La Princesse des Steppes

Détour amoureux

L'armée Odilane fut vainqueure mais une bataille victorieuse ne suffit pas à gagner une guerre. Les fées de Talila se replièrent vers La Capitale ; Parmi elles, principalement les combattantes professionnelles qui avaient tenu le combat pour la plupart, celles qui s'étaient le mieux battues et qui avaient survécu. Les autres, les novices recrutées à la hâte et survivantes s'égayèrent et rentrèrent chez elle. Les odilanes ramassèrent les mortes et les blessées sur le champ de bataille. Les premières furent inhumées, les autres rapatriées en ville où une caserne fut transformée en hôpital militaire.

Aradante se désintéressa des suites de cette victoire. Elle était loin du triomphe qui enthousiasmait ses amies. Elle ne parvenait à partager l'espoir de Régis. Pour lui, les choses reprenaient un aspect favorable.

Les armées Angles avançaient sur la rive droite de la Sécane en direction de la Capitale. Aux Marches des Filandre, sur le front nord, les troupes pro-prince tenaient tête à celles de Talila. Elles étaient composées d'un agglomérat de résistantes venues des quatre coins des provinces nordiques qui renforçaient les quelques régiments professionnels territoriaux. A l'Est, une petite armée s'était elle aussi constituée et avançait sans rencontrer de véritable opposition. Les extrémistes semblaient s'être repliées dans les villes : Layone, la Capitale, quelques autres villes de moindre importance formant un cordon remontant la vallée du Roten, puis se disséminant en quelques bastions sur la route de la Capitale. Mais à la grande satisfaction du Prince et de Sacha, Marsa restait fidèle. Ilana avait repris le contrôle de sa ville et honorait ses promesses.

Régis, conseillé par Sacha et Odile, en plus de l'avis de Pertise, pensait qu'il ne fallait pas perdre de temps et poursuivre cette armée qui se repliait jusqu'au porte de la Capitale. Cette décision fut donc arrêtée d'un commun accord. La générale assurait que ses troupes d'élites seraient prêtent d'ici quelques jours. Il fallait reconstituer ses forces et préparer la caravane logistique inhérente à toute armée. Elle laisserait une partie de ses troupes pour assurer la défense d'Odilan. Il n'était pas question de dégarnir la ville et Régis ne discuta pas cette décision. Pour assurer sa garde rapprochée, il aurait les cavalières de Sacha et les montagnardes d'Aradante... Aradante ! Le suivrait-elle ? Etait-elle en état de le faire et de continuer à se battre pour lui ? La réalité irréversible de la mort de Rochenéré l'écrasa soudain.

Songeur, lointain, après que le conseil se fut dispersé, il s'abîmait dans la contemplation de la chaîne de montagnes doucement arrondis qui barraient au loin l'horizon. Et le poids du chagrin s'allégea tandis que celui de l'espoir le soulevait. C'était par-là que Tsine était partie avec son peuple et c'était sur le haut plateau, au pied de ces montagnes qu'elle avait trouvé refuge. Il avait peu de nouvelles d'elle. Sa psyché lui avait toujours été interdite. Tsine était parfaitement entraînée contre toute incursion télépathique et si elle ne voulait pas communiquer, il était impossible de l'y forcer. C'est ce qui l'attristait, ou l'inquiétait, selon son humeur... Qu'elle ne veuille entrer en communication avec lui. Fai avait tenté de le rassurer en lui annonçant qu'elle était enceinte mais ne donnait pas plus de détails. Quant à Hermès, toujours auprès d'elles, il sentait la censure dont son esprit faisait l'objet. L'œuvre de Fai ! Cela le mettait en colère.

« A quoi pense-tu ? » Lui demanda Sacha en se glissant dans ses côtés et en regardant dans la même direction que lui. Il l'avait cru partie avec les autres et fut surpris de la voir auprès de lui.

« A elle... A Tsine... Elle est à quatre jours de chevauchée... »

« Alors vas-y ! Cours... » Lui souffla son amie.

« Mais... je dois... »

« Non n'avons pas besoin de toi pour préparer notre armée et avancer sur la Capitale. Tu risques tout au plus de prendre un mauvais coup... »