Le Temps Des Sortilèges - Tome 1- Dame Blanche

XXXIII

Gabriell avait prit place sur l'épaule de sa protégée, et secouait gracieusement ses plumes immaculées tout en observant l'Assemblée. Blanche capta par ailleurs le regard de connivence que son amie ailée envoya au milan noir, perché sur l'épaule du géant brun. Elle croisa, sans le vouloir, le regard de celui-ci et tourna vivement la tête en se souvenant du compliment à peine dissimulé que celui-ci lui avait fait, quelques instants plus tôt. Elle eut peur de se trahir rien qu'en plongeant dans ses prunelles anthracites. Athanase prit rapidement la parole, après que tous les oiseaux se fussent installé sur l'épaule de leur compagnon respectif.

" Bon, très bien. Maintenant que nous sommes en sécurité céans, à l'abri des regards et des agissements mauvais de nos ennemis, nous pouvons commencer. Vous incarnez chacun un Don, jusqu'ici je ne vous apprends rien, et à chaque don a été confié un pouvoir spécial et caractéristique, mais pour cela je ne peux vous en dire plus et ne peux vous apprendre à vous en servir. Seul vos gardiens en sont capables, c'est pourquoi, ils ne vous quitteront plus désormais.

Il fit une courte pause, pour permettre à tout le monde de suivre plus facilement les instructions qu'il allait leur donner. Pause durant laquelle Gabriell ne se priva pas pour faire quelques remarques à la blondinette:

" N'imagine même pas pouvoir me mettre à la fenêtre comme à l'auberge, jeune fille...Je serai partout et tout le temps. Prévint-elle, d'un ton malicieux. Quoiqu'il se passe, je suis désormais comme ton ombre et il est hors de question que tu fasses machine arrière.

«Comme toujours Gabriell, tu as l'art et la manière raffinée de ne pas laisser le choix aux personnes... Comme dit le proverbe africain :"Tu as la délicatesse d'un éléphant et le tact d'un rhinocéros..." Railla ironiquement la demoiselle sachant pertinemment que l'oiseau l'entendait. Et je te remercie de te soucier de moi, au point de vouloir me suivre à chaque instant...»

Puis elle reprit, au bout d'un petit instant de silence:

" Et oui...Je n'ignorerai plus le devoir qui m'incombe, cesse de me prendre pour une enfant...Grogna-t-elle, exaspérée d'être prise à la légère par tout le monde. Je ne ferai pas de bêtises, c'est promis...

- J'en connais un qui ne se privera pas de les faire à ta place, si tu ne freines pas ses ardeurs... rappela la Dame Blanche, en jetant un regard réprobateur à Guillaume de Chéralye, qui était assis en face de la demoiselle et la dévisageait sans honte.

Confuse, la jolie jeune fille évita soigneusement de penser quoi que ce soit, de peur que l'oiseau de proie n'interprète ses pensées. Heureusement pour elle, le moine revint à la charge et entama la longues liste des indications, poussant ainsi le beau châtelain hors de son esprit:

" Tout d'abord comme vous pouvez le constater vous vous tenez céans dans l'abbaye de Montombe. Mon toit, mes lois, comme dit le proverbe...Vous allez donc devoir vous plier à mes règles, de quelle naissance vous soyez. La première est la ponctualité.

«Gnagnagna... Mon toit, les lois... On est pas en prison non plus ! Grogna la petite blonde sachant que cette remarque lui était adressée personnellement.»

Il s'arrêta pendant un court laps de temps, durant lequel il toisa durement Natacha, qui malgré tout ses efforts, n'arrivait pas à se faire plus petite qu'elle ne l'était déjà sous le regard sur qu'il lui donnait. Il poursuivit:

" Vous aurez des entraînement intensif tous les jours, et des cours de théologie que vous serez tenus de suivre avec assiduité. "

La jolie jeune femme à la flamboyant chevelure vénitienne tiqua aux paroles du moine. Elle allait devoir suivre des cours ? Comme au lycée ? Cela lui parut tellement invraisemblable qu'un léger sourire naquit sur ses lèvres. Elle faillit également éclater de rire en imaginant Guillaume, grand seigneur assis devant un pupitre recopiant soigneusement ses devoirs dictés par frère Athanase. Ce sourire elle le perdit bien vite en étant de nouveau exposé au regard transperçant du vieil homme. De toute évidence, il allait être intransigeant avec tout le monde, et son petit doigt lui disait qu'il le serait particulièrement avec elle, aussi, elle préférait ne pas s'attirer davantage ses foudres.