Épisode 16

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Je réalisais aussitôt que j'étais sorti du lot de mecs pour qui elle dit : « Les hommes me dégoutent ! ».

Mais je feignis ne rien entendre. Parce que je savais qu'il ne s'agissait pas d'elle, qu'il ne s'agissait pas de moi, qu'il ne s'agissait pas d'une flèche dont Cupidon nous avait transplanté, en fin, qu'il ne s'agissait pas d'amour. Quelque chose dont j'ignorais le nom nous avait étroitement attiré l'un vers l'autre ; et nous nous lancions des mots insignifiants dont ni moi, ni elle, ne saisissait le sens ; mais ces mots allumaient une flamme dans nos regards et la faisait rire.

Et alors qu'elle s'efforçait toujours de comprimer ses fous rires, elle enchaina :
Bon, tu mérites bien tes conseils. Dis-moi, qu'est ce qui te tourmente ?

•Je crois que je suis tombé sur le charme d'une ibadou. Le truc, c'est que je ne sais pas quelle posture tenir face aux femmes voilées.

•C'est qui, la meuf avec qui t'es venu ? Il me semble pourtant que vous vous conjuguez bien.

•Ah non, celle-là c'est ma sœurette. Et puis, je veux bien une femme pieuse, mais pas une sainte.

Elle me défigura d'abord d'un regard que j'ignorais encore chez elle ; et comme sa main était toujours restée sur mon épaule, elle m'attira tout doucement contre elle en chuchotant sensuellement à mon oreille:
Un baiser inattendu et spontané est un moment divin!

Alors je fis de gros yeux ronds. Et je jouais à celui qui refusait de comprendre, elle posa sa paume sur mon cou, de manière à laisser trainer sa main caressante ; et effleurant presque de par ses lèvres voluptueuses le lobe de mon oreille, elle murmura :
Embrasse-la à pleine la bouche, en y mettant tout l'âme de ton cœur.

Alors, d'un baiser inattendu et spontané, je compressais ma bouche entr'ouverts sur ses lèvres parsemées de voluptés ; l'enveloppant d'une tendresse douce et sensuelle.

Non pas de ces baisers qui font danser sa langue en extase dans la bouche de l'autre, comme un homme qui cherche à montrer l'étendue de son savoir-faire. Mais de ces baisers qui font circuler le désir d'une énergie vive et brûlante d'une lèvre à l'autre, qui font se fermer les yeux comme si c'était la première fois et la dernière fois de toute une vie.

Et le baiser fut passionnément suave et muet ; et le baiser fut ardemment long et profond, encré jusqu'au cœur même de l'âme.

Lorsque nous rompîmes le baiser, elle maintenait tout près de ma bouche ses grandes lèvres retournées. Elle me parla alors dans la bouche et me jetant son haleine chaude au fond de la gorge :
Personne ne sera au garage à cette heure.

Et comme je ne saisissais point son idée. Elle passa ses bras à mon cou, elle appuya sur ma bouche une de ces caresses dont elle seule connait le pouvoir, puis elle murmura :
Je suis une femme pieuse, mais pas une sainte !

Symptômes amoureuxOù les histoires vivent. Découvrez maintenant