité qu'on termine dans le même lit, alors que je m'étais juré de ne pas m'approcher d'elle ? Je suppose que la réaction de son père, autoritaire et menaçante mais relativement permissive, m'a étrangement invité à me demander ce qu'il se passerait si c'était le cas. Et maintenant, c'est chose faite, on dirait.
— Hendo, réveille-toi. On est salement à la bourre.
Cette dernière se redresse, son regard cherchant les quatre chiffres rouges du réveil. Et lorsqu'elle les trouve, elle écarquille les yeux et bondit du lit. Ouvrant prudemment la porte de la chambre pour s'assurer que son père est parti, elle sprint jusqu'à sa chambre pour s'habiller. De mon côté, je fais de même et sors de la chambre pour lacer mes chaussures. Alors que mes doigts nouent savamment mes lacets, je relève la tête à temps pour voir Hope glisser le long de la rampe d'escalier. Je lève un sourcil, admiratif. Belle manœuvre. Les dents brossées, l'estomac vide, j'envoie un casque à ma coloc'. Fermant rapidement la porte d'entrée, elle s'assied ensuite derrière moi pendant que je démarre la Triumph. Et à peine quelques minutes plus tard, on arrive à la fac. Coupant le moteur et tournant le guidon, je regarde Hope se précipiter vers l'entrée du bâtiment. Celle-ci se retourne, étonnée de ne pas me voir à sa suite.
— Tu ne viens pas ?
— Ma nuit a été courte.
Elle retient un rire et hausse les épaules avant de traverser la porte de la fac. Fourrant les clés dans ma poche, je m'allonge sur la moto, pieds sur le guidon. Fixant le ciel gris, je soupire.Des hordes d'étudiants sortent des bâtiments. Déjà onze heures ? Expirant la fumée, je jette la cigarette par terre et l'éteint du talon. Parcourant le monde des yeux, je remarque soudain un garçon au teint légèrement halé. Ses cheveux bruns subtilement ondulés, tombant juste derrière l'oreille m'empêche de voir son visage. Mais je n'ai pas besoin de ça, je sais très bien qui c'est. Putain, je le crois pas. Il en a pas eu assez ? Allant à sa rencontre, je l'interpelle discrètement.
— Qu'est-ce que tu viens foutre ici, salopard ?
— T'as pas encore compris, Kelan ? Je me balade où je veux.
— N'essaie même pas de refourguer ta merde aux gens, pauvre minable.
— Et tu vas faire quoi, hein ? On va encore se battre comme hier ?
— Ça dépend, t'as encore envie de te faire humilier ?
— Je suis pas venu pour me battre, mais pour le business.
Ouvrant la fermeture éclair de sa sacoche, il fouille quelques secondes à l'intérieur et en ressort une seringue. Je n'ai aucun doute sur ce qu'elle contient : de l'héroïne. Adino esquisse un rictus mesquin.
— Ça ne te rappelle rien ?
Mon sang ne fais qu'un tour, et je l'empoigne par le col. Se délectant de ma réaction, il me repousse doucement.
— Ne te lance pas là-dedans, je suis venu mieux préparé que la dernière fois.
A ces mots, il sort un couteau à lame incurvée de sa poche. Oh, tu crois que ça va m'empêcher de te casser la gueule ? Je me jette sur lui, ivre de rage. Sa lame fend l'air dans un sifflement mais ne m'atteint pas. Par chance, j'intercepte rapidement son poignet et lui fait lâcher son arme. D'un coup de pied, je le fais valser plus loin afin qu'il ne puisse plus s'en servir, et assène une droit à cet enfoiré. Ce dernier réplique par un crochet à l'estomac qui me plie en deux, et m'adresse un violent coup de coude dans le dos. A terre, j'attrape ses jambes et le plaque au sol, avant de lui asséner un puissant direct en plein visage. Le nez en sang et la lèvre fendue, il sourit. Expirant lentement pour me calmer, je me relève et recule de quelques pas. Adino se relève à son tour et ramasse son couteau ainsi que la seringue d'héroïne, tombée de sa sacoche. Au moment où je m'apprêtais à lui ordonner de se tirer, je suis interrompu par un coup de sirène de police. Tournant la tête, j'avise une Dodge Charger du NYPD avançant vers nous, avec un homme barbu au volant. Oh, super. Dépité, je baisse la tête. Là, c'est foutu.
— Les mains sur la tête, tourne-toi.
Je m'exécute, la mort dans l'âme, pendant que M. Henderson me passe les menottes, correctement serrées. Il me plaque contre le capot de la Charger sans aucune once de douceur, et lâche :
— Je savais que ma fille avait tort. Un fruit pourri ne redevient jamais comestible.
Je n'essaie même pas de me disculper ; avec lui, c'est peine perdue. Deux étudiants viennent le voir pour lui faire part du contenu du sac d'Adino, mais je doute que ça change quelque chose ; Henderson n'attendait que ça pour me virer. Menottant également Adino, il nous fait ensuite rentrer dans la voiture pour nous emmener au poste. Pendant le trajet, le silence règne dans l'habitacle, me plongeant dans une légère culpabilité. J'aurais préféré montrer une meilleure image de moi-même, c'est sûr. Mais bon, puisqu'on y est...

VOUS LISEZ
One More Hope
Teen FictionOriginaire de Chicago, Kelan a déménagé l'année suivant la mort de son père. Depuis, il reconstruit progressivement sa vie à New York, où il vit seul avec sa mère tout en essayant d'éviter les problèmes. Mais chassez les ennuis, ils reviennent au ga...