Chapitre dix-huit

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Sherlock n'eut pas à attendre longtemps. Dix minutes après avoir mit le feu, une silhouette fine et agile se distingua parmi la fumée et les flammes brûlantes. Comme venant tout droit de l'Enfer, tel Hadès dans la mythologie, Mikaël se planta devant lui, un sourire cruel fiché sur le visage.

La luminosité le rendait encore plus terrifiant. Mais Sherlock ne se démonta absolument pas. Il devait avouer que Mika était vraiment magnifique, malgré la cicatrice qui lui traversait la joue. John savait choisir ses amants.

Les deux hommes, sans fléchir, se faisait face au milieu du foyer ardent. La chaleur faisait perler sur leur front quelques gouttelettes de sueur. Leurs regards se défiants l'un l'autre parlait dans le silence que les crépitement du feu brisaient. C'était deux esprits qui combattaient. Deux esprits intelligents.

Et Sherlock n'avait plus ressenti une telle excitation depuis Moriarty. Le Napoléon du crime qu'il avait précipité dans les chutes du Reichenbach, celui qui avait failli - mais failli seulement - le tuer. Sauf que cette fois, il n'y avait pas que lui, en jeu. Il y avait John, aussi.

Au bout de plusieurs minutes de silence, Sherlock entama le combat.

- "Mikaël", c'est cela ? Vous avez quelque chose qui m'appartient, je crois.

- Je suis honoré de constater que vous connaissez mon prénom. John fais bien son travail. Je ne pensais pas que vous viendriez si vite. Je dois dire...que je suis surpris, en fait.

- Où est John ?

Mikaël sourit, et continua en ignorant la question.

- Je suis surpris car votre ami m'a affirmé que vous étiez réellement intelligent. Il a même dit que vous étiez au dessus de tout et de tous. Hors...Vous êtes là, devant moi...Et je ne vous trouve rien d'incroyable.

Sherlock maintint son regard sans ciller puis sourit à son tour. 

- John dit beaucoup de choses. Il a un esprit tellement romanesque, qu'il écrit sur nous, sur nos enquêtes et les rends intéressantes. Il est incroyable.

- Ne parlez pas comme si vous le connaissiez, Mr.Holmes, grinça Mikaël. Vous ne savez rien de lui. Moi...Moi j'ai été là lors de ses moments les plus douloureux. On a partagés des moments que vous n'aurez jamais avec lui !! Vous ne savez rien.

- Et pourtant si. Je sais beaucoup de choses sur lui. Par exemple que c'est votre ancien amant...mais qu'il ne vous aime plus.

Sherlock envoya un regard perçant et menaçant.

- John est à moi !! rugit l'ex soldat fou.

Sherlock, ayant l'avantage, en profita.

- Où est-il ?

- Quelque part, dans ce bâtiment. En vie.

Mikaël écarta les bras et partit dans un fou rire que seul les êtres dérangés savent faire.

- Mais patience...dit-il. Je vais vous tuer, puis je repartirai le voir, je lui expliquerai en détail votre lente agonie et je le tuerai à son tour.

- Ne touchez pas à un seul de ses cheveux, gronda Sherlock, menaçant.

Mikaël le foudroya du regard et posa une main sur son revolver dissimulé.

- C'est drôle. Il m'a dit la même chose.

***

John Watson tirait sur ses liens depuis plus de vingt minutes. Ses poignets étaient dans un état lamentable. Sa chair était arrachée, déchiquetée en lambeaux et son sang tachait le sol et les cordes. Il gémissait de douleur. Cependant, il n'avait pas le luxe de pouvoir s'attarder sur sa souffrance. Sherlock se mettait en danger, et Mikaël allait le tuer. Bien sûr, John n'avait pas de doute quant à la force et à l'intelligence de son ami, mais il savait également de quoi était capable Mika. Et l'homme en question était vraiment terrifiant.

Jadis, il avait été l'un des meilleurs sniper d'élite travaillant pour l'armée, et il était encore plus redoutable dans le corps-à-corps. Il était l'un des meilleurs éléments, et John l'avait vu à l'œuvre beaucoup trop de fois. Avant, chaque vie qu'il prenait le brisait petit à petit. Il était rongé par la culpabilité à tel point qu'il avait tenté de mettre fin à ses jours. John l'avait sauvé. Mais maintenant...Tuer semblait normal pour lui. Il ne pouvait pas laisser Sherlock se faire tuer.

Au bout de tant de persévérance, les cordes se délièrent quelque peu, laissant aux fins poignets de John la liberté de passer. Enfin libre, Watson ne s'attarda pas sur les détail. Les sillons parsemés d'écharde que les liens avaient creusés dans sa chair saignaient toujours, mais il estima que la perte de sang était trop faible pour pouvoir l'affaiblir avant deux bonnes heures.

Malgré l'état de faiblesse dans lequel son corps était, il couru. Plus il courrait, plus l'adrénaline montait, et plus il avait de force. Bien sur, il savait que dès qu'il s'arrêterait, il en subirait le contre coup et serait au bord de l'évanouissement. Mais il se savait assez robuste pour résister, même dans son état.

Sans hésiter une seconde, il franchit plusieurs obstacles, sautant au dessus de poutres ou de caisses, ne quittant pas la fumée des yeux. Il priait, dans son esprit. Il priait pour que Sherlock ne fasse pas de folie, pour qu'il soit en vie, et que Mikaël n'utilise pas son propre pistolet pour abattre la seule personne qu'il aimait plus que tout. Il priait pour que le sort ne lui fasse pas un coup aussi horrible que cela. Il priait pour que son corps autant que son esprit tienne le coup. Il priait pour beaucoup de choses. Mais toujours pour Sherlock.

***

John ne s'arrêta que lorsqu'il ouvrit l'une des portes de la serre.  Son regard croisa celui de Sherlock. Interloqué, heureux - immensément heureux -, terrifié.

La scène se déroula en quelques secondes. Mikaël arme levée, tira. Sherlock hurla. Mais ce ne fut pas lui, qui s'écroula.

Ce fut John Watson.

J.O.H.N.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant