Chapitre dix-neuf

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John s'écroula par terre en gémissant de douleur, les yeux écarquillés. Il entendit Sherlock courir vers lui. Son épaule était ensanglantée, mais la balle ne l'avait pas traversé. L'hémorragie devrait être facile à contenir.

Sherlock se rua sur son ami, et le prit contre lui. Il analysa rapidement les blessures de John.

Ses poignets, dans un état lamentable, firent grincer le détective de rage. Son épaule saignait abondamment. Holmes déchira sa propre chemise et appliqua le bout de tissu sur la plaie douloureuse du docteur.

- John, nous t'attendions !! dit Mikaël de l'autre bout de la pièce que les flammes rongeaient de plus en plus. Maintenant que nous sommes tous réunis, je vais vous raconter une petite histoire.

John plongea ses yeux dans ceux de Sherlock, puis les ferma.

- Arrête, dit-il d'une voix blanche et déformée par la douleur. Mika, arrête...

- Il était une fois...la guerre. Les obus qui s'écrasaient partout, y compris sur nos amis, et dont les bout de métal, quant ils explosaient, devenaient des projectiles semblables à des balles. Les hurlements de terreur et de rage qui s'élevaient dans le ciel, seul témoin des horreurs des hommes. Les morts sur lesquels nous marchions pour avancer, sans considération pour quiconque.

- Arrête !! supplia John en s'agitant.

Sherlock le maintint, l'un de ses bras passant dans son dos. Il le serra contre lui en faisant attention à sa blessure, et John posa sa tête contre son torse, les yeux fous de douleur, autant morale que physique.

- Non, John, laisse moi finir !! Cria Mikaël, la voix tremblante de rage et de souvenirs qu'il aurait préféré oublier. Nous tuions à la pelle, sans même faire la différence entre amis et ennemis, tuant n'importe qui tant le bordel était total. On avait tous peur, et aucun de nous ne voulait devenir des assassins, mais c'était la seule façon de survivre.

Il y eut une pause, puis l'homme reprit.

- Sauf qu'au bout de plusieurs mois, on en pouvait plus. Et le général de notre brigade, George Burrows, fit une erreur. Il était inexpérimenté et complètement fou. Il nous poussa à bout, si bien que la mutinerie failli éclater. Mais nous n'en avons pas eu le temps. En face, les renforts étaient arrivés et nous, pauvres soldats à bout de force et d'esprit, ne luttâmes plus très longtemps. Ils nous écrasèrent en l'espace de quelques heures. Plus de deux tiers des nôtres périrent. Les autres furent capturés.

John s'agrippa à Sherlock, désespérément, comme un noyé s'agripperait à une bouée de sauvetage. Il tremblait. Sherlock resserra encore un peu son emprise sur lui.

- John et moi firent partis des capturés. Étant amants depuis déjà près d'un an, nous étions ensembles dans notre malheur. Et cela nous suffisait. Cependant, l'ennemi n'en avait pas finit. Il voulaient des renseignements sur les autres brigades. Pour ce faire...

Watson frémit.

- ARRÊTE !!! hurla-t-il.

- Ils nous torturèrent, finit Mikaël. Chaque jour, ils nous détruisirent, moralement et physiquement. Et un soir, alors que j'étais encore en salle d'interrogatoire et que je luttais pour ne rien dire...l'alarme sonna. Je ne compris pas, avant qu'ils ne me ramènent en cellule. John n'était plus là. Il s'était échappé. Sans même chercher à m'emmener avec lui.

Watson regarda Sherlock. La peur lui rongeait le coeur. Une boule d'angoisse était fichée dans sa gorge, l'empêchant de respirer normalement. Il avait si peur que Sherlock ne lui parle plus, après avoir entendu ça...

Mais le détective lui sourit.

- Et alors ? Dit-il. Ce que John a fait avant ne m'intéresse pas.

L'ex soldat en fut si surpris et heureux, qu'il manque de pleurer. Sherlock Holmes, son ami le plus proche et le plus cher, n'était ni déçu, ni choqué...

Sherlock lâcha le docteur et le déposa doucement contre le mur. Il se releva et toisa Mikaël du regard. Celui-ci était choqué, et semblait fou de rage.

- Tu...Tu ne peux pas réagir comme ça, cracha-t-il. Tu ne peux pas...JOHN EST UN MONSTRE !!

Sans répondre, Sherlock glissa sa main dans son manteaux, en sortit un revolver, le pointa sur l'homme en face de lui et tira.

La détonation éclata dans l'air comme une promesse de mort. La balle atteint la poitrine de Mikaël et il tituba. Mais pas de sang, et il ne s'écroula pas. John compris. Il avait un gilet part-balle et, dès qu'il reprendrait ses esprits, allait tirer à son tour. Mais lui, tirerait dans la tête de Sherlock.

Dans un formidable effort, qui lui arracha une longue plainte de douleur, il se releva, bondit en avant, arrachant des mains de Sherlock le pistolet et se plantant devant lui, face à Mikaël.

Il se mit en position de tire, les jambes un peu écartés, de profil, le bras tendu devant lui et la main ferme sur la détente. Heureusement, son épaule touchée n'était pas celle dont il se servait pour tirer.

Sherlock amorça une protestation, mais le docteur ne lui laissa pas le temps de dire quoi que ce soit.

- Ne bouge pas, murmura John, comme une supplique à l'homme dans son dos.

Dans un geste protecteur qui lui arracha une grimace, il déplaça légèrement son épaule blessée en arrière.

Mikaël ne tira pas. Il plongea son regard dans celui de John. Un regard de défi et de surprise.

Les deux anciens amants se faisaient face, leurs armes ne tremblant pas, trop habitués à tuer pour laisser leur volonté frémir. John devait protéger Sherlock. Mikaël n'avait plus rien à perdre. Ils avaient respectivement la vie de l'autre entre leurs mains.  

J.O.H.N.Où les histoires vivent. Découvrez maintenant