La nuit finit par tomber sur l'assemblée. Searlait et Luce parlaient d'une congrégation de femmes serpents, au Nord du Canada, dans une zone si glacée qu'aucun être vivant n'osait s'y installer.
Lucasha avait décidé d'entamer des négociations avec ces dernières mais je n'avais pas tout suivi. Avec toute l'énergie magique que j'avais dépensée aujourd'hui, il fallait que je calcule quand prendre mes heures de sommeil pour optimiser ma nuit...
Et puis aussi pour rester éveillée. J'étais comme un téléphone portable à cet instant. En mode économie de batterie.
La soirée se termina sur le départ d'Adrian et Miller qui voulaient discuter un peu autour d'un verre. Kugora papotait lui aussi avec les filles et Yahid de la trahison de la famille d'Abigaël... Sur ce, j'avais pris congé et étais montée.
Comme je n'avais plus de chambre et que les sorcières ne m'avaient pas rendu la mienne, je me rendis dans le bureau de Lucasha, ma foi un peu gênée. Je l'aurais sûrement été aussi s'il était venu squatter ma chambre.
C'était comme si j'avais pénétré son intimité, alors même que des centaines de filles avaient dû y entrer sans aucun remords. Je pris une grande inspiration et m'installai dans un fauteuil. Une petite lampe se trouvait à mes côtés.
Le bureau était en soit une pièce comme les autres. Une tapisserie bleu pastel recouvrait les murs, ainsi que diverses armoires et commodes bourrées d'objets.
De larges fenêtres donnaient sur la rue, contrairement aux miennes qui ne montraient que la vaste clarté du jardin enneigé.
Je m'installai en tailleurs sur le cuir confortable et fermai les yeux. Dans le livre, il était dit que ce sort nécessitait une profonde concentration.
Pour cela, je devais me plonger dans un état méditatif. Pas bien compliqué pour une personne comme moi. J'avais quand même été vivre deux mois au Tibet pour cette raison précise ! Cela allait même me faire du bien, de pouvoir recentrer mon énergie.
Tout d'abord, je me concentrai sur un paysage qui me détendait. Je revis la douceur des pics, éclairés par un soleil puissant qui brûlait la peau et asséchait les lèvres.
Mon souffle se calma et je laissai l'image s'effacer, ne portant d'importance qu'à ma respiration. Son rythme baissa encore et bientôt, je n'entendis plus rien. Ne voyais plus rien. Ne sentais plus rien.
Dans cet état de plénitude, je profitai de l'isolement que me procurait cette transe. Au bout d'un temps qu'il me fut impossible à déterminer, j'ouvris les yeux sur un bureau illuminé. Yahid dormait à poings fermés en face de moi, personne ne parlait, pourtant le retour à la réalité fut difficile.
S'acclimater à la renaissance de tous ses sens était un exercice plus difficile que de les perdre.
Mes yeux papillonnèrent devant le calme imperturbable de mon esprit. La pièce aurait pu être en feu, je ne l'aurais même pas remarqué. J'attrapai le livre et observai la page gribouillée de noir. Mon esprit se concentra sur la phrase dessous et mes lèvres se décollèrent avant de prononcer distinctement :
- La pluie de Lune arrose la terre. Tombent les larmes du ciel comme les feuilles sur la neige.
Mes mains se levèrent au ciel alors qu'autour de nous, une pluie de lumière s'abattait sur la pièce. Le livre disait qu'elle était censée brûler tout ce qu'elle touchait, pourtant ce ne fut pas le cas.
A la place, elle enveloppa tout ce qui passait par-là d'un voile semi-transparent qui luisait tel un diamant. On aurait cru que le bureau tout entier était couvert de cristaux de givre.
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Anges, Démons, et puis quoi encore ? {TERMINÉE}
ParanormalJ'étais pure et innocente, perdue dans un monde trop lisse et régulier pour moi. Je m'y sentais prisonnière, enfermée, suffoquant jour et nuit en quête d'une brève inspiration. Dorénavant, je suis perdue dans un dédale de complots, de congrégations...