47- L'ennemi

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Les paupières d'Hermione papillonnaient dangereusement, et, depuis une bonne demi-heure, son esprit avait une fâcheuse tendance à vagabonder vers des pensées brumeuses.

Elle venait de relire pour la quatrième fois une ligne de runes sans en saisir le sens.
Plus machinalement que par conviction, ses yeux parcoururent encore les mêmes caractères.
En vain.

Les vapeurs de potions qui planaient dans le laboratoire avaient déclenché sous le crâne d'Hermione un désagréable mal de tête, mais, au bout de quatre heures, la jeune femme s'y était habituée.
Hors de question qu'elle aille s'en plaindre à Severus.

Elle avait appuyé son menton sur sa main et avait commencé à gribouiller d'étranges arabesques dans le coin de son parchemin, couvert de haut en bas de traductions.
Severus et elle s'étaient partagé la tâche en deux, mais le travail restait fastidieux.
Le sommaire comptait bien une dizaine de pages, toutes écrites en runes, dont certaines n'étaient plus usitées depuis longtemps. Cependant, plus vite ils en auraient fini, plus vite ils pourraient trouver la page qui les intéressait.
Hermione avait traduit trois pages, et aucune rubrique n'avait retenu son attention à cet instant.
La fatigue jouait narquoisement avec son impatience grandissante.

Severus, quant à lui, semblait aussi bredouille qu'elle.
Depuis quatre heures qu'ils s'acharnaient à traduire le vieux grimoire, il n'avait pipé mot.
Il gardait consciencieusement les yeux baissés sur son parchemin, et sa plume ne s'arrêtait jamais bien longtemps de gratter le papier.

Hermione mourrait d'envie d'aller se reposer, cependant, elle ne voulait pas céder.
Déjà, parce qu'elle était presque certaine que Severus refuserait.
Ensuite, parce qu'elle ne voulait pas avoir l'air de flancher facilement.

Elle étouffa un bâillement puis observa Rogue du coin de l'œil.
Absorbé par son travail, il semblait avoir oublié sa présence.

Trempant sa plume dans l'encre, Hermione relut une sixième fois la phrase.
Quelque chose lui posait problème avec ces runes-ci.
Soupirant, elle posa sa joue contre le bois de la table, plaça sa plume au-dessus du parchemin, tordue dans une position étrange qui pourtant détendait sa nuque nouée.
Ses yeux papillonnèrent davantage, mais elle ne sembla pas s'en rendre compte.
Si bien qu'elle s'endormit, plongeant dans une obscurité complète qui avala ses problèmes, le Livre et ses runes pernicieuses.

Severus releva la tête quand la respiration profonde et posée d'Hermione parvint à ses oreilles.
Il leva un sourcil narquois en voyant la jeune femme à demi allongée sur la grande table de bois, sa plume pleine d'encre tachant le parchemin à côté de ses doigts.
Ses cheveux s'étalaient tout autour de sa tête, formant un étrange halo aux reflets changeants sous la lueur des torches.

Il reposa sa plume, étira ses longs doigts crispés par le long travail d'écriture qu'il venait de mener.
Il en était à trois pages et demie de traduction. Il jeta un œil à l'horloge du laboratoire.
Trois heures du matin passées.

Lui n'était pas vraiment affecté par la fatigue.
Il avait pris l'habitude, dans le passé, de veiller des nuits entières, en attendant les ordres de Voldemort ou de Dumbledore.

Il se leva, roula son parchemin et le cala à côté du Livre.
Puis il passa derrière le dos d'Hermione, attrapa le coin du parchemin de la jeune femme entre le pouce et l'index et tira dessus. Hermione grogna dans son sommeil en sentant son support glisser du dessous de sa joue, mais elle ne se réveilla pas.

Rogue leva le papier devant lui, le pencha un peu pour qu'il soit éclairé par la lumière vacillante des torches.
Il parcourut les lignes tracées de la main d'Hermione.
Il cligna des yeux, impassible.
Elle non plus n'avait rien trouvé qui correspondait à ce qu'ils cherchaient. Comparant rapidement le travail d'Hermione aux pages du Livre, il remarqua qu'elle n'avait, comme lui, pas encore fini sa traduction.
Il ne restait plus qu'à prier pour que leur réponse se trouve dans les quelques pages du sommaire restantes.

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