20- Travaux forcés

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    La porte de la cellule s'ouvrit dans un fracas abominable. Egel se redressa et observa ce qu'il se passait. Il ne put distinguer qu'une silhouette, car la personne dans l'encadrement de la porte était à contre jour par rapport à lui. Il perçut cependant qu'on jetait un corps dans leur cellule, comme s'il s'était agi d'un vulgaire sac à patates.

    Il s'avéra que le corps se trouvait être Missor, bien amoché. Il devait être sonné : il ne répondit pas aux appels de ses camarades. Le cœur d'Egel se serra. Il avait espéré que Missor avait fait un petit tour de magie et qu'il avait réussi à échapper aux mailles du filet. Il était le seul homme qui ne s'était pas retrouvé avec eux. Il fallait croire ce n'était qu'une question de temps avant que les Salvyries ne le rattrapent.

    Le petit dieu finit par se réveille. Les questions qui l'assaillirent de toute part ne durent pas l'aider pour se remettre de ses aventures.

    — J'ai mal, dit-il.

    Cela mit fin au déluge de questions. On l'avait souvent entendu se plaindre durant le voyage, mais jamais avec une telle intonation. Là on comprenait qu'il souffrait vraiment, ce n'était plus juste de la comédie. Egel compatissait mais il voulait tout de même savoir.

    — Où étais-tu, tu as réussi à trouver le trésor ?

    — Non. Elles m'ont juste pris pour une fille et quand elle se sont aperçu que ce n'était pas le cas, elles n'étaient pas contente.

    — Et Alyn... ?

    — Elle était avec moi et les autres femmes mais elles sont venues la chercher. Je ne l'ai pas revue depuis. Je ne sais pas.

    Un silence pesant pesa alors dans la salle. Egel n'avait pas été le seul à placer tous ses espoirs dans Alyn. Tous, même s'ils n'avaient pas osé se l'avouer, l'avaient fait.

***

    Plus tard, la porte se rouvrit et laissa apparaître plusieurs hommes. Ils étaient vêtus de peaux de bêtes qui laissaient entrevoir, à plusieurs endroits, leur peau mate, à croire qu'ils ne souffraient pas du froid. Ils mirent les prisonniers sur leur pieds et les firent tous sortir en file indienne. Egel fut ébloui par la luminosité à l'extérieur. Sans s'en préoccuper, les hommes se mirent à leur parler et à leur faire des signes incompréhensibles. Cette langue se rapprochait plus du Mirùnien que de l'Amhurien au niveau des consonances et du rythme mais Egel n'en saisissait pas un traître mot pour autant.

    — On doit s'asseoir en cercle, dit Iddo.

    En échange d'une grande quantité d'énergie, il avait le Don de percevoir les paroles en images et pouvait donc traduire aux autres ce qu'il interprétait. Cela mit un peu du baume sur le moral d'Egel : au moins ne se feraient-ils pas, en plus, frapper parce qu'ils ne comprenaient pas ce qu'on leur demandait.

    Ils s'exécutèrent et les hommes leur servirent une bouillie nourrissante. Cela aussi fit du bien au prince, qui était torturé par son estomac depuis un moment. Pendant qu'il mangeait, il observa autour de lui.

    Ils se trouvaient dans une grande clairière, probablement déboisée par des humains, dans laquelle avait été construit un petit village de bois. Les hommes qui leur avaient donné de la nourriture étaient assez grand et costauds, mais ils ne semblaient pas méchants. La plupart avaient un sourire collé aux lèvres et ils plaisantaient gaiement entre eux. En revanche, il y avait plus loin des femmes auxquelles il ne valait mieux pas se frotter. Elles tenaient des lances et regardaient les prisonniers avec des regards de tueurs qui firent frissonner le prince.

    Il constata que les deux sexes arboraient des peintures sur le visage et la nuque. Les symboles qui y étaient représentés ne faisaient pas de sens pour lui et il se demanda s'il s'agissait d'un autre alphabet que celui qu'il connaissait ou bien seulement d'un art abstrait.

Le Trésor de BargorOù les histoires vivent. Découvrez maintenant