Chapitre 43,5

5.8K 397 10
                                    

Point de vue d'Alysson :

Oups ! Cette image n'est pas conforme à nos directives de contenu. Afin de continuer la publication, veuillez la retirer ou mettre en ligne une autre image.


Point de vue d'Alysson :

Un pas devant l'autre, je m'exerçais comme à l'accoutumée, j'étirais mes bras, mes jambes et testais ma souplesse, je n'avais pas perdu pied et étais toujours aussi souple qu'à quatorze ans. Je fermai les yeux et laissai mes démons m'envahir, j'étais lentement engloutie dans les ténèbres sombres de ce foutu cercle vicieux d'ailleurs je crois que je n'ai jamais vraiment vu la lumière. Je portai une main vers ma cage thoracique et sentis un vide viscéral m'envahir mon cœur n'y était plus d'ailleurs cela fait tellement longtemps que je ne l'ai pas senti battre.
L'amour ! Quel piteux et lamentable sentiment ! Je n'y ai jamais cru et je n'y croirai jamais, tout ce qui existe ce sont des hommes qui abusent de femmes innocentes et rêveuses. Et pathétiquement je fus également l'une de ces femmes. J'ai été violée à quinze ans dans le cirque où j'habitais, la misère, la famine, les coups tout ça je supportais encore mais rien au monde n'aurait pu décrire ce que j'avais ressenti le jour où tout avait dramatiquement basculé pour moi. Un bruit, un craquement de branches, une seconde trop tard et je me suis retrouvée sous une masse puant foutrement l'alcool et misérablement ligotée, je m'étais débattue comme une folle mais rien à faire j'étais prise au piège, alors je me suis tue et j'ai invoqué la mort tandis que l'on m'ottait mon innocence, j'avais plongé mes yeux dans les siens et ai foudroyé mon bourreau avec toute la haine que je pus avoir, pourtant je fus faible. Je me souviens encore de mes supplications, de ma voix brisée implorant sa pitié mais tout ce que j'eus fut de la douleur, humiliée je m'étais mise à pleurer de rage au fur et à mesure qu'on usait de mon corps comme d'une instrument ou un trophée.

-"tu es magnifique Susannah" me disait l'homme en continuant de balader ses mains rêches sur mon corps frêle tandis que je me débattais la gorge brûlée par les sanglots. Je me suis haïe, de toutes mes forces, j'étais faible et souillée, j'avais perdu ce à quoi je me raccrochais le plus dans ce stupide bas monde : l'espoir. J'avais tout perdu, en quelques minutes mon monde entier s'était écroulé, mon cœur a été brisé en milles morceaux, ma foi en ce monde s'était évaporé, et je devins un corps sans âme, un corps strié d'affreuses cicatrices. Je ne cherchais même plus à vivre, j'attendais seulement que la mort vienne me délivrer d'une vie qui n'avait plus aucun sens pour moi.

-"Susannah" fut l'une des dernières paroles de ma mère lorsque je l'avais découverte pratiquement dénudée dans une ruelle sombre au milieu des poubelles. Cette image fut à jamais gravée dans ma mémoire. "Susannah sois forte et ne fais jamais confiance aux hommes" furent ses dernière paroles et celles qui me touchèrent le plus, étrangement ce soir la, j'ai versé toutes les larmes de mon corps, cela doit sûrement être la raison pour laquelle je ne pleure jamais parce que je n'avais plus aucune once de larmes dans mon corps. Je fus traumatisée par la vue de cette femme nue dans une ruelle mal éclairée une femme jadis rayonnante et magnifique réduite à une prostituée des cirques, et le comble fut lorsque des bâtards étaient venus la dévorer après qu'elle ait rendu son âme, à cet instant j'avais réalisé quelque chose : je ne voulais pas finir comme elle, alors je m'étais retournée une dernière fois vers la dépouille de ma mère complètement défigurée et j'ai couru ! J'ai couru sans m'arrêter ni même regarder en arrière, j'avais simplement couru en hurlant à m'époumoner toute la rage que je contenais, j'étais tombée et m'étais relevée, j'avais simplement continué de crier et de courir sans jamais m'arrêter en insultant la vie et la mort car elles allaient de paire avant de m'écrouler épuisée.
Je me relève et continue mes étirements l'air morose, je mis un air de musique et mon corps commença à se mouvoir sans aucune directive, je dansais simplement pour extérioriser mon chagrin, mon mal intérieur. Je tournais sur moi-même, effectuais des figures acrobatiques sans jamais ouvrir les yeux. J'avais mal ! Très mal, cette douleur ne me quittait jamais et je haïssais me réveiller le matin car je n'avais aucune raison de vivre, j'étais simplement pétrifiée et hantée par un passé que je n'avais pas choisi, je menais une vie que je détestais et je maudissais constamment mon sort, méritais-je tout ce qui m'arrivait ? S'il y avait une certaine justice alors elle devait penser que ma vie ne valait sûrement pas la peine d'être vécue.

-"je te haïs" criais-je en ouvrant les yeux pour faire face à au reflet affreux que projetait le miroir, les larmes menaçaient de couler, je tournais encore une fois et détachai d'un mouvement violent mes cheveux que j'avais soigneusement attaché. D'un geste rageur je cognai mon poing dans le mur, j'avais l'impression de constamment suffoquer, de m'étrangler à chaque nouvelle bouffée d'air que j'aspirais. Furieusement, je continuai de m'acharner contre le mur comme s'il était la source de toute ma haine, que comme si mes démons allaient me quitter, je fis abstraction de la douleur que je ressentais car elle faisait pale figue devant celle qui me rongeait de l'intérieur, la musique s'arrêta et mon corps avec, j'ouvris les yeux essoufflée et m'écroulai par terre en laissant tout le mal en moi prendre forme, je pleurai. Peut-être avais-je encore des larmes dans mon corps. Le visage de Savannah me revint en tête, celle qui m'avait aidé, celle à qui je devais sûrement la vie, celle qui ne s'est jamais moquée de moi lorsqu'elle a su que je ne savais ni lire ni écrire. Celle qui était devenue ma raison de vivre. Je ne méritais pas une telle personne dans ma vie ! Je n'étais qu'une moins que rien, une enfant illégitime et souillée mais qui n'en a jamais parlé, même Savannah l'ignore. Je suis faible et je ne mérite rien.

-"peu importe le temps qu'il te faut  j'attendrai, que ce soit milles ou dix milles ans Alysson j'attendrai" la voix chaleureuse d'Evan me revint en mémoire. Comment pouvait-il m'aimer ? Pourquoi m'aimait-il à ce point moi qui ne fait que le rejeter ?

-"tu es une belle personne ! Tu es la personne la plus forte que je n'ai jamais rencontré" encore une fois je fus anéantie à ces mots, je ne comprendrai jamais ce qu'est l'amour pourtant lorsque j'étais avec lui la douleur se retrouvait amoindrie. Evan...peut-être était-il mon pansement...

Bonjour, bonjour. Alors comment allez-vous ? Comme vous avez pu le voir ce chapitre se concentre sur le ressenti d'Alysson en tant que personne fondamentalement blessée par la vie et maudissant son existence mais qui pourtant au fond d'elle-même n'est pas aussi insensible. En fait elle utilise la danse comme échappatoire. J'espère sincèrement que ce chapitre ait pu vous plaire. N'hésitez pas à me le dire.

Une dangereuse attiranceOù les histoires vivent. Découvrez maintenant