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Au cours des jours qui suivirent, le jeune homme se concentra davantage sur l'administration de son fief, mais redoublait également d'attention vis à vis de la femme qui attendrissait tant son cœur. Il avait l'impression désagréable d'être toujours absolument niais dans toutes ses décisions, mais cela lui importait peu finalement, puisque la voir sourire de nouveau rendait son être plus serein et plus détaché des petits tracas quotidiens. De plus, il avait le sentiment qu'elle commençait à s'ouvrir lentement à lui, et même si elle grognait toujours lorsqu'il avait l'occasion de lui voler un baiser, il sentait bien qu'elle n'était plus aussi réticente qu'avant et qu'elle en venait même à apprécier leurs quelques petits instants partagés.

Il surprenait parfois quelques conversations entre les servantes qui se demandaient quand-est ce que leur sire comptait demander la splendide créature en mariage. Guillaume devinait que son amour pour elle était plus que flagrant, aussi il se doutait que des rumeurs avaient dû être colportées dans tout son domaine. L'idée d'une réception avec des nobles voisins lui effleura l'esprit. Il pourrait ainsi présenter sa future fiancée au beau monde et montrer à tous qu'elle était sienne. En outre, il devait aussi penser à la présenter aux différents villages qui étaient sous sa coupe, mais il ne doutait pas que la jolie demoiselle serait acceptée par tous pour sa clarté d'esprit et son tempérament qui ne suscitait qu'admiration. Le seul petit problème était de savoir si elle accepterait de l'épouser. Cette mission risquait de devenir une autre paire de manche aux vues du caractère déterminé et bien trempé de la demoiselle plutôt du genre compliqué à convaincre.

Soudain une idée traversa l'esprit du jeune homme qui s'empressa de se lever et de se diriger hors de son bureau. Déambulant le long des différents couloirs du château, il ignora le regard curieux de ses serfs croisant son passage et pressa le pas en reconnaissant le lieu de sa destination. Devant lui, une immense porte en bois lourd, sombre et sculpté se dressait et barrait l'accès à une pièce dont seul le châtelain possédait la clé. Sortant de l'une des poches de son vêtement une grosse clef en fer forgé, il ne perdit pas de temps avant d'introduire celle-ci dans la serrure et d'ouvrir l'entrave vers son but ultime. Saisissant la torche la plus proche ainsi qu'une pierre à feu laissée là, il alluma le flambeau pour apporter un brin de clarté dans le couloir obscure qu'il comptait emprunter. Une fois chose faite, il s'engouffra dans la pénombre devant lui tout en prenant soin de refermer la lourde porte après être passé.

Au bout du corridor se trouvait une pièce que Guillaume s'empressa d'illuminer de la flamme impétueuse qu'il portait. Il s'arrêta un instant pour observer les pierres abîmées par la morsure du temps, avant de se remettre en quête de son objectif. Son périple le mena au pieds d'une sculpture, une femme magnifique drapée dans des tissus tout aussi somptueux. Il s'agissait en réalité de la mère du jeune homme, précédente châtelaine qui avait gouverné avec son père, le fief qui lui appartenait aujourd'hui. La statue avait été réalisée par le père de Guillaume, après la mort de sa tendre et chère épouse. Dans ses mains, la Dame de pierre tenait une cassette en bois, finement ciselée et décorée avec minutie. S'emparant de l'objet, le grand brun vérifia son contenu avant d'esquisser un sourire satisfait, puis il s'empressa de quitter cette salle qui n'était autre que la trésorerie du château. Avant de fermer la porte de la pièce quasiment secrète, il lança un regard indéfinissable à la statue au creux du vieux mur. Il sourit dans le vide, puis s'engagea sur le chemin du retour, le coffret dans la main, une personne à quérir en tête.

***

Natacha bailla à s'en décrocher la mâchoire alors qu'Agathe lui donnait quelques conseils pour les travaux d'aiguilles qu'elle lui enseignait. Si la jolie blondinette était minutieuse dans ses travaux de peinture, la couture et la broderie étaient de loin sa plus grande hantise. Elle ne parvenait pas à se concentrer sur son ouvrage, au grand désespoir de sa jeune servante qui fondait pourtant beaucoup d'espoir en sa maitresse. Au souvenir cher de sa passion pour les arts, la demoiselle demanda si le château possédait de la peinture et des pinceaux.

Le Temps Des Sortilèges - Tome 1- Dame BlancheOù les histoires vivent. Découvrez maintenant