Chapitre 11 : La pièce est jouée

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Hello, hello ! Je reprends du service avec cette histoire que je suis heureuse de retrouver. Ce chapitre est un peu plus long que d'habitude, j'ai voulu y mettre plein de choses mais j'espère qu'il vous plaira tout de même. Sur ce, en avant !

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Take my hand I'm a stranger in paradise

All lost in wonderland

A stranger in paradise

If I stand starry-eyed

That's a danger in paradise

For mortals who stand beside an angel like you

Tony Bennett, « Stranger in Paradise »

Elle lui apparut au détour d'un couloir, petite flamme d'abord, apparition radieuse ensuite. Les lumignons de son chandelier étaient un soleil dans l'océan de la nuit. La beauté épurée d'Iris lui coupa le souffle. La lueur des bougies dorait son visage, ses mains et ses cheveux. Gilbert ne voyait de sa chemise de nuit plongée dans les ténèbres qu'une fumerolle furtive. Ses pieds ne faisaient d'ailleurs pas un bruit, renforçant l'aspect onirique de cette vision.

Le major réalisa qu'il était incapable de lui donner un âge. Iris aurait très bien pu avoir un peu moins de vingt ans comme un peu plus. Ses traits demeuraient encore juvéniles mais ses yeux étaient deux puits sans fonds, témoignant d'une connaissance intime du monde. Ses mains paraissaient également contenir toute une histoire dans les runes hermétiques de leurs cals et cicatrices. Une singulière bouffée de chaleur l'envahit lorsqu'il se souvint du réconfort qu'elles étaient capables d'offrir. Ses yeux dérivèrent malgré lui et suivirent  la courbe de ce cou de cygne que rien ne dissimulait à sa vue. Cette peau dénudée l'émouvait bien plus qu'il n'était bienséant ou raisonnable. Sa raison tenta de reprendre le dessus mais Gilbert ne put néanmoins s'empêcher d'imaginer la douceur de sa peau, l'avoir sous ses doigts après n'avoir trop longtemps tenu que des armes.

Le soldat s'arracha brutalement à cette torpeur, fixant un point derrière elle, n'importe quoi d'autre. Comment pouvait-il se permettre de telles pensées ? Iris devait certainement avoir un gentil fiancé qui l'attendait en ville. Si ce n'était pas le cas, il était de toute façon inconcevable qu'une jeune personne comme elle puisse désirer un homme dans son état. Tout cela ne prit que de brèves secondes pourtant, Iris capta, plus par instinct que par expérience, son regard sur elle et fut assaillie à la fois par la surprise, la nervosité mais aussi une pointe de griserie. Intriguée, partagée entre l'envie de s'approcher et de reculer, elle leva les yeux vers lui, cherchant à sonder ses intentions.

Elle était également demeurée figée devant lui à cause d'un simple détail qui donnait au soldat une allure bien différente, beaucoup plus accessible. Ses cheveux n'étaient plus ramenés en arrière encadraient désormais librement son visage avec une ou deux mèches folâtres de ci delà, le faisait ainsi paraître moins austère mais surtout beaucoup plus jeune. Il n'était plus uniquement cet homme si digne et imperturbable qui avait appris depuis sa naissance à tenir son rang. En le voyant ainsi, Iris lui retrouvait l'aspect plus vulnérable qu'elle avait entrevu dans le train. Elle ne put qu'admirer de nouveau la beauté et la régularité de ses traits, adoucis par leur expression calme et mélancolique. 

Ses cicatrices et son cache-œil ne gâchaient rien, il était aisé de les oublier, tout comme sa manche pendante. Iris se refusait à le réduire à cela, à faire injure à cet homme courageux qui faisait face à cette odieuse épreuve du mieux qu'il le pouvait. La lumière du chandelier ne se reflétait pas dans ses mèches de jais, les faisant paraître encore plus sombres. Iris désira ardemment y passer ses doigts, dessiner les contours de sa mâchoire. Une impression de manque qu'elle ne savait comment combler la submergea. Sa prunelle, astre solitaire à l'éclat smaragdin, la captivait. « Quelle tristesse qu'on lui ait crevé l'autre ! » s'attrista Iris, se revoyant viser l'oeil de ce soldat adverse. Elle substitua alors un instant le visage de Gilbert à celui de l'ennemi. « ça aurait pu être lui » : l'idée lui vint, absurde mais terrifiante.

La fiancée et la mer (Fanfiction Violet Evergarden)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant