Rdv demain

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- Du jus de pomme ? Sérieusement ? me demande Léandre, un mélange de perplexité et d'amusement dans la voix. La soirée d'hier t'a vaccinée à ce point ?

Comme simple réponse, je lui tire la langue, telle une gamine de cinq ans qui ne saurait pas gérer ses émotions. Ce geste enfantin me fait réaliser à quel point je suis piégée dans ce rôle d'adolescente, coincée entre l'envie de grandir et la réalité de mes années d'école. En agissant ainsi, je me rends compte qu'il est légitime de penser que maman a peut-être raison : je suis trop jeune pour ci, trop jeune pour ça.

- J'ai quand même le droit de t'embêter à propos de ça, tu as embaumé ma chambre, vomito !

Je rougis intensément. Je me sens vraiment mal à l'aise, mais j'essaie de masquer mon embarras.

- Léandre ! Je croyais qu'on ne parlerait plus jamais de cette soirée, ce n'est pas cool. Et puis je n'ai pas... je n'ai pas...

- Régurgité ? s'amuse-t-il, face à la perte de mes moyens. Ses yeux pétillent de malice et je sais qu'il savoure ce moment.

Je pousse un soupir, ma honte se transforme en une légère irritation.

- Ce n'est pas drôle, dis-je, la voix tremblant légèrement.

J'aimerais qu'il comprenne que certains sujets sont délicats, surtout pour moi et que je suis réellement affectée par ses remarques.

- Ce n'est que pour t'embêter, Amy, sinon je n'aurais pas posé mes lèvres...

- Ah, Amy, tu es là et avec... ce charmant Léandre ! s'exclame pleine d'enthousiasme maman avant qu'il ne puisse terminer sa phrase.

Cette interruption inattendue me tire de mon embarras mais elle apporte avec elle une nouvelle sorte de gêne. Mon cœur s'emballe. Que va-t-elle penser ? Son regard est à la fois curieux et amusé et je me demande si elle a remarqué le petit échange qui vient de se dérouler entre nous.

Léandre, toujours aussi sûr de lui, lui adresse un sourire confiant. Comme s'il savait gérer ce genre de situation délicate.

- Bonsoir Madame Stretford, j'espère que la soirée vous a plu, lance-t-il de son aura naturel.

- Oh oui, beaucoup ! Ta prestation a été magnifique, comme à chaque fois, répond-elle avec une excitation débordante avant d'ajouter : et appelle moi Catherine.

Elle termine sa phrase par un clin d'œil qui me semble extrêmement gênant. Instinctivement, je pose une main sur mes yeux, espérant disparaître aussi rapidement que ma vue a été troublée par cette scène. Mon visage est brûlant de honte, je me demande si je vais pouvoir en supporter davantage.

- Merci, je suis ravi de l'entendre, Catherine, répond Léandre, déployant tout son savoir-vivre.

Sans aucune ironie, cet être est tout simplement incroyable. Il a cette capacité rare de s'adapter aux personnes qu'il croise avec une aisance et une rapidité déconcertantes. Je l'observe, bluffée et je ne peux m'empêcher de souhaiter posséder ne serait-ce qu'une infime partie de ce talent. Celui qu'il a pour la musique est hors de portée. Personne ne peut atteindre un millième de son niveau.

- Nous allons rentrer Amy chérie, il est presque minuit, annonce ma mère, brisant mes pensées.

- Mais maman, je n'ai à peine touché à ma boisson ! protestai-je, un brin de désespoir dans la voix.

- Je sais, mais ton père est fatigué. Crois-moi, ce n'est pas rigolo de serrer main après main plusieurs heures d'affilées.

- Si vous le souhaitez, nous pouvons déposer Amy chez vous lorsque nous rentrerons. Je suis avec mon oncle, propose Léandre, désignant d'un geste de la main l'homme charismatique avec qui mon père a échangé un peu plus tôt dans la soirée.

The song of AmyOù les histoires vivent. Découvrez maintenant