Don't look at my past [Terminé]

Chapitre 28.1

{All Star-Smash Mouth}

-Je déteste l'avion, je te l'ai déjà dit non?

-Adan, tu me l'as répété environ trente fois. Arrête de paniquer et essaie de t'endormir, il est six heures et on arrive vers quinze heures avec l'escale à Dallas.

-C'est tellement long, la terre me manque déjà.

-"Je ferais tout pour toi", on dirait bien que tu as perdu tout ton courage.

Il se retourne vers le hublot en marmonnant des mots que je ne peux pas entendre. Sûrement une de ses théories selon lesquelles l'avion a des chances de ne jamais arriver, d'avoir un problème technique ou je ne sais quoi. 

Il partage son écouteur avec moi et laisse filer dans mes oreilles Angel de Theory. Je le regarde s'endormir quelques minutes après le décollage. et je ne comprends pas comment un être aussi extraordinaire a pu se retrouver sur ma route. 

Il a littéralement sauté dans un avion à mes côtés en direction de Cleveland, je l'ai bien sûr prévenu qu'un week-end avec mes parents ne sera pas de tout repos. J'ai aussi appelé ma mère pour lui dire de prévoir une place de plus sans lui laisser le choix, c'était nous deux ou personne.

✭✭✭

-Et voilà les jeunes, on y est, ça fait si longtemps que je ne suis pas venue.

Évidemment, jamais je n'aurais imaginé ce saut dans les enfers sans Suzie, elle et Adan sont mes deux piliers pour faire face à mes parents. Je marche dans l'allée de mon enfance, celle que j'ai lâchement abandonnée. 

Je laisse résonner trois coups peu certains sur la porte jusqu'à entendre les talons de ma mère résonner. Sans la main d'Adan pour me servir de décompresseur, je crois que je serais déjà partie en courant tout droit vers Olympia. 

Je vois apparaître en premier lieu la chevelure noire de ma mère, plaquée et lissée comme à son habitude, jurant avec le rouge sang de ses lèvres. Elle me toise un instant sans un mot, je sais exactement ce qu'elle essaie de faire. M'analyser, me juger et m'affaiblir avant de me balancer tous ses reproches.

-On ne t'attendait même plus June...Suzanne un plaisir de te revoir.

Tout sonne toujours faux chez elle, mais je ne m'attendais pas à plus. Elle se décale légèrement pour nous laisser entrer. Elle s'arrête net lorsqu'elle voit Adan passer la porte, sa main toujours enlacée à la mienne.

-Et vous êtes?

-Je m'appelle Adan, je suis le copain de votre magnifique fille. Enchanté.

Lui aussi a le droit au regard de tueur, elle le juge de haut en bas et je vois très bien dans ses yeux ce qu'elle pense. Les remarques vont fuser, je vais m'en prendre plein la tête mais je m'y attendais en venant ici.

-Je vois...

Dans un silence solide, je redécouvre l'entrée puis le salon de ma maison, elle est strictement identique à celle de mes souvenirs. Adan ne semble pas faire attention à ce qui l'entoure mais il se concentre uniquement sur moi. 

Parfois il glisse à mon oreille un "Je t'aime" ou "Tout va bien se passer", j'aimerais vraiment le croire sur parole. En arrivant dans la pièce principale, je suis plutôt surprise de voir April se placer devant moi. 

Elle m'enlace timidement et je réponds ébahie. Je n'ai jamais parlé avec depuis ce jour-là, je sais que je l'ai fait énormément souffrir et je ne pourrai jamais assez m'excuser auprès d'elle.

-Je suis tellement heureuse que tu sois venue et je suppose que tu es son petit ami, je suis ravie de te rencontrer.

Adan ne répond rien hormis un léger sourire qu'il renvoie, il reste méfiant face à cette situation et il a bien raison. Je remarque quelques proches que je n'avais pas vus depuis des années dans le jardin, je salue tout le monde rapidement sans jamais lâcher sa main. Chaque pièce de cette maison me rappelle de mauvais souvenirs...

-Je crois que ta famille ne m'aime pas vraiment.

Adan et moi nous sommes isolés dans un coin de la pièce, je reste toujours près de lui histoire de survivre à cette après-midi. Mais je sens les regards et les chuchotements qui font siffler mes oreilles.

-Je m'en serais douté. Dans tous les cas, quoi que je puisse faire, rien ne leur conviendra. Ne t'inquiète pas, ça ne vient pas de toi spécialement.

-Je m'en fous de toute façon je ne suis pas venu pour me faire apprécier mais uniquement pour toi. Alors ils peuvent continuer à parler entre eux en pensant que je n'entends pas toutes leurs remarques, ils confirmeront ce que je pensais.

Je me cache contre son torse pour camoufler mon rire, il en fait tellement pour moi aujourd'hui comme tous les autres jours, je ne saurai jamais comment le remercier. 

J'aperçois du coin de l'œil ma mère m'observer sévèrement puis partir en direction de la cuisine. Elle met immédiatement fin à mon rire et je comprends qu'elle veut me parler seule à seule. Une ombre que j'oubliais me suit.

-Je préfère lui parler seule, il ne vaut mieux pas que tu entendes ça.

-Pas de problèmes, je t'attends juste ici mais si le ton monte je débarque.

Je découvre ma mère adossée au plan de travail, je pourrais presque deviner son discours avant qu'elle ne le prononce. Elle a eu des mois pour s'entraîner et faire la liste de ses reproches, elle n'attendait que de me les balancer en pleine figure.

-Je vois exactement à quoi tu joues...tu te crois maligne June?

-Ne commence pas ça s'il te plaît, je suis venue uniquement pour April et certainement pas pour me battre avec toi comme avant.

Elle secoue la tête et laisse échapper un sourire narquois.

-Tu ne voudrais pas essayer de grandir un peu. Entre toutes tes conneries ton père et moi on ne s'en sort plus. Imagine ce que je donne depuis des mois pour redorer l'image de cette famille.

-Tu t'entends parler, c'est toi et toujours toi. Tout tourne autour de ton petit monde.

Elle fulmine intérieurement. Je n'avais pas remarqué que ma voix était plutôt élevée, Adan débarque aussitôt, mon père à sa suite.

-Il faut en plus que tu le ramènes pour nous narguer, tu n'es qu'une gamine capricieuse et on n'aurait jamais dû te laisser partir à Olympia.

-Il n'est certainement pas un caprice!

C'est un peu malsain de parler d'Adan sans qu'il ne réponde mais il reste calme derrière moi, agissant seulement comme un soutien.

-Owen, tu ne dis rien, je t'en prie aide-moi à la remettre sur le droit chemin.

Mon père me regarde sans émotion pendant plusieurs secondes, l'absence de réponse de sa part est encore plus violente que je ne l'aurais pensé. Je n'espérais pas plus de sa part lorsqu'il s'éloigne à nouveau vers le salon.

-J'espère que tu te rends compte de ce que tu as fait à notre famille.

Sa remarque m'atteint plus que les autres et je ressens l'envie de m'éloigner.

-J'ai besoin de prendre l'air, je vais faire un tour...