20.1 Camilla

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   "Camilla."

   Ma tante. Au passage, l'ex-femme de mon pire ennemi. Enfin, pire ennemi... J'allais peut-être devoir réviser cette interpellation à notre retour.

   Je levai le regard vers Lucasha pour tenter de confirmer mes hypothèses, mais je ne pus croiser que deux prunelles vides. Il avait l'expression d'un homme qui venait de perdre une partie de lui.

   Fragile.

   À cet instant, l'homme le plus terrifiant que j'avais rencontré me semblait fragile. Et je n’y étais vraiment pas préparée.

   Quelqu'un vint ramasser le corps de Stacey et je pinçai les lèvres en me demandant comment j'allais l'annoncer à Adrian. "Hey frérot, on a survécu, mais j'ai buté ta meuf. Tu me pardonnes ?", bien sûr que non.

   J'ignorais déjà si j'allais pouvoir quitter ces murs, alors penser à ce que j'allais pouvoir raconter à mon frère en rentrant... C'était un peu prétentieux.

   Une silhouette apparut alors d’une autre cloison et retins mon souffle en la reconnaissant. La femme de la forêt. C'était elle. C’était comme si notre rencontre datait d’un siècle ; il s’était passé tant de choses depuis !

   Ma lucidité ayant détalé depuis bien longtemps, la seule chose que je retins de ce jour-là étaient ses insinuations. Celles que Miller était un moins que rien et que j’en suivais le chemin.

   À sa simple vue, une boule de colère se forma dans ma gorge.

   J'avais les mains tachées de sang - et les pieds aussi, tout ça à cause de cette famille de grands détraqués. Dire que je rêvais d’en avoir une ! Grossière erreur.

   Camilla chassa une mèche de ses cheveux avant de m'offrir un sourire partagé entre satisfaction et sadisme. Cette fois, j'étais vraiment au bord d'un gouffre sans fond qui menaçait de m'engloutir toute entière.

- Bien, finissons-en, ça commence à devenir long, trancha-t-elle alors que je l'observais d'un œil méfiant.

   Elle avait un visage similaire à celui de mon père : les mêmes lèvres, la même expression autoritaire... Ses yeux d'un bleu pastel étaient aussi froids que la glace.

   Ce qui m’horrifia fut le constat qui s’en dégagea lorsque je la comparais à ma mère ; cette femme n'était pas devenue un monstre par obligation. Elle était devenue le monstre qu'elle avait souhaité devenir. Elle avait tout à fait conscience des horreurs qu'elle perpétrait et c’était d’autant plus grave.

  Je me replaçai en position de défense et attendis qu'elle fasse le premier pas. Premier pas qui ne se fit pas tarder.

  Elle forma une boule d'eau entre ses mains, un liquide transparent dont les particules s'agitaient furieusement. Je détestais l'eau depuis ma tendre enfance et pourtant, ce n'était pas faute d'avoir essayé.

  J’avais vécu à la côte d’azur, mon père était prof de surf… Seule ombre au tableau, les réactions de mon corps dès que j'entrais en contact avec ce liquide lourd et froid. Je n'aimais pas l'espèce de prison aqueuse qu'il créait autour de moi.

   Être porté par l'eau n'était pas agréable comme beaucoup le prétendait. C'était opressant et je préférais de très loin la chaleur réconfortante du sable.

   Sans un mot, elle balança la boule d'eau en l'air. Je ne pus m'empêcher de la suivre des yeux tout en surveillant la brune de temps en temps. La sphère finit par exploser et je dus couvrir mes yeux pour m’abriter des gouttes. Elles se répandirent un peu partout autour de nous en pluie diluvienne.

Anges, Démons, et puis quoi encore ? {TERMINÉE}Où les histoires vivent. Découvrez maintenant