9 Décembre, J-16 avant Noël.

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  J'eus beaucoup de mal à trouver le sommeil. Une partie de moi voulait se rappeler la magnifique journée que j'avais vécu, mais l'autre voulait me maintenir éveiller pour chercher une solution à notre histoire de logement. J'avais lu la lettre d'expulsion, et je me demande encore si il a vraiment le droit de faire ça le propriétaire, mais nous devons être partis avant le 15 décembre au plus tard de notre petit chez nous. Il fallait qu'on trouve une solution en quatrième vitesse, en écartant le plus possible la rue. Nous pouvions à la rigueur envisager d'aller dans un hôtel quelques jours le temps de trouver un toit.
J'attrapais mon téléphone : deux heures vingt-sept. J'avais besoin de parler à quelqu'un, et la dernière personne à qui j'ai envoyé un message, c'est John. Je pense que Trice dort comme une masse et je ne  vais pas l'ennuyer avec mes petits problèmes, d'autant qu'elle a assez à faire avec son petit garçon. Non la seule personne qui peut me comprendre, c'est bien mon garde du corps.

→ Can call U ? lui envoyai-je.(traduction de « Je peux t'appeler? » en anglais avec une abréviation pour le « you ».)

Dans les secondes qui suivirent l'envoi, mon téléphone se mit à vibrer, réveillant par la même occasion mon chat blottit contre moi.

— Mais tu ne dors jamais dis-moi ? Demandai-je sur le ton de l'humour en décrochant.
— Rarement à cette heure-ci, répondit-il sur le même humour. Tout va bien Léa ? Je soupirais.
— Non, lâchai-je simplement en m'allongeant sur mon lit. Tout va trop vite, beaucoup trop vite. Je ne contrôle plus rien du tout.
— Parfois la clé du bonheur est le fait d'accepter qu'on ne contrôle pas tout.
— J'aimerais t'y voir toi, je passe du stade de serveuse dans un petit café de rue, à étudiante en bonnes manières et en valse, m'énervai-je. Désolé, j'aurais pas dû t'appeler.
— Non attends, il se passe quelque chose, dis-le moi. Je remarquais qu'il ne m'avait pas vouvoyer avant qu'il ajoute : Tu as été heureuse toute la journée, et même quand je t'ai ramené, tu avais l'esprit totalement dans les nuages avec ce sourire béat scotché aux lèvres. Et là tu es sur les nerfs à limite me dire que tu veux tout arrêter.
— Je...Je suis désolée. Ce genre de vie n'est pas fait pour moi.
— Léa, qu'y a-t-il ? Insista-t-il fermement. Tu n'es pas le genre de fille à baisser les bras aussi facilement.
— Parce que tu as connue beaucoup de filles ? Tentai-je pour détendre l'atmosphère en vain. Je poussais un long soupir. Mon frère et moi sommes expulsés de notre appartement parce nous avons des loyers en retard. On se retrouve à la rue.

Un long silence me mit mal à l'aise et les paroles de John résonnaient dans ma tête. Il croyait en moi, ça se sentait. En y repensant Catherine a sûrement raison sur quelques points. Mais là n'est pas la question. Je tentais un « âllo », pour compléter ce vide silencieux.

— Il a pas le droit. Dit-il simplement.
— Visiblement si, répondis-je tout aussi platement.
— Mais tu n'es pas à la rue. Tu as toute une demeure pour toi sur ton acte d'héritage.
— Eh minute papillon, j'ai encore rien signée ! Pour l'instant je ne suis héritière de rien du tout et rien ne m'appartient.
— Détrompe-toi ma belle. Me coupa-t-il. Son testament est déjà rédigé depuis des mois et ton nom y figure très clairement. Tout est déjà à toi. Posa-t-il sûr de lui.
— Oui mais...
— Mais quoi ?!
— Je vais quand même pas débarquer avec mon frère, mon chat et mes affaires comme ça.
— Et pourquoi pas ?

Il me proposa alors dès demain de venir me chercher pour que j'aille demander à Monsieur Georges un toit. Il m'a sorti ces arguments en béton, du style « Tu finiras par vivre là de toute façon » ou encore « Vaut mieux que tu viennes ici, ça sera plus facile pour tes cours ». Je déclinais son offre de venir me chercher prétextant que je travaillais au café. Oui parce que bon je dois aussi gérer cela, mon travail. Même si, comme l'a si bien souligné John, je n'en ai plus pour très longtemps à servir des cafés.

L'héritière de Noël - Avent 2018Où les histoires vivent. Découvrez maintenant