Elle pénétra dans la salle de l'auberge. En cette soirée d'un hiver tardif, la salle, petite, était bondée et étouffante. Au fumet des cuisines, se mêlait l'odeur des corps fatigués et des vêtements humides. Aradante balaya la salle du regard. Celles qu'elle y cherchait n'y étaient pas. Zoé s'était avancée vers la porte du fond et lui fit un petit signe positif. Il y avait une seconde salle, pour les repas privatifs. Quand la serveuse apparut, Zoé avait déjà rejoint Aradante.
« Nous seront trois et nous voulons aussi passer la nuit. Nous avons besoin d'une chambre. »
À ce moment-là, Rochenéré les rejoignit et elles s'installèrent.
La servante leur avait fait places à une table collective où une pile de bols étaient mis à disposition, avec des cuillères. Elle partit puis revint rapidement et posa la soupière sur la table. Rochenéré s'empressa de servir les deux fées. Il remplissait son rôle masculin à la perfection : après avoir prit soin de leurs cavales, il avait monté les bagages dans la chambre réservée et faisait maintenant leur service. Aradante lui envoya un petit sourire de contrition. Elle sentit sous la table son pied qui pressait le sien. Zoé fronça le sourcil et Aradante s'exclama joyeusement, bien contente de trouver un sujet dérivatif de la raison de leur présence ici.
« Non ! Iris! Tu ne vas pas être jalouse des attentions de Loan ! »
D'un commun accord, afin de préserver leur anonymat, elles avaient décidé de s'appeler par leurs noms de naissance et de se faire passer pour des négociantes. Elles avaient donc abandonnées leurs épées et portaient de courtes tuniques de voyages sur les quelles elles avaient passées des redingotes coupées dans un drap de laine fine qui signalait leur situation prospère. Pour une fois, Aradante été satisfaite de l'éclaircissement de sa chevelure qui lui épargnait la précaution de la cacher. Elle n'était plus la fée rousse flamboyante recherchée sur tout le territoire sous contrôle de l'usurpatrice, comme elle appelait Talila.
« Tachez de vous tenir ! Nous dormons dans la même chambre cette nuit ! »
« Innocente enfant ! Toutes les choses de la vie ne t'ont pas encore été révélées ! Il y a plein d'autres lieux qu'un lit... » S'amusa Loan.
« Pouah ! » Fit Zoé en prenant une mine dégoutée. « Vous ne pensez donc qu'à cela ! »
« Cela s'appelle être amoureux ! » Lui précisa Héliante en prenant la main de son compagnon et en baisant lentement le creux de sa paume. Loan sentit un frisson hérisser son échine. Il reprit vivement sa main. Ce n'était pas le temps de la bagatelle.
« Mangeons. »
Après le repas, elles montèrent dans leur chambre. On avait dressé un lit de camp pour Iris. Mais ce n'était pas l'heure de se coucher. D'ailleurs, elles n'étaient pas là pour cela. Elles firent une toilette rapide et changèrent simplement de tuniques. Elles attendaient que les marsalanes qu'elles pistaient depuis plusieurs jours, regagnent leur chambre, plus exactement un grand dortoir qui utilisait la totalité des combles au dessus d'elles. Ce qu'elles ne tardèrent pas à faire.
C'est Corée qui les avait prévenues, par l'intermédiaire d'Erasto. Régis avait d'abord été déçu de la défection de sa conseillère et incrédule. Quand Erasto, l'amant en titre de Corée, l'avait rejoint, il l'avait rassuré. Dès la prise de pouvoir de Talila et de son parti de la féérie, Corée avait réussi à les cacher puis à aider son amant et quelques uns de ses amis à s'enfuir. Elle n'avait pas trahi son Prince, seulement sauvé sa vie, comme beaucoup de fées et d'hommes au palais. Mieux valait se soumettre. Quelques exemples de châtiments avait été donnés : comme les exécutions de Marcus ou de Mérédite. Corée ne pouvait se permettre que des soutiens discrets et mesurés à la cause princière. Issue du conseil du Prince, son ralliement à la cause féériques nécessitait des garanties d'allégeance. Corée avait été mise sous la tutelle directe de Justinia, ainsi que Pica. Elle avait la charge de défaire le travail qu'elle avait entrepris avec Régis : retransformer les Écoles du Peuple en École de Magie à destination exclusive des fées. Et recruter des combattantes pour la guerre qui s'était déclarée sur plusieurs fronts sur le territoire.
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La Princesse des Steppes
FantasyLe Prince des Deux Peuples est parvenu à maintenir la Ville de Marsa attachée à son territoire mais nos héroïnes, ses fées les plus proches, sont gravement blessées. Aradante en convalescence découvre l'héritage de Héro. Sacha est en fuite de sa vie...