17. Seul - K

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    J'ai roulé. Longtemps. Je ne sais plus dans quelle direction, ni combien de temps, je sais seulement que j'ai roulé, sans but, dans la nuit noire. Enfin, jusqu'à ce qu'Adrian ne compose mon numéro.
Kelan ? T'es où ?
Je sais pas. Je suis en moto et... j'ai pas fait gaffe aux panneaux.
Oh. Une petite sortie en boîte, ça te tente ? Je viens de rentrer de Phoenix, je pensais aller faire un tour au Speaker?
Tu te fous de moi ? C'est rempli de gamins.
C'est vrai qu'une cuite me ferait le plus grand bien, surtout en ces circonstances. A l'autre bout du combiné, Adrian se tord de rire. Il cherche de l'air, attendant d'être totalement calmé avant de répondre. Il est toujours bon public.
Non, pas celle-là, je rigole. Je pensais au Ground Zero, qu'on y aille avec Zash et Wayne ?
Ça me va.
On va bouffer et on voit ?
Banco. Il faut juste que... Je trouve un endroit où crécher.
Bah, chez moi ? Tu restes ce soir, demain, la semaine prochaine, on s'en branle ! Ramène-toi, je t'attends.
Il raccroche. Je serre mon téléphone. Depuis que je suis arrivé à New York, Adrian est le seul mec sur qui j'ai pu réellement compter. Et je crois bien que je n'ai plus que lui, désormais. Rangeant rageusement mon téléphone, je redémarre et lance la moto sur la route.

Assis sur le lit, je regarde d'un œil distrait les photos qui défilent sur Instagram. Adrian se cherche une tenue pour ce soir, puis, le cerveau à deux doigts de lâcher, enfile un sweat à capuche noir. Allier l'agréable à l'agréable, comme il dit.
C'est bon, je suis fin prêt. On y va ?
Prends ce casque et on est partis.
Il monte derrière moi, et ma main actionne la poignée d'accélérateur. La route est paisible, malgré les rues bondées du centre. Malgré le ciel nuageux, il fait bon se balader dehors.
Quelques minutes plus tard, posés sur l'herbe de Central Park sombrant doucement dans la pénombre de la nuit, je mange en silence. De son côté, le blondinet dévore son repas.
Alors, ça donne quoi avec Hope ? Vu que tu logeais chez elle ?
On s'est éloignés.
Un vent frais s'insinue dans mes cheveux et fait frémir les brins d'herbes autour de nous. Adrian crache un brouillard de soda près de moi.
Eh !
Pourquoi t'as fait ça ?! Elle est à fond sur toi, ça crève les yeux !
Son père ne veut plus que je m'approche d'elle, et en plus de ça il m'a à l'œil à cause de cette histoire avec l'autre abruti.
Hein ? Il s'est passé quelque chose ?
Une... vieille connaissance est arrivée à New York, elle en a profité pour me voir, et accessoirement chercher la merde. On s'est battu, les flics sont arrivés. Et c'est le père d'Hope qui m'a arrêté.
Oh. Il t'a viré de chez eux, du coup.
C'est ça.
Retrouvant Wayne et Zash à l'entrée, je constate que les gens se massent encore à l'entrée du Ground Zero malgré l'heure tardive. Garant ma moto à l'arrière du bâtiment en compagnie de celle de Wayne, je constate que Zash est lui aussi venu en moto. Une belle Harley Davidson noire trône près de la Suzuki de Wayne. Une Iron 1200, si je ne m'abuse. Pendu à son guidon se trouve un casque allemand sommaire. Je ne pensais pas qu'il avait un look de biker aussi poussé, mais le style se marie particulièrement bien avec ses courtes dreadlocks. Prenant la direction de l'entrée, nous n'avons pas à attendre longtemps : nous sommes souvent venus ici avec Adrian, depuis qu'on se connaît. Et le vigile en a aussi conscience, puisque ce dernier nous fait signe d'avancer malgré la queue. Arrivés à son niveau, il nous ouvre la porte et nous salue avec enthousiasme. Dès que je passe la porte, les premiers sons et paroles du rappeur Yelawolf nous sautent au visage.

Empty bottles on the table, black roses on the ground
Silouhette of people dancing to an unfamiliar sound,
Hello stranger, can I call you a friend, my friend I'm going down
With empty bottles on the table, black roses on the ground

One More HopeOù les histoires vivent. Découvrez maintenant