A La Haine

CHAPITRE VINGT-TROIS - SOUVENIRS

– Me dite pas que vous êtes encore entrain d'écouter vos musiques ringardes ? Bougonne Maxence en entrant dans la chambre. Vous avez rien de mieux à faire que d'écouter les voix de gens qui sont entrain de se faire ronger par les cafards à l'heure actuelle ?

   Je roule des yeux, c'est toujours comme ça avec Maxence il ne peut s'empêcher d'étaler sa mauvaise humeur.

– Radin comme t'es tu devrais apprécier, parce que nous au moins on se ruine pas pour acheter une place de concert pour un rappeur naze.

   C'est au tour de Maxou Picsou, comme on l'appelle vu l'avare qu'il est, de rouler des yeux devant la remarque de son frère.

– Vous voulez pas on joue ?

– A quoi ? Je demande curieuse. Il pleut des cordes on a rien à faire même nos devoirs sont bouclés !

– A tu préfères... ?

   Nous approuvons et j'éteins le MP3 avant que l'on s'installe tous les trois par terre au centre de la chambre, comme si on allait tenir une réunion secrète, c'est un peu le cas d'ailleurs dans ce jeu il y a une règle simple : tout ce qui est dit ici ne doit pas en sortir. Marcus prend une bouteille vide avant de la faire tourner, elle s'arrête sur Maxence.

– Tu préfères boire de la pisse avec tes céréales le matin pour remplacer lait ou manger des tartines de merde de chien ?

   J'esquisse une grimace de dégoût, avoir des frères c'est bien pour jouer sauf quand ils partent trop loin dans leur délire. Je sais pas pourquoi évoquer le pipi et le caca leur fait toujours autant rire à leur âge, mon père dit qu'il ne reste qu'un court temps avant que leur lubie passe sur les filles.

Et bizarrement j'ai encore moins hâte.

– La crotte, apparemment il y a plein de protéines là dedans.

   J'ai un haut le cœur alors que Marcus ricane, Maxence se met à tourner la bouteille qui me désigne. Il esquisse un malin sourire et je crains le pire.

– Mel tu préfères peser plus de 200 kilos ou mesurer moins d'un mètre vingt ? Ah je suis bête ! Tu fais déjà un mètre dix les bras levés.

   Je grogne et Marcus me fait signe de pas y faire attention. Maxence et moi sommes toujours en chiens de faïences, et constamment en compétition.

– Arrêtes t'es lourd Maxence. Me défend Marcus. Si lourd que tu te rapproches des 200kg évoqués.

   Si c'est moi qui aurait dit ça, on peut être sûre que j'en aurais pris pour mon grade mais comme c'est Marcus, Maxence se contente de sourire et de prendre ça à la rigolade.

– Toc, toc ! Fait mon père en passant sa tête par la porte. Une partie de baby-foot ça vous dit ?

   Nous nous levons d'un coup en acclamant l'idée de Papa, j'adore mon père. Vraiment il est génial, il joue toujours avec nous même si on est plus des bébés, il nous raconte plein d'histoires rigolotes sur l'époque où on n'existait pas, même si je crois qu'il exagère souvent. Ma préférée c'est celle quand mon père s'est retrouvé nez à nez avec un ours en Alaska, il adore voyager mais depuis que nous sommes nés il ne part plus, je crois que ça lui manque mais pour son anniversaire on économise pour lui offrir un voyage. Bon on a fait les comptes de nos économies la semaine dernière et on s'est rendu compte que l'on avait plus de chance de gagner au loto que d'avoir la somme réunie donc on a placé tout notre argent dans des ticket de loto, espérant gagner le grand lot. Tout ça pour dire que j'adore voir le regard de ma mère quand mon père se met à nous raconter une de ces histoires, elle secoue la tête montrant qu'elle ne croit pas à son charabia mais ne peut s'empêcher de sourire et le couver du regard. J'ai 13 ans et j'y connais rien à l'amour mais ce que je sais c'est que quand j'aurais un mari plus tard je veux qu'on se regarde comme mes parents le font. Ils sont mon modèle, et la seule chose dont je peux être certaine c'est que dans cinquante ans ils seront encore ensemble.