Épisode 4

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Quand elle devina ma présence, —les cheveux, puis le front, puis les yeux se remontèrent avec lenteur et prudence, comme font les enfants qui s'amusent à jouer à cache-cache pour observer celui qui les cherche. —

Elle relevait la tête vers moi, elle m'appelait doucement du regard.

J’avançais avec méfiance et même avec un peu d’effarement.

C’est vrai ! En ces temps si périlleux, il est avant tout recommandé d’éviter les contacts proches. Parce qu’à ce qu’il parait, lorsqu’une personne infectée par un virus respiratoire, comme la COVID-19, tousse ou éternue, elle projette de petites gouttelettes contenant le virus. Alors, à moins de maintenir une distance d’au moins 1 mètre, si vous êtes trop près, vous pouvez inhaler le virus.

Lorsque je me suis approché, d'un œil subjugué, nos regards semblaient se mirer l'un dans l'autre en se renvoyant mutuellement leurs reflets.

L'horizon de ses yeux blancs, d'un blanc laiteux, était d'une transparence admirable,  et le ciel de son teint noir, était d'une sublimité tellement surprenante, qu'il me parut que toutes les nuits ne tombent que pour célébrer la couleur de sa peau noire.

Son joli petit visage relevait de l'idylle. Sa bouche était pulpeuse, aux lèvres retroussées comme des bourrelets, son nez ni pointu ni épaté, ses yeux énormes, effrontés, et toute sa chair un peu assombrie par le climat semblait une chair d'ébène ancienne, dure et douce, de belle race, teintée par le soleil des nègres.

Je voulus tout de suite demander : qu'est-ce qu’elle avait, que faisait-elle là en ces heures si sombres?
Quand elle me tira vers elle, cramponna aussitôt ses doigts sur mes lèvres, approchant son haleine effervescent de ma bouche et me fixa de ses yeux énormes avec un petit et discret: Schuss!

Huit secondes passaient ; et nous devenions des complices, huit minutes de plus, et nous devenions des amis qui se comprenaient sans se parler. Huit minutes et huit secondes, elle devenait ma "pota" et moi son "poto". Elle lisait en moi, à travers mes gestes, comme dans un livre ouvert. Et moi, je lisais le fin fond de son regard, même si le contour de ses yeux était garni de mascara couleur agates.
Je murmurais en gesticulant:
Nous ne pouvons pas rester ici, nous sommes à découvert.

Elle répliquait d'un regard qui en disait long:
J'ai du mal à marcher. Je me suis tranchée le mollet par je ne sais quoi, en tombant. Et puis, ou est ce qu'on pourrait bien aller?

Je hochais la tête d'un sourire intriguant, et comme j'avais encore un genou à terre, je redressais la tête, le corps altier, comme savent si bien le faire les gentlemans dans les téléfilms, la tendant la main, comme qui dirait:
Fais-moi confiance, t'es sous bonne escorte.

Elle prit ma main. Dès que nos deux mains entrèrent en contact, j'éprouvais une sorte de décharge électrique, qui me traversa les nerfs le long du bras, depuis le bout des doigts, jusqu'au muscle du cœur. De son autre bras elle m'enlaçait l'épaule et j'enroulais mon bras entier autour de sa taille.

Son souffle devenait soudainement court, alors que je pressentais son cœur qui battait à un rythme saccadé, juste sous son sein gauche accroché contre ma poitrine. Ses longs cheveux vacillèrent dans l'air embaumé, se collèrent contre mon visage enivré, me bandant presque les yeux et je trébuchais.

J'eus brusquement le réflexe d'effectuer un mi rotation, le dos aplati contre un mur et tout son corps de femme s'écrasait sur moi. Cette fois ci, c'est moi qui eus le souffle court et le cœur qui battait la chamade. Je résistais debout, alors que mon bras restait toujours autour de sa taille. De mon autre bras je ressaisis et déplaçais d'une subtile délicatesse ses cheveux éparpillés de partout mon front, tandis qu'avec lenteur elle ouvrait et étalait ses lourdes paupières, on eut dire des ailes d'ange.

Elle me sourit, je la souris, nous nous sourîmes.

J'entendais souvent ma mère qui disait: «Sourit de plein cœur et le cœur des gens te sera ouvert.»
Elle disait que "le sourire est la mélodie du cœur."
Je n'avais jamais compris le sens profond de ses paroles, jusqu'à ce qu'il me fût offert la chance d'ouïr la mélodie chaleureuse de son doux rire.
La musique qui retentissait à travers ses dents blanches, d’une blancheur immaculée, ce doux son attendrissant et presque hypnotique était la plus belle symphonie qui m'était permis d'entendre jusque-là.

Nous parlions toujours en mimétisme, mes yeux accrochés contre son regard, son doux rire défiant mon fou rire, ses seins cramponnés contre ma poitrine et bientôt mes deux bras se baladèrent sur ses hanches, dans un langage corporel le plus significatif.

Est-ce que ça va? M'inquiétais-je en haussant les sourcils.
Elle répondait en hochant la tête:
Weah, tirons nous d'ici!

L'instant était plein de solennité. Je la saisis les deux bras, les enrôlais à mon cou, tandis que ma main gauche quittais ses hanches en remontant le long de son dos, je penchais le poids de mon thorax contre sa poitrine comme pour ramener son corps au sol, elle accompagna le mouvement en cambrant le dos. Je fis une flexion des genoux, glissais ma main droite sous ses jambes et me redressais avec elle, la portant à bras le corps.


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