Épisode 34

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Nos corps se raidirent un instant avant de tomber mollement, et nos deux personnes s'effondraient l'un à côté de l'autre sur le lit. Elle se blottit contre moi et je fus plus qu'heureux de la recevoir.
Elle leva les yeux sur mon visage, déposa un ardent et muet baiser sur mon front, puis elle sourit amplement. Elle disait quelque chose mais je ne comprenais rien car elle s'éloignait pour aller se pencher sur le balcon et voir ce qui se tramait.
Elle fit aussitôt un bond en arrière :
Mon père ! Sir Amares ! Vite, cache-toi.

Et comme je m'étais séparé de mes vêtements sans lesquels un homme surpris devient aussi gauche que ridicule, et incapable de toute action, je cherchais, éperdument éhonté, mon pantalon. Elle grisonna d’une voix haletante :
Va vite, trouve-toi une cachette.

Je m'étendis à plat ventre et me glissais sans murmurer sous le lit.
Il est dit qu’ «On est jamais aussi bien que chez soi.» Je ne sais vraiment pas dans quel contexte ce dicton a été employé pour la première fois. Mais en ce qui me concernait pour cette situation, c’était fichtrement vrai. —Je n'ai jamais eu, en effet, de goût pour les rendez-vous secrets sous un toit à l'extérieur, ce sont là des souricières où sont toujours pris les imbéciles. —
J'avais la tête en feu. Mais je me contins très vite quand j’entendis une voix forte tout près de la porte, « Toc, toc, toc » :
Sohna Khoudia !
Oui père, entre stp ! Je te croyais déjà au village…
Nous avons eu un contre temps au bureau. Est-ce que ça va, tu m’as l’air toute essoufflée là ?
Oui, ça va…juste quelques exercices physiques !
Depuis quand tu fais des exercices physiques dans une chemisette de nuit ?

Et en un laps de seconde, un silence d’enterrement s’était évaporé dans la chambre. Le daron s’était arrêté juste près du lit. Je fus soudainement submergé par un curieux désir de contempler son visage… mais depuis mon refuge, je ne pouvais pas voir son visage ni le reste de son corps, seulement ses souliers noirs. Les pieds étaient si près de moi qu’une stupide et inexplicable envie me saisit de les toucher tout doucement. Mais je ne me laissais point tenter, je me retins. Par contre, ne pouvant résister au désir qui me torturait, cette folle et stupide envie qui ne me quittait guère, je pris l’écran de mon téléphone portable que je projetais sur le miroir….

Alors je vis, ô malheur inespéré ! Le visage de la vérité qui me fit aussitôt regretter mon ignorance. Dans le premier transport de l’exaspération, je faillis sortir du lit, mais la réflexion m’arrêta.
Non, c’est impossible, me disais-je tout bas.
Dans quelle merde m’étais-je fourré jusqu’au cou? Etait-ce réellement lui son père ? Ou n'était-il qu'un fantôme, une erreur des sens, un mirage, un spectre, une hallucination?
Je demeurais dans l’effarement complet devant l’incompréhensible chose qui se présentait sous mes yeux quand le vieux enchaina :
Est-ce que c’est à cause du mariage que tu stresses ?

L’homme s’inquiétait, il pensait, donc il existait. Je ne m'étais pas trompé, il vivait. Je reconquis sur-le-champ toute ma placidité. Je fis un sourire. Il fallait me calmer.

Ne t’en fais pas pour ça père, repris Sohna Khoudia.
.Dis-moi plutôt, c’était rien d’inquiétant j’espère, je veux dire au bureau ?
.Malheureusement si. Sir Amares a égaré certains dossiers et si par malheur ça tombe en de mauvaises mains, nous allons tous payer, tous y compris moi. Il songe même à reporter le mariage. Mais comme il était convenu que nous allions au village pour leur honorer de notre présence, nous partons de ce pas pour une semaine probablement.
Il dit cela d’un ton exaspéré et il se retire. J'étais sauvé ! Je sortis lentement de ma retraite, humble et piteux.

Alors anéanti, craignant de ne pouvoir garder longtemps cet épouvantable secret, je cherchais dans ma tête quelle figure de style employée pour l’apprendre que son vieux père était aussi corrompu et magouilleur que son vieux acolyte Sir Amares.  Mais c’est elle qui, d’une voix brisée me dit :
Je vais mourir !

Symptômes amoureuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant