T1 - Avant Lui

Tyler

Elena.

La seule chose qui reste cohérent dans ma tête est son prénom. Mon amour, ma putain de raison de vivre. Je ne savais pas que quelqu'un pouvait provoquer ça en moi, et encore moins une fille. Elle est formidable. La jeune brune un peu timide, la sœur de mon ex, rien ne collait pour que l'on finisse ensemble. Nous avions un seul point commun : nous étions paumés. Paumés dans nos têtes. J'étais à la recherche de moi-même, et elle cherchait de l'attention, mais également qui elle était vraiment. J'ai réussi à faire ressortir le meilleur de sa personne, la vraie Elena. J'en suis pas peu fier. Pour une fois que je réussis quelque chose.
Ce que j'ai vécu avec elle était juste extraordinaire, et ce n'était que le début. Elle est parfaite. Je ne lui dirai jamais assez « je t'aime » car je ne serai jamais certain qu'elle s'en rende vraiment compte. L'amour que je lui porte en est presque maladif, j'ai besoin d'elle à mes côtés. Je ne sais pas ce que je ferai sans elle. Je ne veux pas que ça arrive.
Quand j'y repense, ça me fait presque rire. Qu'est-ce que j'étais con. J'ai manipulé mon entourage pour mon propre intérêt, et ça n'a fait que les blesser. J'étais tellement égoïste. Cette histoire avec Jason a été dure à gérer, notamment parce que c'est un ami d'Elena, et que nous étions obligés de nous voir. L'ambiance était tendue, c'est compréhensible, mais on a fini par s'y faire. Ce n'est pas oublié, mais c'est du passé, ça ne sert à rien de le ressasser. Malgré ça, je n'arrive pas à oublier mes conneries. Je me suis servi de Jason, j'ai fait du mal à Elena. Qu'est-ce qu'on peut être con avec nos secrets quand on est ados. J'aurai pu dire « Elena, assieds-toi. Écoute, je suis gay. Je sais que c'est dur à accepter et je te laisserai le temps qu'il faudra pour t'en remettre, mais sache que c'est toi que j'aime, et ça ne changera jamais ». Ça aurait été tellement plus simple, mais faut pas rêver, on est pas dans un film. Toutes vérités est dures à admettre, mais c'est encore plus dur quand on attend. Le temps peut nous détruire en un clin d'œil. Il peut accélérer les bons moments comme éterniser les mauvais. Parfois, je me dis que le temps est un sacré connard.
Je ris à ma propre réflexion, ce qui intrigue Elena. Elle ferme son bouquin et lève la tête vers moi.

-Pourquoi tu ris ?

Je lui souris puis lui caresse les cheveux. Je sais qu'elle adore ça. Je sais également qu'elle a un trip sur mon cuire chevelu que je ne comprendrais jamais totalement, mais bon, si ça peut la faire fantasmer, je vais pas me plaindre.
Elle m'embrasse et me regarde droit dans les yeux.

-T'essaies de savoir à quoi je pense ? je demande.

-Oh, mon amour, si j'avais besoin de ça pour savoir à quoi tu penses.

Elle se place tout à coup à califourchon sur mes jambes, je lutte pour ne pas vriller.

-Non chérie, j'peux pas.

Une vague de panique passe dans ses yeux, tout de suite rattrapée par l'intrigue.

-Pourquoi ?

Je lui caresse doucement le ventre tout en la regardant.

-Je sens qu'il nous espionne, j'suis pas à l'aise.

Elle rit puis descend de mes genoux. Elle se lève et s'attache les cheveux en partant dans la cuisine, et je ne me gêne pas pour lui mater le cul à travers sa nuisette. Elle se sert un verre d'eau, puis regarde son ventre. Ça y est, elle va lui taper la convers'. J'avoue que ce truc qui grandit dans son ventre m'a fait peur au début. J'ai aussi fait peur à Elena, le temps de ma période d'adaptation. Je rentrais tard, je n'étais pas ouvert à la conversation. Quand je me suis rendu compte que je replongeais dans mes habitudes de gosse et que ça la blessais, j'ai pris mon courage à deux mains et ai tiré le positif de cette situation. Je vais avoir un enfant. Une mini fusion de l'amour de ma vie et moi-même. Il n'y a rien de plus beau, j'espère juste être à la hauteur. Je sais que c'est rapide, que j'ai vingt-six ans, mais je trouve ça suffisant. J'ai profité de ma jeunesse. Elena me dit souvent « Arrête de te croire immortel ! Un jour, tes petits-enfants t'appelleront Papi ! » et je lui réponds « Qu'ils essaient pour voir ! Mais de toutes façons ils ne pourront pas, je ne vieillis pas moi ! Ils ne sauront même pas mon âge ! » et puis elle me donne une tape sur l'épaule et ça finit par un baiser.
Le portable se met à vibrer sur la table, me sortant de mes pensées. C'est celui d'Elena. Je me tourne, mais elle n'est plus là. Elle doit être au WC. Je regarde le nom affiché sur l'écran. Aaron. Qui est-ce ? Elle ne m'en a jamais parlé. Je laisse le téléphone vibrer. Plus tard, ça me notifie qu'il a laissé un message vocal. Je sais que ce que j'ai envie de faire n'est pas bien, que ça aura des conséquences. Mais le pilier de notre couple est « plus de secrets ». C'est peut-être seulement un collègue de boulot dont elle ne m'a jamais parlé. Je déverrouille son téléphone et clique sur la messagerie.

« Vous avez 1 nouveau message, reçu aujourd'hui à 21:32.

Bip.

Elena, c'est Aaron. Tu ne pourras pas m 'éviter éternellement. Il faut qu'on parle de ce qui s'est passé cette nuit-la. Je suis persuadée que tu ne le regrettes pas autant que tu le dis. Ce qu'il y a entre nous est passionnels, tu ne peux pas faire semblant. Rappelle-moi, il faut qu'on en parle.
Je...

Bip. »

Mes yeux s'écarquillent de terreur. Ce n'est pas possible, c'est une mauvaise blague. Pas ça, pas elle. J'entends la chasse d'eau. L'eau du robinet. Elle sort. Elle me regarde. Elle comprend.

-Tyler...