21 Décembre, J-4 avant Noël.

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  J'attendais dans ma chambre le moment opportun pour descendre dans la salle de réception. Aujourd'hui, ce soir, serait un grand jour. Le jour où le monde va découvrir l'héritière qui succède à Georges de Cambraway. Je stresse, beaucoup, trop. J'ai les mains moites dans mes gants en satin blanc. Je m'admire une dernière fois dans le grand miroir de ma chambre : ma robe bleue nuit est resplendissante et je ne réalise pas que c'est moi qui la porte. Mes cheveux sont coiffées d'un chignon avec quelques mèches qui retombent sur mes épaules. Ce soir est mon soir, celui où je serais sacré Reine à la tête d'une immense fortune. J'ai l'impression que je participe à l'élection de Miss Monde, que je serais la grande gagnante et que l'on me couronnera ce soir.
Je m'approche de ma fenêtre et je devine les phares de nombreuses voitures dans la cour au vue de toute la lumière qui se répand dans le jardin. La plus part des invités sont constitués de journalistes venant de tout le pays ainsi que de nombreuses grandes têtes de la haute société. Tout ça pour moi.

— Léa, tu es prête ? Me demanda Will en entrant dans ma chambre.

Ce dernier était élégamment habillé d'un costume hors de prix. Il le portait à merveille. Je hochais la tête négativement. Non je ne suis pas prête à me mêler à toute cette foule, à voir tous les journalistes qui me posent des milliards de questions et ces dizaines de flashs rivés sur moi, non je ne suis absolument pas prête.

— Léa, tout va très bien se passer, je t'assure.
— Je sais, mais j'ai...peur.
— Tu n'as pas à avoir peur, je suis près de toi, je serais jusqu'au bout à tes côtés.

Il me prit dans ses bras. Sa chaleur me réconforta et son nouveau parfum Hugo Boss me chatouilla les narines. Je m'enivrais, comme si je voulais me droguer et ne plus le souvenir que je stressais pour mon entrée. Il me chuchota à mon oreille qu'il était fière de moi, de ce que j'étais devenue malgré toutes les épreuves que nous avons vécus.

— Il est temps d'y aller Eléanore, indiqua Catherine à l'entrée de ma chambre, vêtue d'une magnifique robe bordeaux droite.
— J'arrive tout de suite, une petite minute. Lançai-je à son attention. Rejoins les autres Will, on se retrouve à la soirée, je vais y arriver.

Ce dernier m'encouragea avec notre tcheck de la victoire. Il me donna courage et m'informa que Trice, et Jingle l'attendrait en bas du grand escalier. Je souris et fut encore plus encouragée.

— Vous êtes la dernière à arriver dans la salle, le domestique annoncera votre arrivée. A cet instant, vous prononcerez votre vœu solennel d'honorer le nom des Cambraway.
— D'accord.
— Vous êtes magnifique, et vous allez y arriver ! Surtout n'oubliez pas bonnes manières !

Nous traversions les couloirs de la demeure pendant qu'elle m'expliquait le déroulement de la soirée. Devant la porte de la salle, elle m'embrassa le front délicatement sans trop poser ses lèvres pour éviter de me laisser une marque de rouge à lèvres puis elle me laissa près de la porte et entra seule dans la salle de réception. Je pris une grande inspiration, j'ajustais mon petit diadème pour la millième fois de la soirée, et j'entrais enfin dans la salle.

— Mademoiselle Eléanore de Cambraway, annonça le domestique en charge.

Je me sentis véritablement princesse, comme dans les films de Sissi ! J'avançais doucement jusqu'au milieu du grand escalier sous un tonnerre d'applaudissement. Un long silence s'installa dans la grande salle. Les cliquetis et les flashs des appareils photos fusaient dans tous les sens. Je me forçais de sourire et de paraitre naturel, mais j'étais paralysée par le stress. Je balayais la salle du regard dans une petite crise de panique à la recherche de Will, Trice, John et Catherine. Enfin dans mon viseur, je me détendis, pris une grande inspiration pour me lancer dans mon discours d'honneur.

— Je m'appelle Eléanore. Je suis... je m'arrêtais.

Je pris une nouvelle inspiration. Le stress me submerge, et de nombreuses images défilent sous mes yeux. Je revoyais des tonnes de souvenirs. Au final je changeais mon discours initial et j'improvisais.

