Le lendemain matin, la tente de Tsine resta longtemps close. Trop longtemps. Une douleur vrilla dans le cerveau d'Héliante. Elle se détourna de son sentiment mauvais, jalousie, envie, regret... Elle avait honte d'elle-même, jusqu'à se haïr. Fuir... Elle chercha sa jument dans l'enclos, la sella et partit à l'aventure. L'ardeur de la chevauchée, l'attention que requerrait le terrain accidenté alternant pierriers, ornières, prairies semées de roches erratiques et de trous imprévus, monopolisait son attention. Pendant de temps-là, elle ne pensait pas à autre chose, à Solen heureux, à Rochenéré mort, à Héro assassinée. Peut-être était-ce après la mort qu'elle courait ? Sa jument trébucha. Elle réussit à la rattraper. Plus de peur que de mal ! Elle ralentit l'allure et la mit au pas. Plus tranquillement, elles revinrent vers le village de tentes. L'après-midi était déjà bien entamée quand elle arriva. Une grande tente ouverte un peu à l'écart, servait de cuisine collective. Des tables, des fourneaux, des bancs et tous les ustensiles nécessaires pour cuisiner étaient à disposition. A cette heure du jour, elle était déserte. L'activité s'était déportée vers les enclos on l'on construisait des abris de bois et de branches pour les animaux. Bientôt, les vaches seraient lâchées en estives. Mais tous les soirs, il faudrait les réunir pour les traire, préparer les fromages sur place, les ramener. Quelques chevaux les accompagneraient mais la plupart resteraient à disposition, dans les enclos. Quand aux moutons et aux chèvres, précieuses pour leurs laines, autant que leur lait et leur viande, elles avaient été trop décimées par le grand voyage et les Shejins préféraient les garder auprès d'elle, comme le lait sur le feu... Dans un pot soigneusement fermé, elle huma un restant de potage où flottaient des petits morceaux blancs, non de la viande mais du fromage avec quelques herbes, qui datait du matin. Elle chercha un bol sur une étagère de bois, une cuillère et se servit. Elle chipa quelques galettes qui restaient de la veille et sortit à la recherche d'un coin tranquille pour manger. Tranquille, elle ne le resta pas longtemps. Fai la rejoignit bientôt.
« Bonjour à toi, la salua-t-elle. Je te cherchais. » C'était une évidence, pour la trouver la, adosser à un rocher en haut d'une éminence qui la cachait de la vue, depuis le camp. Aradante grogna un vague bonjour rébarbatif.
« J'ai besoin de toi. » Fai allait droit au but. « Je voudrais te demander un service. Un échange, je peux faire quelque chose pour toi, si tu veux. »
« Qu'est-ce que tu veux ? » Demanda Héliante en se concentrant sur son potage.
« As-tu finis de manger ? » Demanda Fai sans lui répondre.
Héliante se leva et ramena le bol et la cuillère à la cuisine où elle les nettoya et les reposa là où elle les avait trouvées. Fai l'attendait à l'entrée de la tente. Elle la conduisit à sa yourte et Héliante la suivit sans mot dire.
« Voilà. Assieds-toi. Nous serons plus tranquille. » Dit Fai en lui désignant une petite banquette tout en abaissant la portière avant de la rejoindre.
L'espace intime de Fai révélait son état de Shamane : ce n'était point nerf de bœuf, fouets et autres accessoires de sellerie qui était accrochés mais des bouquets d'herbes et de fleurs en train de sécher ou déjà sèches, embaumant l'intérieur. Des pots contenant des poudres aux couleurs textures variées étaient rangée sur une armoire dont la porte avait été ôtée pour rendre ses médecines plus accessibles. Différentes fioles étaient alignées, vides ou pleines. Les teintures des murs représentaient des semis de fleurs et d'herbes, un ciel étoilé, une mandala aux tonalités ocre et terre avec une fée en étoile, bras et jambes écartées en son milieu d'où jaillissaient des vagues de fleurs multicolores s'entrecroisant en volutes mouvementées. Mais Fai ne la laissa pas longtemps à son observation muette
« Tsine et Solen sont partis à la rivière... comme d'habitude, les quatre louves suivent Tsine, de loin. Elles ont pris l'habitude de la surveiller et de la protéger. Elles passent leur temps ensemble mais ces louves savent se faire discrètes ! Je te remercie à toi de les avoir mises à son service ! »
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La Princesse des Steppes
FantasyLe Prince des Deux Peuples est parvenu à maintenir la Ville de Marsa attachée à son territoire mais nos héroïnes, ses fées les plus proches, sont gravement blessées. Aradante en convalescence découvre l'héritage de Héro. Sacha est en fuite de sa vie...