Chapitre quarante.

1.1K 116 12
                                    

Chapitre corrigé en 2020 / publié en 2018

Le jeune garçon me sourit pour me redonner confiance, et prendre ma main pour écrire dans ma paume avec son index. Je découvre qu'il est gaucher... ou plutôt je le vois seulement maintenant.

-« Pour...quoi êtes v.... »

Doucement, je répète ce que Tsukumo écrit pour être certain de bien comprendre le message qu'il veut me faire passer. Je fais attention à chaque geste de son doigt, chaque trait et cercle qu'il fait pour reconnaître les lettres et les mots.

- « Pourquoi êtes vous triste » ? Répétais-je.

Il lève son regard doré sur moi, un air inquiet. Puis il continue d'écrire pour ajouter :

« Est-ce que je n'ai pas été à la hauteur de vos... espérances » ?

-Quoi !? M'énervé-je. Ce n'est pas ça du tout !

Tsukumo se contente de me fixer, je réalise qu'il ne peut pas m'entendre. Alors je décide de faire comme lui et d'écrire sur sa paume pour communiquer directement. Je dois apprendre à me canaliser et ne pas partir dans les tons pour la moindre chose, ou sinon ça ne marchera jamais entre nous. Mais je suis à fleur de peau, je viens de perdre mes parents et Tsukumo est encore blessé. Je ne suis pas totalement détendu même si le temps d'une étreinte, j'ai pu tout oublier.

« Ce n'est pas ça, Tsukumo. J'ai peur que tu prennes peur, que tu me détestes et me délaisses. Tu as été merveilleux, je t'en conjure, ne croies pas le contraire » !

Je baisse la tête quand il se met à fondre de rire, incapable de se contrôler. Je crois que c'est bien la première fois qu'il rit autant. Il ne peut plus s'arrêter, au point où ses reins le brûlent quand sa voix se fait plus forte. Je le regarde sans comprendre d'où lui vient un tel élan de spontanéité après ce que je lui ai fait. Son corps porte les traces de ce que nous venons de faire. Tsukumo m'a légèrement griffé, et encore. Ces n'est tellement pas grand-chose à côté de ce que je lui ai fait.

« C'est pour ça que vous êtes triste » ? Demande-t-il par écrit.

- Tu ne te rends pas compte de...

Je finis par glisser mon doigt sur sa paume pour poursuivre notre conversation.

« Je me suis acharné sur toi, tout ça parce que j'étais perdu, tu ne méritais pas ça, je... »

Tsukumo continue d'écrire et de rire, ne m'en voulant pas du tout pour mon comportement. Alors qu'il continue de communiquer avec moi par le toucher, je passe mes bras autour de son cou pour le serrer contre moi, et lui murmure tout mon amour au creux de son oreille. Je fonds en larme dans ses bras alors qu'il m'enlace tendrement pour me réconforter. Tsukumo ne bouge pas un seul instant pour me prêter son épaule. Je relâche toute la pression que j'ai accumulé. Mais aussi ma tristesse et ma rage à travers ces pleurs.

Et dehors, la vie reprend son cours. En ces jours après Noël, la neige tombe de nouveau sur Ibn Fadhan, recouvrant le royaume que nos parents ont tant chéri et qu'ils nous ont confié.

Alors ma décision est prise, je vais porter cette couronne et faire honneur à mes parents. Honorer leur mémoire pour qu'une telle tragédie ne se reproduise plus. Et j'espère que Tsukumo me suivra dans cette démarche car seul, je n'y arriverai pas. Il est temps pour moi d'avoir une vraie discussion avec lui, mais aussi notre famille.

***

Petit à petit, nous nous remettons de nos blessures. Tsukumo porte encore quelques traces mais elles sont sur le point de disparaitre. Mon jeune servant n'hésite pas à m'apporter son aide. Notre relation n'a pas changé. Il est toujours aussi serviable et discret, mais plus proche de moi. Tsukumo accepte notre relation d'amants, mais c'est difficile de parler de sexualité avec lui. Je ne sais jamais comment aborder le sujet depuis notre première fois. Mais tant qu'il reste à mes cotés, le reste n'a plus d'importance. Je sais que dans cette douloureuse épreuve, j'ai son soutien le plus précieux du monde.

Je sais qu'à ses côtés, je suis un autre homme. Ce garçon si innocent m'a changé, et fait comprendre à quel point l'amour est beau. Je comprends maintenant le sacrifice de ma mère, et la mort de mon père que petit à petit, j'accepte. De tout en haut, ils veillent sur nous.

Je suis enfin prêt à faire part de ma décision. Je demande aux hommes de mon père de réunir toute la famille, y compris Ridzac et Loïck pour leur annoncer ma décision.

Et derrière moi, Tsukumo me suit sans se douter de quoique ce soit.

ARANAËL ET LE GARÇON AUX CHEVEUX BLANCSOù les histoires vivent. Découvrez maintenant