— Je suis une fille comme tout le monde, j'ai des sentiments, des émotions. J'ai des passions. Je peux être naïve comme je peux être forte. J'ai été choisie avec ou sans l'aide du destin, par Georges de Cambraway pour reprendre sa fortune, expliquai-je lentement. Je jure ainsi solennellement d'honorer son nom, celui des Cambraway et de le porter en toute occasion. Il ne s'éteindra pas avec Monsieur Georges et vivra encore aussi longtemps qu'il le peut. J'ajoute que j'userais de cette fortune à bon escient et que je viendrais en aide aux plus démunis, ajoutai-je. Je déclare à présent le bal ouvert !

Un nouveau tonnerre d'applaudissement s'éleva dans la grande salle, je poussais alors un long soupir de soulagement. Je descendais doucement les marches pour rejoindre mes amies et mon frère. Ce dernier tenait Jingle dans les bras et je m'empressais de saluer mon animal. Trice me prit dans ses bras en me félicitant d'être devenu une princesse parfaite ! John repoussait les journalistes en indiquant qu'une conférence de presse serait organisée dans quelques jours et que ce soir je ne répondrais à aucune question.
Alors que je m'étais mêlée un peu à la foule, au milieu de grandes têtes du pays, je discutais avec un duc de je ne sais quel coin du pays, on m'interpella de façon plutôt inattendu. Mon sang ne fit qu'un tour et un frisson se déclencha dans toute ma colonne vertébrale.

— Léa ? Ou devrai-je dire Eléanore de Cambraway ?
— Nathan ? M'étonnai-je, Mais qu'est-ce que... m'arrêtai-je.
— Eléanore, tout va bien ? Tu es pâle, me demanda Catherine. Oh Monsieur Limbleton, je ne m'attendais pas à vous voir ici.
— Dame Catherine, je suis tout aussi ravi que vous, fit-il en la saluant avec la tête. Elle sourit en guise de réponse.
— Eléanore, j'aimerais te présenter quelqu'un.
— Euh... oui j'arrive dans une seconde, ajoutai-je.

Catherine s'éloigna tout sourire. Et puis, de mon côté je me retrouve dans un moment très malaisant. Je ne sais pas quoi dire, pourtant il faut que j'ouvre la bouche. Léa, dit quelque chose ! Je fixai le sol et je remontais rapidement les yeux vers le visage de Nathan. Il était bien apprêté dans un costume gris sombre et une cravate bleu magnifique.

— Effectivement, vous n'êtes pas celle que je croyais.
— Je suis désolée. Lâchai-je. Je voulais vous l'annoncer mais...
— Je comprends, ce n'est pas quelque chose de facile à annoncer surtout à un inconnu comme moi.
— Je... je devrais y aller, Catherine va m'attendre, veuillez m'excuser Monsieur Limbleton, fis-je.
— Attendez, me retint-il par le poignet, me forçant à lui faire face en guise de respect, j'espère que vous m'accorderez une danse dans la soirée. Exposa-t-il en me faisant un baisemain.
— Bien sûr.

Oh mon dieu. Je rêve ? Le gars qui se balade en moto, qui passait quatre fois par semaine en prenant un latté au chocolat, et sur qui j'ai renversé mon café il y a dix jours, qui m'a invité au haras et m'a embrassé est en fait une grande tête du pays, richissime ! Je m'en remets pas. Je comprends à présent mieux pourquoi il avait toujours des lunettes de soleil. Je dois tout de même avouer qu'il porte bien le costume et qu'il dégage un sacré style.

Je passais entre la foule, interpellée par beaucoup de grandes personnalités. Je rencontrais des acteurs, des chanteurs également mais aussi des hommes politiques et des fortunés du pays. Je ne me sentais pas à ma place, mais Catherine arrivait à m'en dissuader et je me mettais à l'aise. J'annonçais enfin que j'entamais les danses avec mon frère. J'ignorais d'ailleurs que mon frère savait aussi bien danser la valse. Lors d'une danse avec un changement de cavalier, je me retrouvais avec Nathan. Je fus prise d'une petite crise de panique et j'espérais dans mon fort intérieur que je ne lui écraserais pas les pieds ! Cet homme me fascine : il danse magnifiquement bien et m'a rapidement mise en confiance.

— J'espère que le fait vous appreniez ma véritable identité, ne changera rien entre nous, essayai-je.
— Non je vous assure, vous restez la petite Léa que j'ai embrassé au milieu d'une carrière. Fit-il. J'ose espérer que nous pourrons monter à cheval ensemble, puisqu'il me semble que Monsieur Georges possède des chevaux au haras.
— Effectivement ! Ça serait avec plaisir.

Je me noyais dans ses yeux sans penser à la moindre chose négative. J'étais bien, réconfortée et apaisée sur cet air de valse, dans les bras d'un bel homme qui étrangement me faisait quelque chose...

L'héritière de Noël - Avent 2018Où les histoires vivent. Découvrez maintenant