Chapitre 29 : Promesses accordées, Montagne du passé

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Je marche droit devant moi. Le soleil m'ébloui mais je franchis tout de même les portes du commissariat. Ma main enferme le dernier élément qui me rattache à ma meilleure amie. Même une fois dehors, mon esprit n'arrive pas à soigner la plaie ouverte de mon cœur. Les souvenirs des derniers jours me reviennent en mémoire et je me rappelle les instants ou je souhaitais connaitre mon passé. Aujourd'hui, j'ai retrouvé la mémoire. Je connais la vérité.

Je croise mes bras autour de ma poitrine malgré la bonne température extérieure. Mes yeux cherchent un point dans le décor qui pourrait me rassurer, m'aider.

Soudain, une silhouette s'avance dans ma direction. Un corps se dirige vers moi et je distingue, malgré les rayons lumineux de l'astre, le détail qu'il me fallait pour le reconnaitre. C'est un homme qui marche droit vers sa cible, moi, avec comme appui deux cannes en métal pour supporter son unique jambe. Rowen.

Je n'hésite plus et m'élance vers le jeune homme qui gonfle mon cœur d'espoir. Quand j'arrive près de lui, je lui demande.

- Qu'est-ce que tu fais ici ?

- Axel m'a déposé avant partir pour l'hôpital. Je voulais savoir comment tu allais.

Mes mains se glissent dans celles du garçon et nos doigts s'accrochent, laissant se propager l'amour que je lui porte. Je n'ai pas eu le temps de m'attarder sur les sentiments que je dégage à l'égard de mon ami. Mais maintenant que tous les secrets sont élucidés, j'ai envie d'approfondir cette émotion qui me traverse en sa présence.

- Merci d'être là Rowen.

Le jeune homme sourit à mes paroles et m'invite à le suivre. On marche dans le silence. Nos corps sont proches sans pour autant se toucher. Le garçon unijambiste a besoin de l'aide de ses béquilles pour marcher, nos mains ne peuvent donc pas se lier durant cet instant.

On arrive à l'entrée d'un parc et je suis le jeune homme qui entre dans l'espace boisé. Cet endroit est vaste, peuplé par une dizaine d'enfant qui joue dans l'herbe. Leurs parents profitent de ce moment de tranquillité pour s'allonger et fermer leurs yeux sous le soleil éblouissant. J'admire cet environnement tandis que Rowen s'assoie sur un banc. Celui-ci est face aux montagnes qui entoure cette ville. Celles que je ne pourrais plus gravir.

Je plonge mes iris dans le décor qui s'offre à moi, laissant les souvenirs assaillir mon esprit. Je sens une peau se poser sur la mienne, me ramenant à la réalité par la même occasion. Rowen me regarde. Il doit voir une jeune fille, de dix-sept ans, paralysée par son passé.

- Tu as eu les réponses que tu souhaitais ? Me demande calmement le jeune homme.

Comme réplique, je relève la manche de mon tee-shirt et lui montre le bracelet à mon poignet.

- J'ai trouvé plus que je ne l'espérais. Ajoutais-je avec un faible sourire.

La main du garçon se place sur ma joue, effaçant l'ultime larme. Mes yeux rencontrent ces pupilles et cette liaison me rappelle celle que j'avais avec ma meilleure amie.

- Elle serait fière de toi Elma, autant que moi je le suis. Me confie sincèrement le jeune homme assis à mes côtés.

Ma tête se pose sur l'épaule de mon ami, nous plongeant dans un silence apaisant. Après quelques secondes à regarder les enfants jouer, je m'exprime.

- Pourquoi ne retournes-tu pas chez tes parents ?

- C'est assez tendu et compliqué depuis l'accident. Tu sais, avec mes parents nous n'avions pas la même vision de la vie. Moi je ne pensais qu'à m'amuser alors qu'eux voulait que je fasse de grande étude. Mais maintenant...

