Chapitre 5

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Pendant quelques secondes, je restai là, figée sur place. Tout mon corps était tendu, et je pouvais presque entendre mon cœur tambouriner dans ma poitrine avec force. Je ne respirais presque pas, n'osant pas bouger d'un centimètre. Au fond de moi, je nourrissais encore l'espoir qu'il ne m'avait pas reconnue.

Je sentais le souffle chaud d'Evan dans ma nuque, et je tentai de réprimer la chair-de-poule qui me parcourait les bras, en vain. En gardant mes bras bien collés à mon corps, je fermai les yeux en m'intimant de garder mon calme. Après tout, ce n'était peut-être pas lui. Peut-être m'imaginais-je seulement des choses. Cette soirée avait été soit tant peu bouleversante, et je ne connaissais peut-être pas encore l'ampleur de mon traumatisme.

Mais cet espoir mourut en un instant.

-Voilà que nous nous recroisons.

Je déglutis alors que le feu me montait aux joues. Je me retournai lentement, pour me retrouver face au mystérieux inconnu. Je forçai mes lèvres à former un sourire à la fois poli et léger.

-En effet. Drôle de coïncidence, non?

Il esquissa un sourire en inclinant la tête. Il était aussi beau que la veille, si ce n'était pas plus. La lumière du jour éclairait son visage, illuminant ses traits à la fois singuliers et séduisants. Ses lèvres rondes et sensuels, ses pommettes saillantes, la courbe de sa mâchoire, ses cheveux en bataille, et ses yeux, espiègle mais empreint d'une douceur inconcevable. Ceux-ci m'observaient avec une fascination que je ne parvenais pas à comprendre.

-Je n'aurais su mieux dire.

Le caissier se rapprocha et nous remit nos commandes. Evan lui donna un billet.

-Merci, gardez la monnaie.

L'employé ne se fit pas prier et empocha l'argent. Plateau en mains, je levai les yeux vers ceux d'Evan, qui n'avait pas cessé de me scruter. Avec cette fois un mélange d'inquiétude et d'empathie. Il me fit signe de la tête de me tasser sur le côté, malgré l'absence totale de clients au comptoir.

Après nous être détournés de la réception, Evan regarda autour de lui, avant de joindre ses yeux aux miens.

-Comment te sens-tu? Je n'ai pas eu la chance de te recroiser après... l'épisode de la salle de bain.

Je réprimai une grimace d'embarras en repensant à la honteuse situation dans laquelle je m'étais mis les pieds. Et moi qui croyais ne pas le revoir.

-Je vais... mieux. Oui, je vais beaucoup mieux.

J'étirai mes lèvres en un sourire artificiel. Il fronça les sourcils, décidément peu convaincu.

-Oh, je sais, ça, dis-je en pointant mon visage, les cernes, ça semble dire le contraire. Ne t'en fait pas. J'ai seulement eu une courte nuit.

Je laissai échapper un rire bref, avant de me rendre compte que le mystérieux inconnu me jaugeait toujours aussi sceptiquement.

-Une courte nuit?

Il se passa l'index sur les lèvres.

-Pourquoi donc?

Je ravalai ma salive.

-Les oreilles qui bourdonnent et les tympans presque arrachés, probablement, répondis-je en haussant les épaules, feignant l'indifférence. Rien d'étonnant.

Il hocha lentement la tête, le regard indescriptible. Je replaçai une mèche de cheveux derrière mon oreille.

-En fait, ça tombe bien que tu sois ici. Je voulais te remercier pour ton aide, hier soir. Je... je ne sais pas ce qui me serait arrivé. Je préfère même ne pas y penser. Mais tu m'as beaucoup aidé. Merci.

La dernière magicienne (En pause)Où les histoires vivent. Découvrez maintenant