Une dangereuse attirance

Chapitre 3 : Savannah

-« alors ce fameux entretien ? Il y a deux possibilités : soit je sors l'alcool pour fêter ou alors je sors l'alcool pour noyer ton chagrin ? Dans les deux cas, nous allons finir bourrées et hystériques »

La voix joueuse d'Alysson me décroche un petit sourire au coin des lèvres. Elle brandit devant elle, une bouteille de vin et deux verres puis prend place sur le canapé, étendant ses jambes sur la table et envoyant valser mon sac à l'autre bout de la pièce.

-« je crois que nous allons nous contenter de fêter ce soir, j'ai eu le job » je lui annonce dans un éclat de rire, me saisissant avec grand plaisir du verre de vin quasi plein qu'elle me tend.

-« je suis fière de toi, je savais que tu en étais capable Savannah. Toutes ces années à l'université auront servi à quelque chose » fait-elle remarquer en portant le vin à ses lèvres.

Alysson a vingt-et-un ans mais elle boit déjà comme un trou, je n'ai jamais rencontré quelqu'un qui tienne autant l'alcool, elle peut boire une bouteille entière et avoir l'air de n'en avoir bu que deux ou trois verres. Je ne sais pas trop d'où ça lui vient mais quelques fois je l'envie, moi, qui généralement au bout du troisième éprouve le besoin de partager ma voix avec le reste du monde, au bout du cinquième, je suppose que j'ai envie de me déshabiller. C'est un véritable carnage.

-« je sais ce que tu penses des études supérieures, n'empêche je pense que c'est bon d'avoir un bagage sous la main » je lui réponds le plus sérieusement du monde. Je l'entends soupirer.

-« je sais mais je pense tout de même que la valeur d'une personne n'est pas déterminée par les études qu'elle fait » elle m'explique en se servant un deuxième verre. Surprise qu'elle ait ingurgité le contenu de son verre en si peu de temps, je reporte mon attention vers le mien, il n'a presque pas bougé.

-« parle moi plutôt de ton patron » enchaine-t-elle afin de changer de sujet.

Je lui souris, quelque peu hésitante à lui raconter la bourde monumentale que j'ai commise à la fin, si elle apprenait ce que j'ai dit à mon patron, elle me prendrait dans ses bras en récitant des chants de victoire. Alysson n'a jamais été de celles à être impressionnée par un homme, surtout pas lorsqu'il se dégage de lui une arrogance presque surréaliste et un charisme naturel, elle est du genre à dévorer ses adversaires, à ne rien laisser aux pauvres charognes affamées qui auraient attendu qu'elle se retire. Et elle déteste les hommes, les mettant tous dans le même sac, parfois je me dis même qu'elle n'aime personne.

Elle m'a toujours trouvé un peu molle, frôlant parfois l'ennui, elle ne l'a jamais caché mais elle m'a toujours encouragé à prendre plus d'initiatives, à me rebeller contre les codes de notre société, à cracher tout le venin que je possède, enfoui en moi, à me battre, à insulter mais je n'ai jamais eu les tripes de provoquer une personne sans qu'elle ne m'ait rien fait. La bourde avec David, je la dois à Alysson et son mauvais caractère qui commence à détonner sur moi.

-« mon patron est l'incarnation de tout ce que tu détestes, il est beau, arrogant et sûr de lui » je l'informe en soupirant.

Elle grimace puis reporte son attention vers moi. Ses yeux me déstabilisent, brillants mais vides à la fois, il se reflète en eux toutes les émotions destructrices qui auraient déjà abattu le plus fort des hommes, terrassé les cœurs les plus solides, pourtant la voila, en vie, en face de moi à s'occuper de futilités comme l'apparence de mon nouveau patron.

-« le fameux trio gagnant. S'il t'embête, tu n'auras qu'à viser l'entre-jambes, pour ce genre d'hommes, ça compte plus que leurs comptes en banque »

J'éclate de rire.

-« je sais que tu seras là pour me défendre » je plaisante en me resservant un nouveau verre de vin. Dans ses yeux, je voix un éclat se raviver, une flamme. J'en reste fascinée, comment peut-on avoir une telle aura ? J'aurai juré que parfois, je voyais en elle une guerrière tout droit sortie des flammes, prête à maudire le monde, munie d'une volonté d'acier.