- Mais maintenant ? Répliquais-je, souhaitant que le garçon termine sa phrase.

- Maintenant tout a changé, tu m'as changé.

Ma voix se coupe quand Rowen prononce ses derniers mots, son regard toujours plongé dans le mien. Voyant ma stupéfaction, mon ami continue.

- J'ai vu et appris que la vie ne tenait qu'à un fil alors je refuse perde la chance que la vie m'a offerte. Celle de te rencontrer.

- Rowen, je... Je ne sais pas quoi dire. Prononçais-je en rougissant.

- Avant mon accident, j'avais une bande de copain avec qui je passais tout mon temps. Je croyais que nous étions amis mais quand je me suis retrouvé à l'hôpital, aucun n'a fait le déplacement pour venir me voir.

- Les gens ont peur de voir que la personne qu'il aime a changé. Murmurais-je.

- L'hôpital est surtout un remède efficace pour faire le tri dans sa vie.

Je suis d'accord avec les paroles du garçon. Aucune de mes camarades n'est venu me voir durant mon hospitalisation. En revanche, Axel et Rowen étaient là tous les jours.

- J'ai pris conscience que ma vie, ma famille, c'est toi, Axel et toutes les personnes que j'ai rencontré dans ce foutu bâtiment médical.

- Row, je sais que tes parents t'ont blessé mais comprend les, ils ont vu la mort en toi. Ajoutais-je pour faire comprendre au jeune homme que l'on fait tous des erreurs.

- Comme les tiens.

Je ne réponds rien, comprenant que mon ami souhaite que je pardonne à ma famille.

- Dans ce cas, je veux que l'on se fasse une promesse. Tu vas voir tes parents et j'envisagerais un pardon pour les miens. Proposais-je pour détendre l'atmosphère.

- C'est d'accord mais pour que cette promesse ait de la valeur, je veux faire une chose.

- Qu'elle est-elle ? Demandais-je curieuse.

A peine ma question posée que je sens les lèvres du jeune homme s'abattre sur les miennes. Ce baiser est comme le précédent, à la fois doux et passionné.

- Je suis complétement dingue de toi Elma. M'avoue dans un murmure le jeune homme, à quelques centimètres de mon visage.

Nos fronts se collent, laissant le plaisir à nos pupilles de se fondre l'une dans l'autre. Un petit sourire étire ma bouche et dans une osmose parfaite, je réplique.

- Mon cœur est à toi Row.

Le jeune unijambiste, heureux de ma réponse positive, entrechoc à nouveau nos lèvres.

Le reste de l'après-midi se déroule parmi les cris des enfants et la beauté du paysage. Je me suis allongée sur le banc, ma tête posée sur les jambes du garçon à mes côtés. Rowen me conte des anecdotes sur sa collocation avec notre ami kiné. J'en ris souvent et cela apaise mon cœur meurtri. Les doigts du jeune homme parcourt le dos de ma main, effleurant par moment le bracelet appartenant à ma meilleure amie.

- Que comptes-tu faire maintenant ? Me demande soudainement mon ami.

Je vois bien qu'il parle de mon passé concernant la petite fille décédée.

- J'aimerais lui rendre hommage.

- Ah oui et comment veux-tu t'y prendre ?

Mes yeux se dirigent naturellement vers la montagne affichée derrière les arbres.

- Le week-end qui devait suivre l'accident, j'avais promis à Melya de l'emmener tout en haut de cette montagne. Confie-je au jeune de dix-neuf ans.

- Celle-là ? Elle n'est pas accessible au public ou aux amateurs. Ajoute le garçon, peu convaincu par mes mots.

Je reste silencieuse, le regard fixé sur l'objectif que je m'étais donné l'année de mes dix ans. Puis, attrapant de mes doigts le médaillon qui celle nos deux initiales, je me fis cette promesse.

- Un jour, je gravirai cette montagne. Pour Melya. 



CŒUR MORTELOù les histoires vivent. Découvrez maintenant