J'attendis de ne plus rien entendre pour oser sortir. Je trottinai alors vers la cellule de Lucasha et arrivai devant une porte close. Mes muscles étaient gorgés d'adrénaline et j'eus beaucoup de mal à contrôler mes tremblements.
On aurait dit une étudiante shootée au café qui ne contrôlait plus les sursauts de son corps. Je finis par parvenir à entrer, avant de faire face à un Lucasha complètement nu.
Bordel. Ça, c'était pas prévu.
Attaché par les poignets à une barre en bois, il semblait épuisé ; comme si on lui avait retiré absolument toutes ses forces. Le bas de son corps ne semblait plus capable de le soutenir. S'il restait debout, c'était uniquement grâce aux liens qui maintenaient ses bras au dessus de sa tête.
Ses paupières furent trop faibles pour se soulever, mais il esquissa une sorte de mouvement dans ma direction. Il devait se demander qui pouvait bien lui rendre visite après le départ précipité d'Althéa...
Je m'approchai en prenant garde à ne pas l'effrayer et me raclai la gorge. Une fois face à lui, je passai une main sur son visage pour en chasser les mèches collées à son front.
La sueur et le sang se confondaient sur sa peau et je me débarrassai de mon gilet pour m'en servir comme d'une éponge. L'humidité m'attaqua instantanément et rendit mon corps mou comme du beurre fondu.
J'étais transie de peur. Toutefois, quelque chose que je comprenais mal venait de naître en moi.
Mes doigts relevèrent son visage et comme par instinct, je fis un geste avec mes mains. Mes doigts s'étaient comme emboîtés afin d'invoquer quelque chose.
Une intense force sembla émaner de chaque parcelle de mon corps. Je reportai mon attention sur Lucasha, dont la fatigue se lisait sur chacun de ses traits. J'analysai sans aucun mal ce qui se passait sous sa peau si rudement abîmée, surprise et à la fois concentrée sur mes gestes.
Il avait six côtes cassées, je les voyais briller sous son épiderme comme si elles m'appelaient. Son sternum avait sans doute aussi été fracturé. Une de ses vertèbres s'était déplacée, d'autant que ses épaules avaient été volontairement désaxées. Son genou droit ne pouvait plus se plier car divers ligaments avaient été sectionnés.
Ne parlons même pas de son tibia gauche...
Quelqu'un, ou plutôt quelque chose - car rien d'humain n'aurait été suffisamment ignoble et atroce pour pratiquer de telles horreurs -, avait soigneusement coupé la peau du nephilim afin de mettre son os à vif. Il semblait qu'avec une lame, on s'était amusé à dessiner sur son ossature.
La plaie n'avait pas cautérisé et du sang en ressortait encore. Il formait d'épaisses bulles qui finissaient par éclater et coulaient le long de sa cheville. Une énorme flaque qui s'était formée sous ses pieds. Je serrai les dents face à ce spectacle macabre qui me fit tressaillir et retint une remontée d'acide qui me brûla l'oesophage.
Mes doigts se posèrent sur les points qui vibraient et appelaient à ce que je les touche. De ces endroits lumineux jaillirent des fils qui me connectèrent à son organisme. Comme pour Adrian, je fus forcée de partager sa souffrance le temps d'agir et cette fois, ce fut bien plus éprouvant.
Cela dit, je devais remercier Adrian de m'avoir forcée à m'entraîner hier - sur le coup, je trouvais qu'il était un peu pressant. Je comprenais maintenant que s'il ne m'avait pas demandé de reconstruire ses doigts, j'aurais été incapable d'aider Lucasha aujourd'hui.
Désormais, je saisissais l'urgence de la vie à Castle Down ; il fallait que je profite d'absolument chaque seconde pour devenir encore et toujours meilleure. Rater une seule petite opportunité pouvait coûter cher.
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Anges, Démons, et puis quoi encore ? {TERMINÉE}
ÜbernatürlichesJ'étais pure et innocente, perdue dans un monde trop lisse et régulier pour moi. Je m'y sentais prisonnière, enfermée, suffoquant jour et nuit en quête d'une brève inspiration. Dorénavant, je suis perdue dans un dédale de complots, de congrégations...